H.A.M.S. ! n°10

 

 

 

 

 

Chroniques Musicales

 

THE VIRUS : Benefits of war (EP Dirty Punk Records DPR012 ; 10’ ; 4 t. ; 2003)
Ce groupe est la sensation forte outre-Atlantique actuellement en matière de punk, vu d’ici du moins. On ne peut pas dire que ce ne soit pas mérité. Leur musique est aussi agressive et fluide que leurs crètes sont longues et leurs blousons badgés. Sur les quatre titres, seul Keep on walking est en deçà d’une barre placée bien haut. Dénonçant la guerre en Irak, Benefits of war est une tuerie, bien épaulée par Undercover (qui cause du caractère moutonnier des gens, notamment dans la mouvance). Cela se termine par une reprise de Blitz, Nations on fire, bien exécutée (d’autant que l’original n’est pas le meilleur morceau du groupe mancunien).
Encore une bonne pioche pour le label nordiste !

[Victor]


! BRAVO FUCKING BRAVO ! : ! Bravo fucking bravo ! (CDR autoproduit ; 14’ ; 6 t. ; 2003)
Pas connu des masses, ce quintette américain donne dans une veine à cheval, le hardcore-noise, de l’émo qui tout de même balance la sauce. La présentation, très minimale, entre deux feuilles de cartons, du disque sur lesquels un anonyme met une couverture à son copain en train de cramer, n’en est cependant pas moins congruë car la musique est assez sèche et désespérée sans tomber dans l’ultra-violence. Cela a des airs de ressemblance avec, en France, Hole Process ou surtout Azraël, le groupe charentais. Classique mais bien fichu (mention particulière à Riot to City Ratio 3 :1).

[Victor]


HIV+ : Interferencias (CDR 3 pouces 3patttes Rds 3p005 ; 17’ ; 4 t. ; 2004)
Contenu dans une boîte de Pétri, ce bel objet annonce la couleur par sa présentation sur fond d’oscilloscope et de globules rouges en gros plan. L’on est toutefois surpris par la teinte du premier morceau, Une chienne andalouse (part 2), moment d’ambient dans lequel se mettent à germer de plus en plus de stridulations machiniques, puisque HIV + est un DJ marseillais plutôt connu du côté industriel (c’est l’animateur notamment du festival Armaggedon). Tout rentre dans l’ordre dès la plage 2, apparemment une collaboration avec un certain Epilemia, où des rythmes industriels de fonderie plus typiques donnent la cadence cependant que viennent s’y insérer des voix aiguës d’outre-tombe et dérangeantes, elles-mêmes chassées par une voix germanique qui s’impose à la fin, autoritaire et mystérieuse. L’inquiétude ne retombe pas plus dans le morceau suivant, Conspiracy, puisque le côté industriel y est encore plus présent, progressant parmi des nappes inamicales. Tout cela retombe finalement dans le dernier volet, un remix du premier titre par Planetaldol, pilier du label, dont on reconnaît bien là l’attachement aux atmosphères ambient, toujours hésitantes entre le planant et l’effroi. Bien tournée et originale pour HIV +, cette petite galette qui gît au fond de sa boîte vaut qu’on la délivre et bien des remèdes médicamenteux.

[Victor]

BONECRUSHER : For your freedom (45t. 77RPM Rds ; 3 t. ; 8’ ; 2001)
Trois titres pour ce fameux groupe de streetpunk américain avec une pochette qui sert de carte de visite pour les gens égarés puisqu’on y voit des roussins d’outre-Atlantique avec leur paletot Robocop et qui nettoient la rue mieux que Monsieur Propre ton évier. Au dos, un keupon (avec toute la panoplie, logo anar sur le pull et bonne crète des familles) se fait pécho avec le sourire par nos mêmes amis qui ont décidé de l’emmener chez eux pour un goûter (« oh flûte, il est encore tombé tout seul dans l’escalier avec les bras attachés dans le dos, il est pas adroit celui-là, dis… »). Côté musique, c’est couci-couça, il faut bien l’admettre. Pour une bonne chanson au rythme lent et qui n’est pas sans rappeler Agnostic Front (Freedom), les deux autres sont plutôt plombées par une guitare quelque peu mélodique et entendue mille et mille fois… Dommage car cet ensemble sait pourtant ouvrager de sacrées perles habituellement.

[Victor]

LAMBSHOP : Awcmon + Noyoucmon (2 CD Labels « City Slang » ; 12 + 12 t. ; 48 + 47’ ; 2004)
Je n’ai jamais été fan de ce sous-Léonard Cohen qu’est Lambshop et il faut dire que le premier de ces deux CD n’a fait que me conforter dans mon opinion. Tout y est fadasse et flagada du mollet, une sorte de Tindersticks étiolé qui n’arrive pas à se hausser du col malgré ses prétentions, le tout évoquant par moment étrangement et comme je l’avais déjà dit dans une précédente chronique, Daniel Guichard… Oui, ça laisse rêveur… J’arrête là la casse puisque, s’il recèle en partie les mêmes défauts, le second disque, nommé Noyoucmon, possède des plages abouties. Ah ! Tout d’abord, un morceau rock (Nothing adventurous please) avec piano, bien torché. Si l’essai sur About my lighter, dans une veine pop intimiste, manque être transformé, il l’est totalement sur les deux trucs suivants, Under a dream of a lie et A.N., aux évocations évaporeuses de bords de mers ensoleillés, en pleins vent et sérénité. The Gusher quant à lui évolue entre guitare saturée et teintes cool légèrement bossa à la Chris Rea (jeu clair de la guitare). La pénultième chansonnette enfin, Listen , est un mélo bien emmené, à deux à l’heure, avec cette voix de dernier occupant du bar, pour une fois utilisée à bon escient par Lambshop, non sans rappeler notre bon vieux Schmoll des familles. Eu égard à la quantité de machins pas au poil, je conseillerais au final plutôt de l’emprunter à un ami popiste (à cause des certains morceaux qui valent le détour) que de coller ses billes là-dedans, bien que la présentation en mini-coffret de l’ensemble ne fût pas vilaine (elle m’évoquait de loin la Planète sauvage).

[Victor]

GREEN BERET : Green Beret (CD Emergence ; 17 t. ; 28’ ; 2003)
Déjanté, le mot est couru, certes, mais là il a pour de bon trouvé preneur. Ce groupe américain hors norme tient autant du Franck Zappa des 60’s que de BS-2000, le tout sur une texture grind que ne renierait pas des agités comme les Tekken, par exemple. Une voix féminine haut perchée qui perce de temps à autre derrière des chants et des cris masculins furibards, des cordes électriques et de l’orgue à pas cher, tout ça sur fond de samples de films amerloques des années 40 / 50, de quoi être rassasié pendant cette déferlante d’une demi-heure de temps (et les heures suivantes aussi d’ailleurs). Super original et la pochette est à l’avenant puisque, loin des paras et de John Wayne, on y voit Richard Burton en costard faire mal aux poignets à une actrice de l’époque. Quant aux titres, n’en parlons pas et vise un peu, tu m’en diras des nouvelles : Ebola in your cola, Involuntary organ donor, show me your warface et une variation sur Garden of the green beret . Super original et à ne pas louper, nom d’une casquette !

[Victor]

METRONOME CHARISMA : Métronome Charisma (CDR autoproduit ; 8 t. ; 28’ ; 2002)
Derrière une présentation on ne peut plus minimaliste se cache un groupe creusois à l’émo-trash-noise plutôt bien trempé. Après une première plage assez douce, c’est un déluge sonore et vocal qui dégueule des enceintes, en des morceaux assez longs et qui se tiennent, entre violence hystérique et expressivité à fleur de peau (à part M Maybe et Transition from existential emptiness to dystrophy, plombés par les intonations niaisouses du chanteur). Une bonne démo quoi qu’il en soit et dont on espère qu’elle sera suivie d’autre chose (un album est attendu logiquement, a annoncé Métronome Charisma).

[Victor]

FINALCUT : Sévère (CDR autoproduit ; 50’ ; 12 t. ; 2002)
Nouvelle formation d’un des anciens membres de feu Piccolo Saxo exilé en Belgique, Finalcut évolue dans une ambient expérimentale soignée et peu encline au clinquant.. Passé la première plage, ce voyage débute directement par la fin, à savoir le Jour des morts, paradoxalement chaud et presque exotique (des morts zombies ?). Si l’on saute le morceau suivant, terne il faut bien dire, la croisière reprend au rythme d’un crescendo liquide qui baigne de ses clapotis une angoisse sourde au fond d’une grotte (Voix). Changement d’orientation avec Domine, puisque de l’indus aux sons GRM, l’atmosphère musicale s’écartèle avec un bonheur et un savoir-faire certains. Tout le contraire des assez mauvaises Réjouissances avec leur mélange de clochettes et de moteur de rasoir électrique, mais cette impression mi-figue mi-raisin est vite écartée par l’excellent Berline un jour, de première bourre. Idem pour les répétitives et agréables Harmonies qui tanguent de manière lancinante au son d’une guimbarde indienne étrange. On restera par contre plus dubitatif sur le concret Granulaire 02 et le long et imperceptible Persépolis. La présentation en boîtier transparent rempli de fleurs séchées est originale. Une démo qui n’est que le début d’un nouvel univers musical ambient expérimental, notamment développé depuis dans la collaboration avec l’électronicien de l’Allier Planetaldol, via le groupe bicéphale Finaldol.

[Victor]

THE DONTCARES : Ugly... but well hung !! (CD Big Bongo Rds / Mass Productions ; 14 t. ; 23’ ; 2003)
Punk’n’roll survitaminé, ces Dontcares n’ont rien à envier à leurs cousins français Gasolheads ou Exxon Valdez (avec qui ils avaient d’ailleurs fait un split sur Lollipop). Leur musique de furieux met le moteur dans le rouge et on finit par rouler sur les jantes, heureux mais contents ! Avec une voix à la GBH, ces Suédois mitraillent quatorze titres, parachevés en un instrumental, sortes de balles qui, tant au disque qu’au concert (voire plus en concert), zigouillent son homme et pompent toute l’énergie ambiante en moins de tant qu’ils n’en faut pour le dire. Vendeurs d’amphètes, planquez vos échoppes !

[Victor]

PLANETALDOL-ROHYPNOISE : Hierba Loca (CDR autoproduit ; 10 t. ; 34’ ; 2002)
Planetaldol et Rohypnoise ne sont en fait que les deux faces médicamenteuses d’un même personnage, Anthony Colas. Fauteur du pas clair, du bien brouillé et du dérangeant, Planetaldol produit ici une musique sombre, aux limites parfois du gothique et du film d’horreur (E.E.G. et de l’autre de la musique concrète, reposée (Petite queue de lion) et d’ambiance (mais plutôt ambiance The Kingdom de Lars von Trier… ; cf. Suintements gras). Nonobstant deux-trois gimmicks reconnaissables (effets de scie, voix cavernales) mais jamais déplaisants, on a là une œuvre mature et de très grande qualité, comme l’introspection d’une migraine par un rhume, sensations on ne peut plus adorables il est vrai… Pour une première prod., je dis chapeau (de Napoléon à Saint-Anne). Une figure de l’illbient française à suivre (mais surtout pas la nuit en dormant ! ).

[Victor]


FREE FOR ALL : Démo 2003 (CDR autoproduit ; 4 t. (+ un extrait de film) ; 11’ ; 2003)
« Nous ne jouons que du punk rock mais nous le faisons avec sincérité ». Ainsi s’avance sur l’insert à l’intérieure de ce quatre-titres Free for All, groupe de punk-rock mélodique Dommage que cela ne suffise absolument pas à faire un bon truc. C’est gentillet, sans doute bien joué mais ça m’a laissé impassible d’un bout à l’autre. Ce qui manque surtout à cet enregistrement, c’est de l’originalité (à l’inverse d’un groupe avec lequel ils ont fait un split et qui s’appelle Weeping Mind of Silence). A contrario, la pochette est sobre et bien tournée (sur papier kraft).

[Victor]

OVERMARS / FUGÜE : Our dream walking their way - Chapter 3 (split CD Waiting For An Angel WFA020 / Cetacean Coco1 ; 7 t. ; 57’ ; 2003)
Un groupe français, un autre japonais pour un split de hardcore-noise impressoinnant. Pour le coup, la notion du split a tout son sens puisque l’osmose est pour le moins frappante entre les deux groupes. Overmars (les hexagonaux) pratique un style très risqué, fait de morceaux de plus de dix minutes avec paroles parfois parlées et de plus certaines fois en français (si j’ai bien compris). Super casse-gueule mais ça passe… et bien qui plus est ! Pour les habitants du pays du soleil levant, si les morceaux sont moins longs, la pression et l’intensité sont tout aussi présentes et les quatre titres de Fugüe déferlent puissamment sur des auditeurs subjugués. L’objet lui-même est une sorte d’empaquetage fort bien réalisé avec une façon de poster au milieu. Il me semble en outre que tout cela n’est pas très cher. Ça, c’est de l’indépendant 100% réussi ma parole ! (ou alors je me fais secrétaire de section U.M.P. à Trouville). Une bonne claque dans les gencives.

[Victor]

THE MUTANTS : Deathrace 3000 (CD Green Cookie Rds GC003 ; 10 t. ; 45’ ; 2002)

Ça, c’est l’Europe en marche comme on l’aime : un groupe finlandais sur un label grec (celui qui a publié le premier album des excellents Star & Key of the Indian Ocean). Les Mutants sont un groupe de surf assez calme mais qui assure carrément bien. La couverture montre le départ d’une course de mobylette intitulée comme de bien entendu Deathrace 3000 et ça, c’est déjà un bon point. Au début le disque est dominé par une teinte western telle celle qu’on retrouve chez leurs confrères tudesques des Cave 4. Pour le reste, tout s’écoute sans déplaisir dans une teinte surf classique, parfois inquitétante (Bungalow Boo-boo-boo) ou au contraire hyper dansantes (Beachwolley mudparty) avec des intros bien tapées comme d’hab’ (bagnoles, sons spatiaux, percus exotiques) et un petit côté tout fou pince sans rire à l’Aquabats.

[Victor]

BBUGG : Morceaux de ficelles (CD Skalopards Anonymes Skalobugg1 ; 12 t. + un clip vidéo ; 50’ ; 2002)
C’est rare que, dans une mauvaise part, je bloque sur un disque comme c’est le cas pour celui-ci. Sur un fond hardcore-fusion, un chant maladroit (ou particulier, ça dépend du point de vue) qui varie à tout bout de champ, des paroles pas toujours heureuses mais qui se veulent contemporainement poétiques sans doute, bref, c’est pas la grande joie que l’ écoute de ce skeud-ci (on peut racheter à la rigueur Ma gueule de fourmi, et encore…). La présentation, attachée à la ficelle en référence au titre, n’est pas simple à manier… Rajoutons à cela que le vidéo-clip ne se vêt pas d’immarcescibilité et on a là une galette peu, vraiment peu transcendante (bien qu’originale).

[Victor]


RICHARD DURN : Tant que la violence d'Etat se nommera justice, la justice des peuples se nommera violence (CDR Acide Folik Rds / Ben Le Millionnaire ; 14 t. ; 19’ ; 2003)
Richard Durn, c’est bien le vieux gars pris d’un « coup de folie » qui avait estourbi le tiers du conseil municipal de Nanterres en 2002, juste avant les élections présidentielles, coïncidence, coïncidence... Après, sans doute grand fan des sports extrêmes et de la voltige, il s’était, menottes dans le dos, jeté par un vasistas dans une cour pavée six étages plus bas, le tout en présence de deux roussins qui n’avaient rien fait pour l’arrêter, probablement pétris d’admiration pour l’exploit sportif... Vingt-cinq mètres plus bas, Richard Durn n’eut pas le temps de savourer sa prouesse, le sol parisien lui ayant définitivement signifié son fait. Dossier clos pour la justice, ça ne ressemblait pas, non surtout pas, à une bavure, à un truc louche, à un machin qu’on eût voulu enterrer… Un an plus tard, en Lorraine, un groupe de jeune reprend le patronyme de l’éclaté du Quai des Orfèvres . Ils débitent leurs morceaux comme feu leur pote les bastos, savoir de manière expresse, sans prendre de gants ni faire d’annonces. Il y a à boire et à manger dans ces vingt minutes de matière sonore. Pour le moins bon, on dirait du sous-Action Directe première période mal digéré (Rêves et utopies). Pour le reste, on oscille entre le crust du dimanche et le grind des familles (que de subtilités dans cette différenciation) avec des intros assez originales (C.OP.S., Non sens). Parfois le chant en français les dessert mais c’est toujours courageux de le préférer à l’anglais-yaourt que l’on voit partout. Le livret, pas mal construit et consistant, explique le thème de chaque chanson en deux langues. Débuts honorables et on attend désormais une suite peaufinée où Richard prenne enfin définitivement sa mesure.

[Victor]

FINALCUT : Denorme (CDR 3’’ 3 Patttes Rds ; 6 t. ; 20’ ; 2003)
Nouvelle production pour le label électronique franco-belge 3 Patttes par un des artistes maison, j’ai nommé Finalcut. Le premier morceau, Hell’s Bells , dominé par des gamelans qui martèlent lancinamment au cœur d’une atmosphère éolienne, est une très belle entrée en matière. On pense poursuivre sur cette lancée grâce à l’atmosphère inquiétante constituée de petits bruits insistants en nappes d’Une autre voix, mais l’ensemble est complètement gâché par l’insert d’une voix réaliste qui demande si on entend bien le morceau (ce à quoi on répondra oui mais que ce n’était pas la peine de le bousiller ainsi). Heureusement un court interlude atmosphérique très réussi et qui peut faire penser à Fragile fait oublier cela et amène Mouche préférable, digne du Balbynien Pierre Fiala, dans lequel des horizons élancés de soleil levants voient les puissances diurnes arriver en cortège via des infra-basses qui vibrent tant et plus dans un magma originel, telles les Couleurs de la nuit de François Bayle, tout cela jusqu’à l’arrivée de nuages d’insectes et d’un lancinant son de radio-amateur. Avec le précédent, deux réussites qui valent largement bien des morceaux du GRM (mais ont coûté mille fois moins de pèze…). Là encore, il y a de quoi enrager car des incrustations de voix réelles viennent à nouveau comme un cheveu sur la soupe pour commenter le numéro suivant et qui sans ça était des plus plaisants. La partie finale, A l’inverse des autres tombes, basée sur une rythmique très carrée par une sorte de mélange d’un vibraphone et de frottements électriques par dessus une ambiance sourde, achève ce petit disque et montre la grande valeur artistique, à mi-chemin entre ambient et contemporain, de l’univers du Bruxellois Finalcut.

[Victor]

HAPPY MONKIZZ / RUSS MEYER’S PUSSYCAT : Split CD (CDR Rabid Rds ; 5 + 5 = 10 t. ; 17’ ; 2003)
Dans le genre trashmusic – amateurs de cinéma bis, voici deux groupes champenois qui d’un prime abord promettent. La pochette représente une BD à la Harry Potter détournée, toujours bon à prendre ce genre de truc appréciable à tout âge. Pour ce qui est de la musique, côté Happy Monkizz, on a là du sous-Gronibar à dominante scatologique, influencé par la vision de Vendredi 13 et qui se situe dans la droite ligne du porno-grind le plus traditionnel. Plus nuancés, paradoxalement sont les Russ Meyers’s Pussycat qui entremêlent extraits de films, ambiances électronica (Barry White), vieux sons de C64 (Je m’endors – special rabid mix) et surtout hardcore bien rugueux, sentant la sueur et la graisse de J7 frites-saucisses sur une aire d’autoroute (celle sur l’A4 à hauteur de Sillery par exemple). Bonne surprise que ce groupe-là ! A écouter ces fils de saint Rémi, on voit qu’assurément, au pays de la roteuse, certains tiennent toujours fièrement brandi le flambeau de l’art léger.

[Victor]

FOUTREDIEU !!! / BUG CEREBRAL BUG : Split CD (CDR Chiass Prods CP07 ; 6+1 = 7 t. ; 57’ ; 2004)
Autre split, autre genre, on a ici affaire à de l’indus carabiné du genre à vider une salle en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Deux groupes mais six morceaux d’un côté et un seul de l’autre. Bug Cérébral Bug (excellent pseudonyme pour ce duo qui se veulent les fils cachés de Jean-Michel Jarre) joue en effet pendant plus d’une demi-heure une sorte de mix sans filet mais hélas, pas toujours réussi et que ne parvient pas à relever l’insert assez long du sketch des Deschiens sur la visite à l’abattoir, avec Lochet et Morel en vedette. Quant à Foutredieu !!!, band de la Belle Province, il faut chercher une comparaison du côté des plages les plus industriels de Caretaker, entrecoupées de titres ambient malsains. Ce n’est pas à se rouler par terre mais c’est plutôt pas mal dans l’ensemble. La pochette par contre est de première bourre pour ce qui est de la fabrication DIY, portée ici à son sommet (un mélange de pelloches, de photos et de peintures, bravo !). Il devait y avoir une partie multimédia dans cette rondelle mais je ne suis pas parvenu à la lancer. Drôle de disque que ce disque-là.

[Victor]

 

CZOLGOSZ : Saipan (EP Rodent Popsicle Records RPR62 ; 6 t. ; 12’ ; 2002)
Ce combo, originaire du Massachussetts, arbore le nom d’un des plus célèbres anarchistes américains, celui qui fit regretter d’être sorti ce jour-là au président McKinley. J’avais quelques appréhensions à la vue du sous-titre (« L’anarcho-communisme ou la mort », ah merde, on est mort…), m’attendant à du ska-punk en sachet comme il s’en fait tant. Toutes ces inutiles suspicions au contraire s’envolent dès la première écoute : du punk-noise de première volée, un discours contre l’exploitation au travail, contre la prépotence amerloque et anti-anti-avortement, une pochette très éloquente, rien à redire, ces Bostoniens visent juste et nous offrent là un très bon vinyle (la palme à What's the point et Pro-life is terrorism).

[Victor]

SCRAPY : Streetska (45t Black Butcher Rds BBR029 ; 3 t. ; 8’ ; 2003)
Oui bon, le ska pour les skinheads et les punks, c’est le thème ici, c’est certes bien joué mais on a déjà vu ça quinze mille fois, la bonne section cuivre, les paroles d’unité et l’inénarrable passage au pub. Pas déméritant ni extraordinaire, un disque qui s’oublie comme il est venu. Bof.

[Victor]

THEE MUCKRACKERS S.E. : Thee Muckrackers S.E. (CD Bankrobber Rds BankCD03 RPR62 ; 11 t. ; 12’ ; 2003)
Bâti sur les ruines encore fumantes de Protex Blue, ce groupe stéphanois ne désorientera pas les fans du susnommé. Une teinte nettement plus ska ou rock-steady (cf. le bel instrumental Red rosa skank) se détache sans doute mais l’ensemble reste rock, avec toujours ce timbre de voix du chanteur qui évoque de manière assez troublante John Foggerty de Creedence. Comme chez Protex Blue, l’ensemble est bien fichu, très carré mais il y manque, lors d’une première écoute, ce je-ne-sais-quoi qui hisserait cet ensemble au rang de groupe majeur (comme les titres un peu ratés 25 years of nothing, Run and ride, par exemple). Ceci dit, cela demeure tout à fait écoutable, des plus agréables à voir sur scène et certains titres se défendent parfaitement : All set up, Every two weeks, Bricklayer ou Saturday night sunday morning. ou encore le très joli Down on the streets qui ne laisse pas d’évoquer la mélancolie aux couleurs jamaïcaines qu’on avait pu, ô extase, retrouver en 2001 dans le chef-d’œuvre des Burning Heads (c’te claque !). Quant aux textes, ils sont tous en anglais (on eût été pourtant curieux de voir ce que s’eût pu donner en français, pas donné que cela posât problème…). Un disque vraiment honnête voire plus que ça.

[Victor]

NOXIOUS NUB : Locked in madness (CDR 3’’ ; Mechanoise Labs MN021; 6 t. ; 23’ ; 2003)
Un artiste, semble-t-il, d’origine italienne et dont le courant artistique préféré paraît être l’industriel, chose peu étonnante quand on connaît le label. La couverture de cette petite galette, classique mais à l’esthétique efficace, représente une camisole de force mais ce n’est pas forcément la folie qui règne sur ce disque , non au sens où l’on s’ennuie mais plutôt en celui-ci que la rigueur froide semble présider aux destinées de la musique ici présente. Le premier morceau est assez banal mais la sauce prend aussitôt à l’écoute du second et surtout du troisième et éponyme, Locked in madness. Un fond techno-indus lourd où se plaque une voix grave, une ambiance de guerre et de peur sourde parfaitement maîtrisée. Pressure vaut également le détour, toujours dans un même registre de fond roulant d’usine et de beats oppressants, le couvert étant remis de manière un peu plus académique sur l’avant-dernière plage (Darkness beyond) Enfin la voix (anglo-saxonne) fait une dernière apparition pour se noyer sur le bref Now !, pièce machinique et légèrement plus calme que ce qui précédait (mais le seul endroit du disque où une atmosphère insane commence à régner). Noxious Nub , de son vrai nom Daniele De Rossi , ne fait pas dans la rigolade mais dans l’accablement industriel dur, aux relents de panique larvée ; ce n’est pas nous qui nous en plaindrons, au contraire on en redemande...

[Victor]

FICTION ROMANCE : Lâcher de punks (CD Le Cri de Ralliement / Limo Life Rds LLR014 ; 14 t. ; 42’ ; 2002)
Très bonne surprise que cet opus de Fiction Romance, alors que la pochette, caricaturale (des punks dessinés en ligne claire lattent un cureton, un flic et un feufa, yo !) pouvait laisser plus que suspicieux sur le contenu. Mais l’habit ne fait pas le moine et dès que le quatuor lâche les chiens, les doutes fondent comme neige dans la poêle à frire. Punk-rock français über alles, dans la lignée Brigitte Bop ou Zabriskie Point (mais avec une voix meilleure). Tout n’est pas excellentissime, n’exagérons pas non plus, certaines chansons sont assez banales (Piège à con) et plusieurs textes maladroits (Tronches haineuses, Fausse piste) mais au moins cinq titres sortent du lot, j’ai nommé Caméras hors-la-loi, Sales cons, L’Ange de la Mort, dont deux, Le Sauveur et Déchet-ne Déchaîne, sont vraiment de très très bonnes compositions. Le Sauveur est à ranger parmi ce qu’a produit de mieux le punk-rock français jusqu’à présent. Alors que je ne suis pas forcément fan de ce genre-là, j’avoue que là, ça s’écoute d’une traite, sans difficulté (ce alors que tout est en français ce qui corse tout de même ‘achement les choses au départ pour réussir le truc). L’illustration du livret, agrémenté de tous les textes, est elle aussi à remarquer (à la différence de l’insert patchwork central, procédé usé jusqu’à la corde). On a donc là, grâce à ce groupe vauclusien, un morceau de choix du punk-rock hexagonal. Carrément bonnard, ce Fiction Romance ! (disponible chez Eric Châtain, 143, Allée des Genêts, 84500 Bollène (04.90.30.04.32)

[Victor]

CRI D’ALERTE : 50 cl ep (EP Bords de Seine CB35 ; 4 t. ; 12’ ; 2004)
Cette formation landaise balance ici sa première prestation vinylique en quatre titres de oi ! bien appuyés. N’ayant pas du tout aimé ce que j’avais ouï des Skadichats, précédent groupe d’un des zicos, j’avais un préjugé négatif que renforçait le titre »50 cl ep« , genre on voit déjà la gueule des morceaux, la super grosse voix, les chœurs et la musique entendue déjà mille fois avec de l’humour à deux balles sur vive la picole, à bas la politique, etc. Si Cri d’alerte et L’homme des tavernes ne sont pas trop loin de ce style-là pour ce qui est des textes, on est musicalement face à un ensemble carré avec de l’énergie punk à revendre et notamment une sobre et bonne utilisation des chœurs, le chanteur n’ayant pas une voix d’ours bourru un lendemain de cuite. C’est donc sans aucun problème que l’on appréciera tout d’abord Cauchemar animé, une chanson délirante sur des vedettes de dessins animés tombés plus bas que terre à cause de la dope, du sexe et de la gnôle (Babar, Goldorak, Candie…) et ensuite Du venin…, à la mélodie bien ficelée et là encore, le mot « Mort ! » en écho derrière, qui parachève un texte sur la toxicomanie sans illusion aucune. Deux titres vraiment prometteurs et dont on attend la suite sur un second EP voire un album.

[Victor]

THE BELLRAYS :The red, the white & the black (CD TelstarRecords TWR0116-2 ; 21 t. ; 43’ ; 2003)
Un son garage-hard rock des années 70 mêlé à une voix soul de le fin des années 60 pour ce groupe californien très en vogue actuellement, tout ça sur un label anglais, on ne pouvait être qu’alléché… Sans doute mais ça ne suffit hélas pas à faire un bon album. Les musiciens ont beau être très au point (cf. le titre Voodoo Train), l’alchimie n’a pas du tout lieu et, si l’on excepte les intermèdes musicaux, qui vont de l’ambient aux percussions traditionnelles , on ne peut être qu’extrêmement déçu par ces vingt-et-titres, pourtant emmenés à fond de train par une chanteuse noire (ou si elle ne l’est pas, elle a en tout cas un larynx assez bluffant) au nom finlandais.

[Victor]

ARRACH : Alternatives (CD Trauma Social / Moumoutt Prod ; 10 t. ; 26’ ; 2004)
Carton cette déflagration sonore en dix coups, cette formation toulousaine issue d’Arrach’Moumoutt a sorti le gros attirail pour un punk-métal de rare qualité. Pas de pause (sinon pendant l’interlude comique ultraréaliste bien troussé où des keufs interviennent sur « un concert de marginaux » et comptent jusqu’à dix « un, deux, six, dix ! » avant de faire usage des flash-balls (Remember the 8)). Pour le reste, ça me rappelle des putains de trucs du genre D.R.I. ou encore cet excellent groupe américain nommé New Rose, le tout mêlé à un chouïa de Tagada Jones mais en bien mieux. Des morceaux comme Nitro (excellent solo au début) ou New Deal arrachent les cellules ciliées comme à la parade, ouargh, quelle baffe ! Et on en redemande ! Première fois également que j’entends une telle débauche d’énergie sur le label de punk-rock français Trauma Social, le label dirigé par Zéric Hartweg, l’homme qui fait peur à Pascal Nègre en personne. Pour ce qui est des textes, bah, on est dans le registre habituel (antifascisme, zapatisme, tolérance, ne pas baisser les bras) avec une chanson en français seulement et le reste en anglais. L’iconographie enfin n’est pas en reste puisqu’elle se réfère à toute la branche macabre de rock ultra-énergique dans la lignée de Motörhead. Rien à jeter au final, ma doué, un bien bon disque que celui-là !

[Victor]

BRAN TERROR : Infernul din vis (CDR autoproduit ; 13 t. ; 56’ ; 2004)
Déjà rencontré à droite à gauche pour des titres assez agressifs et bien glandés, le trio Bran Terror est l’un des groupes les plus connus de la scène électro-goth-80’s revival de Béziers. Tu me diras, ça nous fait une belle jambe mais l’on aurait tort de s’en tenir à cela. Si cet album souffre de points faibles patents (utilisation des voix notamment, tant pour ce qui est du français que du maniérisme parfois kitsch et convenu de la chanteuse ; ainsi Matière…), il n’en demeure pas moins qu’ils se débrouillent sur certaines plages comme des as. Ainsi pour ce qui est de la seconde, USSR terror, on croirait entendre du Depeche Mode du tout début mais en mieux qui plus est. Ce morceau-là est un pur carton ! Du revival comme ça, moi, j’en redemande dans mon bol le matin avant de partir ! Mais c’est aussi paradoxalement ce qui rend un peu difficile la suite de l’écoute à l’exception des quatres morceaux aux trois-quart du disque, soit Strontium 90, Gardia de fer (bizzarement rattachée à Ceaucescu dans le livret ), Cosmar (excellent ! A rapprocher du groupe lorrain Prince Albert) et Another love story (qui vire au brutal). La présentation est assez pauvre (un petit autocollant sur une pochette blanche en carton avec un papier calque explicatif à l’intérieur, où l’on pourra d’ailleurs apprécier l’originalité des thèmes servant de base aux titres, souvent à base de dénonciations politiques ayant trait aux pays d’Europe de l’Est – Russie, Biélorussie, Roumanie), peut-être regrettable pour ce genre de musique, à l’iconographie relativement riche. Sans doute eût-il mieux valu que l’exercice fût concentré sur un EP plutôt qu’un album, réjouissons-nous cependant de ces quelques chansons particulièrement terrifiques et abouties, mentionnées plus haut.

[Victor]

GILBERT ET SES PROBLEMES : Continuer (CD Le Cri de Ralliement ; 12 t. ; 47’ ; 2001)
Album avec une belle pochette pour ce groupe de l’Hérault (des singes qui démolissent un mur de brique pour en redécouvrir un autre), Continuer, malgré une musique punk-rock à la française énergique, n’arrive pas à emporter l’adhésion. Trop peu d’originalité malgré un entrain certain, un son irréprochable et des inserts de film très bien choisis pour les intros (Les Valseuses, etc). Les deux seuls morceaux qui valent le détour sont Intro et Flish or flash (seul titre en anglais, sacré brûlot soit dit en passant). Je n’avais pas trop accroché aux titres sur les compiles Trauma et Skalopards et ce disque hélas ne change pas trop cette opinion.

[Victor]



THE FINGER : Répression (CDR autoproduit ; 6 t. ; 16’ ; 2003)
Sous ce blase assez surprenant de banalité se cache un groupe de Montluçon qui donne dans un punk-rock assez particulier, à savoir (est-ce la prise de son vocale ?) que l’on a l’impression que la comparaison serait plus à chercher dans d’antiques groupes punks français, tel Gazoline ou 84, que dans des formations contemporaines. Cela ne suffit pas néanmoins à faire de bons morceaux, nonobstant une section rythmique bien trempée. Les textes courent sur l’illégitimité représentative en politique, l’exploitation, les mines antipersonnelles et les harkis (assez orignal comme thème eu égard au caractère périlleux du sujet). La quatrième chanson, Créatures étranges, plaît cependant plus avec une couleur à la Molodoï et la cinquième, plus punk rentre-dedans en anglais yaourt (Square), transforme l’essai. Tout cela se clôt par une reprise à la Têtes Raides (pas à se rouler par terre ceux-ci…) de la chanson du Chat Noir, rengaine parisienne qu’on entend souvent au Carnaval de Dunkerque, ce qui ne laisse pas d’étonner quand on connaît les origines bougnates du combot. A prendre et à laisser donc et on attend de voir la suite.

[Victor]

HVAL & MUS, MUS, MUS : Hval & Mus,Mus,Mus (CDR Pneu 4 ; 6 t. ; 49’ ; 2001)
Si la maison de disque avait un nom marrant, le reste le fut déjà moins. Ce duo, qui s’en jette un derrière le colback sur la pochette, nous sert en effet un seul bon titre (Der Jäger) sur les six proposés (une sorte d’électro-ambient qui va crescendo). Pour survoler le disque, on pourra dire que la première plage, malgré une bonne zique électronique minimale, est complètement gâchée par une voix tudesque qu’il aurait mieux fallu laisser au placard... La seconde est une discute inaudible que tapent deux gus à propos d’Arafat (avant qu’il ne sente le sapin). La troisième, c’est la bonne mais on replonge ensuite dans une électro à nouveau défigurée par un gosier à l’Arthur H décati. Que dire alors du cinquième morceau, un interminable monologue soporifique digne de l’Atelier de création radiophonique de France Culture ?... On terminera par une sorte de dark-folk monotone et tristoune. Bref, c’est pas la joie dans les chaumières avec cette galette qui sent le rat mort comme un pot de Bolino moisi… Nous sommes ici très loin du très bon et tout aussi germanique Zut EP sur le même label qu’avait commis l’année précédente Everybody’s Jabitudiliki. Très loin, vraiment très loin.

[Victor]

 

JOSSELIN ROUX : Sirènes (Exploration marine pour l’oreille) (CDR La P’tite Maison ; 3 t. ; 27’ ; 2003)
Deux tendances pour ce disque de Josselin Roux. La première, et qui englobe les deux premières plages, est d’une musique concrète à la limite du reportage radiophonique comme a pu en faire il y a dix-quinze ans Yann Paranthoën, c’est-à-dire des bruits de bords de plages ou de quais de plaisance saisis au magnétophone. C’est bien joli pour faire du fond mais ça n’a pas grand intérêt en soi et c’est tout sauf créatif. La seconde tendance tient elle – troisième morceau - d’une sorte de mélange entre Pascal Comelade et Philippe Glass, le premier pour le côté piano de brocante et le second pour une démarche minimale, hypnotique, infinie et où l’on se laisse facilement porter. Il aurait été sans doute mieux de ne pas mêler ces deux voies empruntées car cela rend l’ensemble bancal. On appréciera par contre la pochette qui représente une sirène en sable vu de près puis de loin, proche de la vieille statuaire romane granitique que le temps effaça.

[Victor]

ARTHUR RUSSELL : The world of Arthur Russell (CD Soul Jazz Records SJRCD083; 11 t. ; 73’ ; 2004)
Arthur Russell est un des membres de la bohême new-yorkaise du début des années 1970 qui regroupaient des gens comme Tom Verlaine, Laurie Anderson, Debbie Harrih, Wayne County ou encore Richard Hell. Ce violoncelliste fréquentait aussi des gens comme le fameux Larry Levan du Paradise Garage et surtout celui qui avait devenir l’un de ses collaborateurs, le DJ Steve D’Acquisto. Sous son nom ou sous divers pseudonymes, il réalisa de nombreux disques, certains barrés dans le free-rock, d’autres dans le disco-funk, poussant le bouchon plus (trop ?) loin par exemple que David Byrne et son groupe. Un jour qu’il descendait dans l’East Village, il avisa une Tucker Torpedo garée en pente et, ni une ni deux, il s’y introduisit puis fonça avec jusqu’au premier disquaire venu afin d’acquérir le dernier tube de Donna Summer, MacArthur Park, et après il fit une pause pendant laquelle il mangea un carré Samos en entier mais ceci est une autre histoire… Il mourut d’une indigestion de carrés Samos en 1992. Donc, pour causer plus musicalement maintenant, on est tout de même globalement déçu par ce disque qui donne dans une sorte de funk-jazz aux lisières électroniques qui plut sans doute en son temps et sur scène mais qui là tourne un peu à vide. La voix, tantôt grave tantôt aigrelette, d’Arthur Russell y est sans doute pour quelque chose. Il y a néanmoins deux pépites dans ce CD, j’ai nommé les deux titres d’une de ses formations, à savoir Loose Joints et qui sont Pop your funk et le carton Is it all over my own face, deux morceaux gouvernés avec maestria dans les flots du funk le plus groovy (et c’est ni plus ni moins que Larry Levan qui mixe le second de ces deux titres, ça se pose là, non ?), Pop your funk étant très particulier avec ses sons étranges d’harmonicas électroniques ou je ne sais quoi tandis que l’autre est un sommet digne d’Herbie Hancock, période Chameleon, par exemple (bon, ok, c’est pas super loin dans le temps non plus, eheh). Soul Jazz Records continue en tout cas son défrichage hallucinant de qualité tant musicale que musicologique et l’on s’en félicite.

[Victor]

ALKALYS: Alkalys (CDR autoproduit ; 4 t. ; 20’ ; 2005)
Originaire de Seine-Maritime, ce quatuor produit un trip-hop ambient de très bonne facture et qui fait tout de suite penser aux instrumentaux d'Appliance. Des influences floydiennes marquées sur des guitares progressives et une battue soutenue (presque trop soulignée par la prise de son sur Labyrinth). Bonne utilisation du fond sonore tibétain également dans l'introduction de Fleur de lys (argh, tribute to De Villiers !) ainsi que des voix anglo-saxonnes sur Alkalys fine, honnêtement cette formation estudiantine assure plus qu'à moitié. Vivement l'album !

[Victor]

 

JEAN BACH : Korgalon HNK Tracks (Netalbum Disques Signal Zéro SZ003; 6 t. ; 21’ ; 2005)
Jean Bach, c'est pas un compositeur tudesque créchant à Leipzig au XVIIIe siècle mais un Teuton trentenaire qui vit à Augsbourg et n'est pourtant pas à la diète pour ce qui est de sortir de l'électronique spéciale. Ce mini-album paraît chez Signal Zéro, netlabel de Montpellier spécialisé dans le hardcore, le breakcore (terme qui ne veut pas dire grand-chose) et l'électronique qu'on qualifiera d'expérimentale ; leur site internet est pointu et assez captivant. Parlons sérieusement maintenant, le contenu laisse de marbre, une sorte d'indus à vagues relents hardcore obtenus par la détérioration de la texture d'un truc qui devait être classiquement rythmé et basique au départ. L'alchimie ne prend pas et on peut se dire, comme Brice de Nice, en écoutant cela : "Si t'es habile, toi aussi, tu peux y arriver !". Seule la plage 5 (Dochdocg) tire son épingle du jeu par son côté gravillonneux, très rapide et virevoltant. Dommage que le reste n'ait pas été de cet acabit.

[Victor]

COLLAPSE : Humans (CD Collapse Music COLLG004 ; 10t. ; 45’ ; 2004)
M'attendant à quelque chose d'impressionnant (même sans aller à du Ministry ou du Nine Inch Nails quand ces derniers sont bons), j'ai été particulièrement déçu par cet album de Collapse, qui, si l'on excepte le correct dernier titre, India, est plus que mou du genou, de l'indus-métal-hardcore dominé par une voix se voulant sombre et omniprésente et pas toujours en phase avec la musique. Ce groupe, techniquement carré, d'un ancien Treponem Pal gagnerait nettement à trouver plus d'originalité.

[Victor]

Der Brotmann : Der Brotmann (NetEPEarsheltering 001; 4 t. ; 17’ ; 2004)
Der Brotmann, contrairement à ce que son pseudonyme pourrait indiquer, n'est pas d'origine allemande mais bel et bien auvergnate. En quatre titres, il envoie de la matière sonore de très belle manière. Tout d'abord des sons vocaux orientaux, de l'ambient piqueté de notes de piano diffuses, une entrée en matière puissante, vigoureuse et agréable (Du haut de la falaise). Le deuxième titre mêle nappes très sourdes et discussions à demi-voix robotisées et le mélange prend (Le rêve du chat). Nous partons ensuite vers des paysages lointains, étendus et crépusculaires, de la pure musique feardropienne et pas du mouron pour les petits oiseaux, vraiment là encore, une belle maîtrise de l'ensemble (le risque dans ce genre de plage étant l'uniformisation et au final l'ennui, où l'on ne tombe aucunement ici). L'homme-pain de mie Duroi conclue son voyage en nous poussant au fin fond de la fosse des Mariannes, là où même la lumière n'apparaît plus et où les monstres bathyaux n'osent descendre et demeurent tapis dans les recoins les plus celés qui soient. Un 4-titres magistral à l'enchaînement parfait.

[Victor]

 

Electronic Press Kit : Curl EP (NetEP Abyssa Netlabel Y002; 4 t. ; 18’ ; 2005)
Version électronique du groupe de musique froide Electric Press Kit, Electronic Press Kit nous offre de la musique mais pas forcément celle que l'on entend à la radio comme on aurait pu ne pas s'y attendre de toute façon. On trouve un art subtil de l'évolution dans les quatre morceaux présents. Le deuxième titre démarre ainsi dans ses sonorités familières très proches de Mr. Oizo et finit dans des notes de guitare électro-acoustique égrenées lancinamment. Son remix (Basal, minimalsilkmix) reprend les sons de colombiers, que l'on entendait au milieu de l'original, sur une rythmique conventionnelle et d'inquiétantes nappes à connotation industrielle ou éthérée. Très plaisant, tout ça, ainsi que le premier morceau, Blow, petit amoncellement de bruits stridents qui s'écoule au bout d'un moment dans des sons acides évoluant sur un martellement de dark-électro, tout cela en un crescendo impeccable. Pour finir, Burn out (Faites suer le burnou !, clamait Brigitte Fontaine dans les années 60), en rajoute une couche façon industriel expé avec beaucoup de réverbe et de bruits d'ateliers.
Un sans-faute qui nous contente grandement (à part la couve un peu quelconque) et en plus, tout ceci est gratuitement téléchargeable sur le prolifique et récent netlabel Abyssa, la classe, non ?

[Victor]

Remain Silent : Dislocation (CD Axesscode AXC04 1 ; 12 t. ; 76’ ; 2005)
Remain Silent, c'est un nom que l'on a pu repérer en bien depuis un moment via un album et des apparitions compilatoires. Pas facile de classer cette musique électronique à l'orée de la violence et de la vitesse. Cela sort de plus sur un label prometteur, Axesscode, émanation du site homonyme dont l'hétérogénéité est la première et grande richesse. La première chose qui marque, c'est le côté hétéroclite des morceaux, dans leur structure. C'est rare qu'un titre soit monobloc sur ce CD. Et pourtant, un fil conducteur imperceptible nous emporte comme pour un voyage, car ce disque se vit avant tout comme cela : la visite d'un pays post-apocalyptique et futuriste, pas toujours joyeux mais rarement totalement sombre. Au final, Yann Souëtre, pourtant amateur d'un humour digne de l'Almanach Vermot ou de Télé Z, se fend là, quand même, de ce qui pourrait entrer dans les meilleurs albums de 2005, toute musique confondue. Je demeure impressionné. Ce d'autant que ça prend de l'ampleur à chaque écoute !... Comme quoi, on se moque de Télé Z mais des fois, ça inspire... Petit tour du propriétaire : on démarre par une intro sous forme de bidouillage plutôt bien trempé de réglages radiophoniques puis on passe (Part 2) à des rythmes convenus et souvent entendus mais qui se transforment radicalement par une débauche d'énergie ce qui en fait un très bon morceau. Part 3 nous emmène vers des sous-sols humides à l'atmosphère inquiétante hantée de vagues chants, là encore par l'entremise d'une technique impeccable. Les choses deviennent lourdes, martiales (Part 4), industrielles, les effets de scie nombreux, comme si nous errions au sein de l'antre géant d'un ferrailleur. Remain décide alors de mettre la sauce en appuyant sur le tube, de la techno-indus bien speedé du bas de caisse où les changements de timbres et de rythmiques se multiplient sur un fond darkpop (Part 5). Après un petit craquement (involontaire ?) dans le passage de plages, on repart dans de l'industriel de fonderie pur et dur avec une tension sous-jacente qui explose sur la plage suivante où l'on navigue en permanence (Part 7) aux limites du crossover le plus noir avec esquisse de vocoder et tout le bousin ! Hum, très très bon... Le musicien préfère alors calmer les esprits bouillonnants en repassant sur de l'ambient progressif où se multiplient les flangers (les effets de scie encore une fois, parfaitement utilisés) et où la battue se fait plus ludique et brisée (Part 8). Cette pause ayant permis de recharger les accus, Yann Souëtre rembraye et accélère au moyen d'un indus clair et heurté à la violence larvée (Part 9). Sans prévenir, l'on atterrit soudain dans un no man's land inquiétant de nappes froides d'où on est extrait par la grâce d'un pianotement faisant penser au planant fridolin des années soixante-dix. L'intermède est bref puisque nous replongeons illico (Part 11) dans le chaudron de l'aciérie silentine tournant à plein régime. La surchauffe est proche mais Remain décide alors de refroidir son monde via une mélodie de piano synthétique, heureuse souvent mais parfois presque kitsch (une allusion à Drugs d'Aphex Twin ?). Ça passe sans problème ceci dit et le voyage de plus d'une heure s'en vient à s'achever, non comme il a commencé mais dans un esprit plutôt proche, à savoir une fragmentation stylistique extrêmement poussée et très facilement écoutable néanmoins (Part 12). Cela reste d'ailleurs la grande force de ce disque que la maestria avec laquelle les mélanges rythmiques et les orientations sonores des plus variées sont produites. Ce disque est à ranger au côté de ceux des grands noms de l'électronique des années 2000. Clairement. Encore n'ai-je pas parlé de l'aspect visuel dû et à Remain Silent (la grande classe ce Remain décidément !) et à l'artiste méridional Galeett Kompleet et qui est particulièrement splendide, en pleine adéquation avec l'oeuvre proposée. Un univers biomachinique qui devrait nous être épouvantable et qui pourtant nous ressemble tant.

[Victor]

Muckrackers / Dead For A Minute : La destruction est aussi création (pT.1) (Objet sonore Les Forces Alliées Records ; 2 t. ; 1’ ; 2005)
Dans le genre support insolite, voici la disquette fluo verte pour un split deux titres entre les rois de la mandoline napolitaine, j'ai nommé les Muckrackers et ceux du théorbe padouan, Dead For A Minute. D'un côté, de la brutalité lourde de basses dévorantes et qui crient que "ça fait mal, ça fait mal" (les doigts dans les volets, tout ça...). De l'autre, une grinderie express envoyée en missile pour vous faire sauter le caisson et qui est antérieure de trois bonnes années. C'est pas long mais ça fait du bien.

[Victor]


Fiction Romance : Mission insoumission (CD Le Keupon Voyageur / Karamékos / Trauma Social / Le Cri de Ralliement LCDR01 ; 2004 ; 13 t. ; )
J'avais particulièrement accroché sur le précédent album, Lâcher de punks, mais, malgré une intro (Hein trop !!) particulièrement enlevée, on a ici affaire à une suite de morceaux de punk-rock français classiques sans grand relief quoiqu'impeccablement exécutés et même si Satanic fric s'impose comme un vrai bon titre. Les paroles traitent des sujets habituels (Sarko et la xénophobie, les politicards, l'inégalité, McDo, le culte de l'apparence, l'argent, la corrida, la solidarité) et sont globalement plutôt bien ciselées ainsi que le livret qui, passé l'inévitable patchwork central et la couverture cliché marrante (un classique chez Fiction Romance), dénote une gueule certaine. Pas trop de surprise à la sortie quoi qu'il en soit.

[Victor]

Elektroplasma : Mechaniballs (CD YB70 Rds 009; 2005 ; 7 titres ; 50 minutes)
Elektroplasma, formation unimembre électro-industrielle qu'on a assurément pu remarquer à droite à gauche depuis dix ans (remix de Mimetic, collaboration avec Celluloid Mata, titres sur Uncivilized World) se retrouve sur YB70, le label qui succède à Ytterbium (où elle avait déjà commis un neuf titres, Ambient cinema, en 1999) et qui s'occupe aussi des soirées électroniques françaises Parazit (Vromb, Zotz, Iszoloscope, Elektroplasma justement, etc). Vu le profil de l'intéressé, on est prévenu, ça ne risque pas d'être Martine à la plage pour l'ambiance... Et en effet, ça commence sur les chapeaux de roues (Time machine) par un rythme qui, trente secondes durant, me ferait presque penser à feus les Roadrunners des années 80 mais le masque tombe et je dois bien me rendre compte qu'on a là bel et bien affaire à des machines et que l'industriel sera impitoyablement notre pain auditif, ainsi que l'on pouvait non sans délice le craindre. Ça martèle, ça tape, on percute et l'on scie, la cadence vous emporte, pas le temps de respirer, c'est les trois-huit à Sambre-et-Meuse et le corps s'en ressent déjà. Passé une très légère accalmie, la progression chaotique reprend (Cyclone synthesis), plus lourde telle une gigantesque essoreuse avec des impressions machiniques et liquides parfaitement rendues (on se croirait dans un tambour en inox géant). Alors que l'on s'imagine un moment s'être extirpé de cet étouffant univers, le long et presque filmique Black organs insidieusement nous conduit, au moyen d'un fond de percussions automatiques de plus en plus perceptible, vers un inexorable retour à la chaîne, la chaîne, toujours la chaîne, inflexible et assommante, elle ne nous laissera rien, même pas les os, elle nous prendra tout jusqu'à la dernière goutte de sang. Et si Blood flow redémarre comme ses prédécesseurs faussement lentement, il acquiert une vitesse nettte et oppressante, inarrêtable extérieurement, avec ses timbres râclés, soufflés et distordus (de la belle ouvrage à la vérité). Puis, nimbé des lointains tintinnabulements de cloches rugueusement décapées à l'effet-scie, Songs of the saws aurait très bien pu se nommer "Dance" car on a là le morceau le plus aisé d'écoute de cet album, plage brute et primitive, remarquable d'ailleurs par sa concision et sa fabrication, et, n'était sa faible longueur (6 minutes quand même...), la transe corporelle se fût à coup sûr exprimée ! Mais dur est le retour au réel, encore plus usineux, encore plus aliénant, aucun repos pour les oreilles, de laminantes boucles industrielles qui font vibrer l'enveloppe crânienne et c'est comme ça tous les jours, Daily Hell le bien nommé... Les outils de travail couinent comme des bêtes qui pleureraient devant les murs de carrelage d'une triste animalerie et l'enfer redémarre, tentant d'achever ce qu'il nous reste d'activité cérébrale (Broken neurons), non sans rappeler cette fois les atmosphères glaçantes et folles d'un Mourmansk150. On est vraiment proche, pour donner idée, des froides productions Mechanoise Labs, pas étonnant que des gens comme Zotz ou Ripit soient sur ce même label, YB70, tous ça sont gens de connaissance de toute façon, mais de goût avant tout, faut-il le préciser ! Alors que son étroit champ de manoeuvre a déjà été bien labouré depuis plus de dix ans, Elektroplasma, privilégiant la sobriété et l'enracinement dans un indus élecrtronique pur et dur, parvient, sans jamais succomber à une facilité noise apocalyptique que l'on croise souvent, à pondre une oeuvre originale, fine, brutale, jamais ennuyeuse, à l'unité indéniable et d'une maîtrise totale.

[Victor]

Mad Mongols : Revenge of the mongoloïds (CD Pure & Proud Records ; 2004 ; 9 t. ; 22')
C'est censé être un disque de psycho nippon ; heureusement que la contrebasse se fait entendre à partir du sixième morceau et que la tonalité change car on me l'aurait dit, je ne l'aurais pas cru. Apparemment, ce groupe formé en 1991 connaît un certain succès dans l'archipel depuis ses débuts et pour son style particulier de musique, trop délayé à mon goût. Malgré les titres en anglais, c'est chanté en japonais ce qui n'est pas plus mal. Par contre, les premières titres sont noyés par une guitare limite hard-rock et les vagissements du chanteur font plus beuhmeuh qu'émanant de dessous un plateau... Le maquillage sur la couve ne change rien à l'affaire et, malgré deux-trois effets de panoramique, un manque d'écho dans la prod ajoute à cet aspect brouillon de la chose. Pas déméritant mais très oubliable dans l'ensemble.

[Victor]

Oxygenfad : Dimension X vol. 6 (net-EP Dtrash RecordsDT73 ; 2005 ; 7 t. ; 17 min. )
William McCloud alias Oxygenfad 4 est originaire du Nouveau Brunswick (la province canadienne) et s'est fait un petit nom là-bas sur la scène IDM (terme flou qui ne veut pas toujours dire grand chose et sert souvent à ranger l'inclassable). Plutôt farfelu et talentueux, il a commis plusieurs disques sur le label de Toronto DTrash (qui a abrité aussi Babylon Disco, Ambassador21 ou encore Punish Yourself), et voici le sixième de neuf EP qui formeront un tout, la Dimension X. Une intro sur des sons de C64 (Public Opinion) que doublent assez rapidement des guitares de hard, non sans du coup laisser un léger doute sur de quoi sera fait le lendemain mais on plonge directos dans le bouillon du breakcore chaud et sonore qui ravage tout sur son passage, sans demande ni formalité, plus besoin de présentation... Breakcore, bugcore, déstructuration à fond les ballons comment qualifier autrement cette musique qui frôle parfois le noise (I can't believe anyone listen to my music, détrompe-toi, mec, ça en fait un avec moi en tout cas, yeah !) ou les jeux vidéos avec de très bons basculements panoramiques (Bola Yueng is pretty cool) tout en se gardant de temps à autre des temps de repos mérités via de l'ambient breaké qui sent bon son verre de cocktail au couchant lorgnant les bords de Gaspésie (Guys that work at music stores are complet assholes [à noter qu'Oxygenfad est un disciple littéraire de Ronsard et de Du Bellay]). Beau petit opus que celui-ci, facile d'écoute et varié dans ses sources sonores (cf. par exemple, I gotta piss but someone is in the bathroom), très recommandable à la vérité (et gratuitement téléchargeable sur la toile qui plus est, autant ne pas se priver !)

[Victor]

Leptik Ficus : Sale ambiance (CD Skalopards Anonymes; 2004 ; 14t.; 32')
Un groupe montpelliérain (avec un membre commun avec Mum Is Trunk) qui ne détone pas trop chez les Skalopards (on retrouve bien ce son du sud dont ils sont friands). Ça donne du rock énergique allant du punk-rock mélodique au punk-core en passant par des plans limite fusion mais dans l'ensemble, on a du mal à accrocher, entre autres à cause du chant (même si chanter en français n'est pas forcément facile). Deux morceaux tirent cependant leur épingle du jeu : Patrick Dills (sur le fait divers lorrain, bonne patate qui dépote plus qu'un peu) et Marketing Manson (pas besoin d'expliquer le jeu de mot), aux enchaînements plutôt originaux.

[Victor]

Elegy : Leave's eyes (CD Napalm Records; 25' ; 6 t.)
Que dire ? C'est assez insupportable ; un chant féminin de rock FM à la limite de la variété, des guitares de hard années 80. A part une plage (Solemn Sea), c'est dur de savoir que ce groupe germanique vient de la scène métal, bref, dans l'ensemble c'est très niais mais ça doit pouvoir plaire aux foules si on le matraque bien dans le poste. Bigre...

[Victor]

Escape : Artificiel (démo CDR ; 2001 ; 20' ; 8 t. )

Du punk-rock classique, un tantinet mélodique, avec une voix masculine bien trop en déphasage par rapport au reste du groupe (un problème de mixage évident). Rien de déméritant - le groupe joue instrumentalement très bien, notamment sur Détraqué - mais rien de bien extraordinaire non plus. A noter une chanson en espagnol.

[Victor]

Neurotic Swingers : French fries, guillotine & love (CD Dead Beat Records DB53 ; 13 t. ; 2004)

De ce groupe garage-punk mélodique, je ne connaissais pas le précédent album mais le huit titres What's your definition of underground ? qui datait de 2002. Je n'ai carrément pas accroché sur ce disque rétrospective (qui reprend d'ailleurs plusieurs titres du 8 titres) bien qu'il y ait quelques titres qui dépotent dessus comme Burn the floor, Please hate me ou La reine du vide, dans une veine punk-rock américaine couillue, mais il y a bien souvent une teinte précisément mélodique qui vient enlever toute l'énergie que semble pouvoir dégager ce groupe français qui chante en anglais (ex : Dead language, I'm just losing my soul, Straight). C'est bien fichu, impeccable techniquement mais on a du mal à ressentir quelque chose (histoire de goûts probablement).

[Victor]


 

** Chroniques BD **

 

Germain Boudier : Le serin est un pigeon comme un autre (éd. La Boîte A Bulles ; coll. « Faits divers », 2005)
Trempée dans des coloris ternes, cette BD narre l'enquête d'un détective, Serin, qui n'a pas toujours les pieds sur terre. Un maître-chanteur tente de soustraire de l'argent à la fille de J-P Marielle laquelle bosse avec la soeur dudit Serin. Du coup, ce dernier mène l'enquête et intervient dans sa R16 vert olive. Se passant en 2005 mais multipliant les clins d'oeil aux classiques de Joël Séria ainsi qu'à Série Noire d'Alain Corneau, Le serin est un pigeon comme un autre est une oeuvre originale mais dont on regrette le dénouement bâclé (la fatalité des 48 pages à la française !), les couleurs ternes (une vraie mode de la bande dessinée hexagonale actuelle) et l'utilisation très marquée d'un trait épais allié à une volonté d'expressivité recherchée dans l'économie des linéaments des personnages. Sans doute cette BD eût-elle gagnée au final à être en noir et blanc...

[Phil Aufze]

 

Alex Nikolavitch (scénario) et Marc Botta (dessin) : La dernière cigarette (2004 ; éd. Vertige Graphic » et éd. de la Cafetière)
Cette nouvelle narre le parcours du commissaire politique de l'Armée Rouge Tchéktaviov. Echangeant une cigarette avec un officier de la Wehrmacht en 1943 pendant les bombardements, il assiste deux ans plus tard à l'exécution de ce dernier. Basée sur l'aliénation des hommes en temps de guerre, La dernière cigarette mélange plusieurs styles graphiques (esquisse, crayonné, aquarelle, lavis, peinture, couleurs sépias et noir & blanc – pour les scènes dont l'officier soviétique se rappelle. Même si l'on est pris par la narration pendant les deux tiers du texte, force est de constater que la fin est des plus banales et c'est bien dommage car il y avait là matière à oeuvre puissante.

[Phil Aufze]

 

Louis Joos et Frédéric Debomy : Une vie silencieuse (Albin Michel, 2005). Cette BD est une vraie catastrophe, avec un dessin en noir et blanc peu agréable et inexpressif, au service de cinq nouvelles au scénario indigent, aucune poésie ni pensée quelconque ne s'en dégage alors que c'en est visiblement le but premier. On reste donc sur sa faim autant que faire se peut.

[Phil Aufze]

 

 

 

 

 

 

 

 



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