Imodium est une feuille d’information écrite par le gars Olivier, issu de la ville de Nantes ; mais qui a déménagé à Rennes. C’est pour cela que j’ai voulu l’interviewver. Ces deux villes ne se ressemblent pas malgré le proverbe bien connu « qui se ressemble s’assemble ». Nantes, c’est l’océan, la vue sur le large et l’Erika ; Rennes, c’est la Vilaine, la vue sur le métro en construction et la sale gueule d’Edmond Hervé. Nantes, c’est une équipe de foot qui risque de finir peut-être première au championnat de France de football malgré que Coco Suaudeau ne l’entraîne plus depuis un bail maintenant. Rennes, c’est l’équipe de Pineau qui aboule le jonc pour faire courir les Brésiliens route de Lorient et dont le résultat n’est pas aussi fameux qu’on pourrait le croire. Rennes / Nantes, deux villes, une route qui les relie et les reliait déjà aux temps anciens où l’une était la capitale des Redones et l’autres celle des Namnetes. Olivier le Namnète, comment fait-il pour vivre chez les Redones de Condate ? J’aurais pu lui poser cette question parmi d’autres mais je me suis abstenu. Ne pas provoquer de polémiques entre les différentes tribus par ethno-égalisme, on s’en tiendra à cette position nettement influencée par le TPI de La Haye. Et puis je ne savais pas s’il était susceptible… Des fois, des gens se curent le nez, tu leur fais la remarque, ils prennent ça mal, font la moue et deviennent rouges . C’est cela la susceptibilité. Et cette tare, si c’en est une, est partagée par beaucoup plus de gens qu’on pourrait le penser d’un prime abord. Un sondage BVA pour le journal La Croix révélait récemment que 50,42% des Français sont susceptibles à la fin de la journée. C’est pourquoi j’ai préféré procéder à cet entretien un matin de très bonne heure (il était sept heures trente du matin quand a ouvert le café Le Nemrod de Châteaubriant où nous avons discourus ainsi que suit – Châteaubriant, à mi-chemin entre Rennes et Nantes, ce n’est pas un hasard…). Olivier a dit « B’jour patronne, fait frisquet à matin ! », s’est assis sur une chaise en bois, a posé ses coudes sur la table en formica, a attrapé un croissant chaud, se l’est enfourné dans le clapet d’un coup d’un seul, a toussé à s’en faire péter les orbites, s’est calmé en se tapant sur le coffiot, a sorti le tire-jus à carreaux, s’est vidangé bruyamment, a malaxé ses petits doigts boudineux, a commandé un café, une fine-champagne pour accompagner puis deux et à la treizième on a pu commencer. Ce n’est pas tous les jours qu’on rencontre un grand maître récent de la feuille d’info occidentale. Jugez de mon émotion. Je me suis immédiatement senti attiré par la sagesse de ses propos comme les mouches par le papier-ruban au-dessus de nos têtes. Au bout d’une bonne heure de discussion et alors que nous étions comme un seul homme passés au calva, boisson des philosophes normands par excellence , j’ai regardé mon magnétophone Thomson et j’ai constaté que la touche « enreg. » n’avait pas été enclenchée. Mystère des instants, mystère du présent, je ne saurais dire pourquoi exactement. Tout ce que je sais, c’est qu’irrésistiblement, comme saisi par une force étrangère et brutale, j’ai appuyé soudainement sur ladite touche, malgré les miettes de croissant demeurées collées sur mon doigt graisseux. C’est bien après, plus tard, le lendemain, après deux dolipranes et un aspro 500 effervescent, que j’ai compris que, par ce geste pourtant anodin de l’index, le destin m’avait souri. En écoutant en effet à tout hasard la bande de la cassette utilisée la veille, je me rendis compte qu’une bonne part de notre échange, échange peut-être crucial pour le cours de la pensée castelbriantaise voire européenne et peut-être même mondiale, allait pouvoir être révélée. La joie s’est emparé de moi et j’ai couru à l’établissement le plus proche faire un quinté +. « Quand la chance se présente à toi, sache t’en saisir et la lâche surtout plus, fais pas le con avec », a écrit en frontispice de son dernier ouvrage Jacques Derrida. C’est ce que j’ai fait et pourtant j’ai eu que dalle de gains. Etonnant, n’est-il pas ? Mais revenons à la source première de ma joie du lendemain : l’entretien du café Le Nemrod. Ce qui suit est la retranscription, mot pour mot et souffle pour souffle (à 50° minimum), des propos tenus un matin de l’hiver 2000-2001 par le philosophe namnète Olivier Imodium. Alors, chaussez bésicles et conserves, compulsez si vous le voulez auparavant la Critique du raisin pur et le Discours de la reine-claude et lisez ce qui suit. Vous ne serez sans doute plus le même en sortant .
HAMS ! : Te souviens-tu de François
Mitterrand ?
Imodium : Ah oui, le super pote de Papon
!
HAMS ! : Bon,
ok, arrêtons de parler politique, ça m’énerve….
Je me méfie, je sens que ça peut dégénérer…
Pourquoi avoir choisi « Imodium » comme patronyme et non
pas « Ercéfuryl » ou encore « Huile de
Ricin » ? N’est-ce pas un choix étrange ?
Imodium : Eh bien c’est très
simple, car Imodium contient du chlordhydrate de lopéramide, du lactose
monohydraté, de l’amidon de maïs, du talc, du stéarate
de magnésium, de la gélatine, du dioxyde de titane et bien sûr
de l’érythrosine, de l’oxyde de fer jaune, du bleu patenté
sans oublier l’oxyde de fer noir . De plus ce médicament est indiqué
dans le traitement symptomatique des diarrhées aiguës et chroniques
de l’adulte et de l’enfant de plus de huit ans ! Si vous n’êtes
pas encore convaincu, sachez que deux gélules d’Imodium suffisent
après chaque selle non moulée et qu’il s’administre
par voie orale avec un grand verre d’eau qui permet d’éviter
la déshydratation. Voilà, ça fera 110F.
HAMS ! : Bon,
changeons de sujet. Chantes-tu chaque matin après la diane l’hymne
des Sous-Kaution, Aérophagie ?
Ton autoradio est-il bloqué sur l’intégrale de 7
Minutes of Chiasse ?
Imodium : Non, non. Pas du tout. Je ne
connais pas les chansons des groupes que tu cites. En fait, je ne focalise pas
trop là-dessus. Même si à une époque mes dérèglements
instestinaux étaient un peu trop réguliers , le choix du titre
s’est fait dans un esprit que je trouve proche des zines de BD de l’époque
alternative 80-90 (Sortez la chienne, Chacal puant…).
Ces fanzines et bien d’autres n’hésitaient pas à montrer
des trucs bien graveleux, bien crades sur le sexe, la mort, la merde…
Ce n’était ni grossier, ni lourd (comme le Psikopat)
mais plutôt provoque et il fallait le prendre au quinzième degré.
Des grands talents ont fait ou participé à ces zines : Stéphane
Blanquet, Henriette Valium… Leur talent va bien au-delà
de ces apparences « légères ». Je pense que
dans le fanzinat aujourd’hui, il est difficile de faire ce genre de choses
car tu passes pour un attardé mental. Il faut dire qu’au niveau
provoque, on est tellement sollicité, plus rien ne choque. Alors les
sujets graveleux sont ramenés au premier degré.
HAMS ! : Arrêtons
de parler de ça, ça m’énerve. Dans un article de
Chalie-Hebdo d’il y a à peu
près un an, il était démontré que l’acte de
« cagar » procurait une alacrité débordante
et pas seulement de la cuvette . A quoi attribues-tu la mauvaise presse de la
selle ? Serais-tu prêt à reprendre le flambeau punais du «
Fèces power », déjà célébré
au temps du Père Ubu ?
Imodium : Pour information, des scientifiques
ont découvert que les hormones misent en jeu lorsque l’on chie
sont en partie les mêmes que celles produites lors de l’acte sexuel.
Le plaisir fourni par ces deux activités est en quelque sorte de la même
origine. Voilà tout ce que je peux dire sur ces avancées de la
science mais les recherches continuent. N’hésitez pas à
contacte votre promptologue pour plus d’infos.
HAMS ! : Ta lettre
d’infos est vraiment bourrée de dates, bien plus que la plupart.
Est-ce un travail intense que de les dénicher ? Par quel biais les chopes-tu
majoritairement (concerts, prospectus, Ouest-France, internet, téléphone
reubeu, bouche à bouche à oreille, etc) ? Que penses-tu des feuilles
d’infos aujourd’hui ?
Imodium : S’il y a beaucoup de dates
de concerts, c’est que les styles musicaux sont très variés.
Je ne fais pas de sélection à ce niveau-là même si
ce qui m’intéresse le plus, ce sont les concerts punks ! J’ai
envie que les gens prennent cette feuille d’info pour être au courant
des concerts et ensuite s’attardent sur les articles qui parlent du milieu
dit « alternatif ». C’est un moyen de faire connaître
à certaines personnes des musiques, des sujets qui ne les touchent pas
directement mais qui peuvent les intéresser. Cette feuille ne s’adresse
pas qu’aux « convaincus » du milieu underground et autres
punks . Mais ce décloisonnement n’est pas forcément évident
car Imodium comme beaucoup de feuilles
d’infos se diffuse très mal (de 100 à 300 exemplaires par
n°) à cause du prix des photocopies et des timbres. Existe-t-il un
public pour les feuilles d’infos ? Je pense. Mais il est très difficile
de l’atteindre. De plus il faut se poser la question de l’intérêt
de ce que l’on fait : est-ce que je me fais uniquement plaisir ou est-ce
que j’essaie d’apporter quelque chose aux autres ? Il faut des deux
pour que ça marche. Pour avoir un minimum d’impact, il faudrait
éditer plusieurs milliers d’exemplaires (comme l’Arsenal
édité par la FANZINOTHEQUE DE POITIERS).
Mais les feuilles d’infos sont aussi intéressantes au sein d’un
réseau. L’impact est limité mais ça permet de créer
des liens, de donner une cohésion à une scène musicale,
une région… Ces newsletters sont très nombreuses aujourd’hui
dans le milieu punk. Tant mieux… sauf si c’est au détriment
de la réalisation de fanzines. C’est plutôt dans l’air
du temps. Un besoin de communication ? Internet aide aussi pas mal à
ces échanges. Comme bonnes feuilles d’info, on peut citer
Dynamite, L’Echo dé Foufleurs, Askabiol + (RIP),
G.U.B.A.D, Que vive le rock libre !, Les Caves se
rebiffent… Pour revenir à la question des dates de
concert, ce n’est pas dur de les choper quand on va dans les concerts,
chez les disquaires… Je prends tout ce qui me passe sous la main. Le plus
dur, c’est de les répertorier, de les classer…
HAMS ! : Tu parles
pas mal de BD dans ta feuille [compte-rendu annuel d’Angoulême entre
autres]. Quels sont tes goûts en la matière ? Comment vois-tu la
scène française et son évolution ?
Imodium : Je parle peu de BD dans Imodium
(à part Angoulême) mais je pense que ça va changer. Je m’intéresse
beaucoup à tout ce qui se fait en dehors des grandes maisons d’éditions.
Deux fanzines / magazines sont indispensables pour découvrir de jeunes
auteurs : Jade et Ferraille.
Il y a deux tendances majeures : les auteurs autobiographiques (Matt
Konture, David B., Julie Doucet…), pas mal diffusés par
L’ASSOCIATION. Et les auteurs de comix humoristiques
(Guerse et Pichelin, Winshluss,
Besseron…)
diffusés par les REQUINS MARTEAUX, SIX PIEDS SOUS
TERRE… Il se passe plein de choses intéressantes dans de
nombreuses villes avec des gens très actifs (comme la scène punk),
notamment à Rennes avec la CHOSE (Fritz,
Brunö…), le niveau de cette « sous-culture » est
très très bon et commence à détrôner les «
stars ». DARGAUD lance une édition
« Découverte », L’Association est de plus
en plus reconnue, Libération fait
appel à des illustrateurs comme Stéphane Blanquet, Thomas
Ott. Une vraie reconnaissance de ceux qui ont préféré
s’auto-éditer, galérer plutôt que de se plier aux
contraintes de majors immobilistes. L’auteur qui me plaît le plus
en ce moment, c’est Winshluss. Il dessine dans Ferraille, est
présent dans presque tous les fanzines (quelle création !). Il
a dû être pas mal influencé par les comix américains.
Au niveau du style ,c’est un peu crade, malsain avec des dessins hyper
efficaces, des plans qui rendent l’histoire dynamique. Il a aussi fait
la magnifique pochette du EP de Jean x Seberg où
un jeune VRP, dynamique, la tête haute, traverse un champ de cadavres
avec sa malette à la main et son regard conquérant. Sinon à
Angoulême, j’ai découvert la BD du Québec que je ne
connaissais qu’au travers de Julie Doucet et Henriette Valium. Apparemment
là-bas aussi il y a une foison de bons auteurs tous plus déjantés
les uns que les autres. L’esprit est plus proche de ce qui se faisait
dans les années 80 en France. Il y a aussi de très bons auteurs,
à l’Est de l’Europe. Le fanzine Striburger
de Slovénie présente de très bons dessinateurs. Pour avoir
une vision de ce que font les graphistes, dessinateurs étrangers, il
faut admirer les productions du DERNIER CRI à
Marseille qui édite de nombreux ouvrages (sérigraphie maison)
individuels ou collectifs dont les magnifique Hôpital
Brut. Les relations entre artistes de nombreux pays se développent
donc grâce à ce genre d’initiative .
HAMS ! : Que
penses-tu de : Will Eisner, Britney Spears, Dimmu Borgir,
Oi Polloi, Rock&Folk, Philippe Glass, Roger Gicquel ?
Imodium : Ils sont tous supergentils,
supercools, moi, j’adore.
HAMS ! : Dans
ton n°6, tu as donné un aperçu de la scène oi ! suédoise.
T’intéresses-tu particulièrement aux pays nordiques ?
Imodium : Pas spécialement. Mais
ils ont vraiment des super groupes et des gros labels pour les diffuser. La
scène là-bas suit vraiment ce qui se fait aux U. S. A. La culture
en est très imprégnée : les séries américaines
ne sont même pas sous-titrées en suédois à la télé
! En dehors de la scène oi !, il y a un super groupe punkrock qui s’appelle
The Jinx. Achetez l’album Chartbuster,
c’est une bombe ! Du pur punkrock proche des Exploited
du début. On dirait qu’ils ont digéré les influences
oi !, punk’n’roll et hardcore mélodique de ce pays. Une merveille
!
HAMS ! : Au début
du même article, ton dessin en exergue représentait un skinhead
avec en légende « proud to be ridiculous » : penses-tu
que le côté costumé et balisé (textes et façon
d’être) de cette scène la rende kitche ou que pour un tantinet
l’apprécier, il faut passer ces codes outre ?
Imodium : C’est vrai qu’il y a un côté kitch dans la
oi ! Se revendiquer d’un esprit de 1969… Il s’en est passé
des choses depuis. J’aime beaucoup cette musique (plus la oi ! core que
la vieille oi ! mélodique) mais j’ai toujours du mal avec les skinheads.
Trop de fierté et d’assurance de détenir la vérité
pour moi ! Ne parlons pas des apolitiques, des nationalistes et des nazis…
HAMS ! : Le split
des Mass Murderers
t’a-t-il tiré une larme ?
Imodium : Pas trop. On s’en doutait
un peu. Ils ne sortaient plus de nouveaux titres, les derniers morceaux (dans
Breizh Disorder, A tour story, split-album avec les Tagada)
ne m’avaient pas convaincu . Enfin, surprise qu’ils arrêtent
juste avant la tournée de promotion du disque avec Tagada Jones.
HAMS ! : Le punk
(ou le punk et le hardcore plus généralement) est une musique
par essence anti-système . Que penses-tu des récentes évolutions
de celle-ci ? Notamment Rock-Sound "Punk Rawk"?
Imodium : Je crois que c’est un
vaste débat qui dépasse le punk-hardcore : qu’est-ce qu’être
indépendant ? Quelles luttes contre la consommation, les distributeurs,
le capitalisme… ? Je trouve que le milieu indépendant se professionnalise,
VERSUS PROD. sort une compile (Against your
system) qui est distribuée par M10
(anciennement MUSIDISC). Ceci leur permet une distribution
nationale. Est-ce que c’est ça, être contre le système
? Cela en fait rager plus d’un. Mais l’argument de VERSUS est de
revendiquer que les musiques alternatives doivent être présentes
partout et occuper le terrain face aux productions commerciales pour proposer
un choix à l’amateur de musique (consommateur ?). Aujourd’hui
le Do it Yourself est très développé. Un groupe peut produire
son disque lui-même, trouver des dates de concert… La seule chose
qui coince, c’est la distribution. Il n’existe plus de maison de
distribution indépendante (idem pour les livres et magazines ). La seule
possibilité reste la vente par correspondance. PANX
ou STONEHENGE se bougent énormément
le cul et arrivent à distribuer des productions à 1000 ex. Au-dessus,
ça devient problématique. Mais je ne suis pas sûr que la
solution pour se faire diffuser soit de prendre un distributeur ou de faire
un article dans Rock Sound. Le risque est de voir son disque devenir
un vulgaire article de consommation qui a perdu son sens. Un distributeur exige
une pochette attirante, une stratégie de promotion (publicités…)
assez éloigné de l’idée que je me fais du punk. Il
est possible d’être pro sans se compromettre mais c’est beaucoup
de boulot et de sacrifices (avoir plus de cent interlocuteurs au lieu d’un
seul distributeur, développer un réseau, des échanges avec
l’étranger…). Pour en revenir à Rock
Sound-Punk Rawk , c’est très intéressant pour
la scène punk d’avoir un écho dans la presse. Mais autant
cela permet d’élargir la scène, de faire connaître
des zines, des groupes, autant c’est un alibi pour EPITAPH,
TRIPSICHORD, PIAS… pour passer indépendant (l’underground,
objet de marketing ?). En gros, c’est de la récupération
! Alors lire Rock Sound, c’est bien mais il ne faut pas se limiter
à ça, il faut même s’en méfier.
HAMS ! : Organises-tu
des concerts avec CRAOUED & cie ? Que penses-tu
de la scène ligérienne-atlantique (come on zi adjectif !) et vendéenne
?
Imodium : J’ai organisé des
concerts avec l’association OND’2 CHOK.
On a fait jouer Oxymoron, Zabriskie Point, Mass,
Tagada, Charge 69, One Way System, Dickheads, NCA, Craft, Papy Boarding
Yalateff, Dipsomanie, Funeral Dress, In the Shit, Roard Rage, Red Flag 77, Kargol’s,
Marto’s Pikeurs… L’asso s’est petit à
petit essouflée, chacun partant vers des horizons différents.
Nous avons perdu de l’argent sur les derniers concerts et il est de plus
en plus difficile de trouver des salles pour des concerts. C’est un bras
de fer perpétuel avec les mairies… Le punk ne passe pas très
bien auprès des populations locales de Vendée, Loire-Atlantique
ou Maine-et-Loire (et comme partout malheureusement). Certains d’OND’2
CHOK ont créé CRAOUED pour s’occuper
des Craft et Papy Boarding (métal punk pour les premiers, punk-hardcore
pour les seconds). En plus de cela, il y a l’organisation de concerts.
Comme ce sont des potes, je participe aussi à CRAOUED mais je m’implique
moins. Et les concerts marchent plutôt bien. Sont passés : les
Mass, In the Shit, Disruptive Element, Murder One, Sickness,
Disbeer, Hippies of Today, Nostromo, Blockheads
et récemment Ratos de Porao. Il y a un café-concert
près de chez nous où il y a des concerts presque tous les vendredi.
Le patron est super cool et privilégie le hardcore et le punk ! Il y
a aussi quelques groupes très intéressants même si la scène
n’est pas aussi développé qu’ailleurs (Bretagne).
A Nantes, il y a les excellents Toxxic TV qui font
un punk-hardcore très personnel et enrichi de nombreuses influences,
les Papy Boarding fans de vieux-hardcore américain et de groupes suédois.
Craft sont de Montaigu (Vendée). Il se passe beaucoup de choses là-bas.
Les nombreux musiciens, les intermittents du spectacle se sont réunis
pour obtenir une salle (de concerts, répètes, ateliers de création).
Le bras de fer avec la mairie dure depuis deux ans. Il faut poursuivre la lutte.
HAMS ! : Plus
précisément, peux-tu nous dire qu’est-ce que l’Icroacoa
? Comment vois-tu l’avenir d’OND’DE CHOC et CRAOUED ? Le fait
d’être dans le département villiériste vous crée-t-il
des inconvénients que vous n’eussiez pas eus si vous aviez résidé
ailleurs en France ?
Imodium : L’ICROACOA
est le nom du collectif de Montaigu qui regroupe cinq ou six associations :
ART
SONIC, OND’DE CHOK, CRAOUED, TRASH TEST…
Le nombre de groupes de musique se développe sur Montaigu (une vingtaine).
Les assos galèrent pour organiser des concerts (cf. l’article dans
l’Imodium n°9 intitulé « Du rififi chez
les punks »). Il devient urgent de construire un lieu dans la région
qui permette d’accueillir les assos, des locaux de répète,
une salle de concert. Il faut dire qu’ART SONIC, c’est dix ans de
concerts, de Fêtes de la musique, des intermittents du spectacle, des
programmateurs… Un lieu ne serait pas de trop sachant que la dernière
salle mise à disposition pour des concerts vient de fermer pour réparations.
La Mairie (de droite) fait la sourde oreille depuis deux ans malgré les
manifs… Une liste électorale POIL A GRATTER
(du collectif) s’est montée aux municipales et a fait 15%
au premier tour ! Malheureusement le maire élu est encore plus à
droite que l’ancien puisque un coup dur pour le collectif qui n’attend
rien de la politique culturelle de la nouvelle équipe. La Vendée
reste sûrement arriérée en musiques actuelles comme beaucoup
de régions rurales. Mais ici le traditionnalisme est mis en avant par
un Conseil Général qui arrose toutes les mairies proches du MPF
. Le favoritisme est très flagrant en Vendée (commune de la Roche-sur-Yon
délaissée car de gauche…). Même la construction d’écoles
publiques reste problématique ! Pour ce qui est d’Ond’de
Choc ou Craoued, on n’a de toute façon pas envie de rentrer dans
le système subventions, coopérations. Mais en plus du problème
relationnel avec une mairie, il est de plus en plus difficile d’organiser
des concerts (souvent à perte, problèmes de voisinages, nécessité
de faire de la pub…). Alors si on veut rester, je ne suis pas très
optimiste pour l’avenir…
HAMS ! : Et sinon,
quelles ont été et sont tes autres activités dans la musique
ou la BD ?
Imodium : Comme je l’ai dit avant,
j’ai organisé des concerts entre Nantes et la Vendée (plus
trois à Paris) avec OND’2 CHOC et CRAOUED. A part Imodium, je fais
des fresques, des décos sur des festivals avec l’asso nantaise
LE TEMPS D’UNE ECLIPSE. Ça n’a
rien à voir avec le punk, l’ambiance est zen, la plupart du temps
en plein air.
HAMS ! : Autre
chose, quelle est ton opinion sur la marée noire de l’Erika (eh
oui, tu n’y échapperas pas à cette question spécial
autochtones) ? Quelles sont les reluisantes leçons (comme du pétrole)
à tirer de cette histoire, un an après ?
Imodium : Je suis écœuré
comme beaucoup de gens. Et nous n’avons pas fini d’en subir les
conséquences. Des plaques de mazout arrivent toujours sur les plages
de Loire-Atlantique et du Morbihan. Il reste beaucoup de saloperies accrochées
à des rochers et même au niveau de l’épave. Les tempêtes
favorisent leur arrivée sur les plages. Il faudra plusieurs années
pour en venir à bout et il reste toujours le problème des déchets
(des milliers de tonnes mélangées à du sable). Total n’assume
pas du tout les réparations malgré ce qui est dit dans leurs publicités
coûteuses. Le problème, c’est que TOTAL-ELF-FINA
est très lié au gouvernement. Il n’y aura pas de représailles
contre eux. Mais certains procès sont engagés. Ils aboutissent
dans dix ans… Une radio émet dans le Sud-Bretagne pour apporter
des infos objectives sur bientôt s’arrêter… et on continue
à dépolluer les côtes. La seule solution est le dégazage
obligatoire des bateaux dans les ports avant de repartir. C’est un surcoût
qu’aucun port ne veut faire (concurrence oblige). Ceci permettrait de
faire un contrôle de l’état des bateaux. Enfin de toute façon
ces sociétés pétrolirèes passent au-dessus des lois.
La marée noire de l’Erika n’est rien comparée à
la dictature qu’impose Elf dans certains pays africains.
HAMS ! : As-tu
un avis sur la Vendée de 1793, puisque cela s’est passé
par chez toi ?
Imodium : Il y a plein de monuments partout.
Une fierté pour certains, récupérée par des politiciens
tendancieux…
HAMS ! : Connais-tu
Eric Massin, l’arnaqueur international qui
ferait vendre père et mère pour un ticket-réduc POMME
DE PAIN sans que l’on s’en aperçût ? Comment
expliques-tu le fait qu’il soit basé à Rezé ainsi
que son conflit avec Muammar al-Kadhafi et l’Université
française après le coup du bouc en Berlutti ?
Imodium : Non .
HAMS ! : Tu as
aussi parlé du féminisme avec un super dessin à la Vuillemin
(ou de lui d’ailleurs). On y voit une un groupe de rock atypique avec
que des animaux aux instruments et une femme à la batterie. Première
question de l'interviewver : "Pourquoi une femme à la batterie
?" (!!!)... Féminisme et rock, toutes tendances confondues,
font-ils bon ménage ? Ce sujet est-il d’actualité dans la
scène alternative (au sens large) ?
Imodium : Le dessin est de Vuillemin. Je n’avais
pas un bon original, je l’ai recopié. Le rock’n’roll
a toujours été macho et le punk ne fait que reproduire ce schéma.
L’ambiance des concerts rock n’est pas toujours très festive
avec des déchets complètement beurrés pas très délicats.
Mais ce n’est pas toujours le cas. Plein de filles aiment le rock, heureusement
!
HAMS ! : Que
t’inspire la disparition des éléphants ?
Imodium : Dégoûtant !!
HAMS ! : T’intéresses-tu
à la littérature et au ciné ?
Imodium : Le ciné pas trop. Manque
de temps et d’argent . La littérature, je ne suis pas très
éclectique. Je lis beaucoup de polars style Le
Poulpe. J’aime bien Didier Daeninckx,
Tonino
Benaquista et aussi James Ellroy (L.A.
Confidential…).
HAMS ! : Suppo
de la fin (ça va chier !)
Imodium : Imodium
devrait continuer à sortir tous les deux mois avec pour le prochain une
interview et un dossier sur les mythiques Fucking Panthers
. Sinon un projet de fanzine mais il est trop tôt pour en parler . Merci
et bonne continuation.
Merci à Olivier de s’être prêté au jeu des questions-réponses et des petits chevaux (je l’ai obligé à faire une partie après et il s’est fait éclater ! Je suis carrément bon à ce truc-là. J’aime mieux ça que les dames ou les cartes). Si vous voulez lui écrire pour lui déclarer votre flamme (si vous êtes blonde et pulpeuse comme le haricot vert provençal sous le soleil d’été) ou pour recevoir Imodium ou encore si vous n’avez rien à faire d’autres que de regarder d’où vient le vent, notez cette adresse : Raymond Kéruzoré chez Peter Gabriel, 14 bis avenue de Gros-Mahon , 35000 Rennes; et celle-ci : imodium@wanadoo.fr
Victor Hams (novembre 2000)