H.A.M.S ! n°8

 

 

 

Against your system (Compilation CD Versus Productions VS001 ; 2001 ; 64’ ; 24 t.)
Against your system mais avec un code-barre bien réel au verso et le logo SACEM bien en évidence sur le disque, faudrait pas voir à déconner non plus… ! A part que je n’aime pas trop la déco générale du disque (un prédicateur antéchristique et un cochon voleur qui se fait la malle avec l’oseille), l’ensemble est tout de même d’un niveau particulièrement relevé dans la scène punkcore & more. Voici ce que j’ai pu y récolter d’intéressant (vas-y pour le catalogue Bricomarché) : dans le registre grosse machine bourrine qui enfonce tout, on a les Américains d’Unseen et de Sad Boy Sinister, Teutons de Bonehouse, les Grands-Bretons de Sick on the Bus (un must), d’In the Shit et des Varukers, les Français de Bacchus Temple Addicts (première apparition au dikse pour ces vieux de la crête, intro métal et en voiture le père Carlo !), de Hellraiser et de Condkoï, les Belges de Funeral Dress, les Suédois d’Avskum et d’Uncurbed et les Brésiliens des Ratos (le speech de fin du morceau rase un peu toutefois); dans une veine plus légère s’illustrent les Brioches de Névrotic Explosion (qui, avec une putain d’assurance - cf. le break central -, reprennent le tube d’External Menace Watch your drown) et les Nantais de Toxxic TV. Beaucoup de beau linge comme vous avez pu le constater à la lecture des lignes ci-dessus inscrites, cela ne signifie pas toujours qu’on baigne dans l’excellence mais force est de constater que le résultat est ici au rendez-vous. L’intérieur surprend par sa grande classe, tout cela est vraiment du bon boulot. Un des événements (Télérama) de l’année 2001 en matière de discographie punk.

[Victor]

Algolagnie / Porc Bleu : Split LP (Split LP Maloka ; 2001 ; 45’ ; 6+ 6 = 12 t.)
J’ai acheté ce disque au concert de Porc Bleu, le groupe qui m’a récemment mis à genoux. Commençons par Algolagnie. C’est un hardcore déstabilisé, rapide, cassé, bien joué et assez nuancé musicalement (au point de tirer vers certaines ambiances noise ou émo). Le hic réside dans le chant, qui m’a l’air d’être doublé. Hurlé, exagéré, hardcoreux dans ce qu’il a de plus courant et de moins mature, il ne cadre pas avec la musique, il fait trop facile et on ne pénètre pas dedans. C’est dommage car le groupe carbure instrumentalement. La prise de voix met en outre celle-ci comme en retrait mais sans doute était-ce là volontaire. Dur de se prononcer sur une telle musique, y a vraiment à prendre et à laisser, le problème étant que c’est à chaque fois au sein du morceau même. Pour Porc Bleu, je ne peux cacher une légère déception par rapport à leur prestation live. Leur style, bien plus sec (du fait aussi de la prise de son assez uniforme) mais toujours riche et très travaillé, est une façon d’hybridation entre du hardcore à la Liquid Laughter et du rock allemand à la Can. C’est pas inintéressant toutefois et certains titres percent le plafond, particulièrement le second (Le Bâton) et le dernier (La Misère) qui est quasiment tout du long instrumental. Ces deux titres bénéficient également d’inserts de fond réussis de gens communs exaspérés par la société et criant leur révolte . Autre titre bien campé dans son ciboire, Crucifix avec un double chant (guitariste + bassiste) parfaitement installé. Les textes en général demeurent également de bonne qualité (Mention spéciale pour les paroles du Crime et simplement pour cet autre titre de chanson : Brève altération de la vie de Johnny Weissmuller, excellent, fallait le dénicher !). L’illustration de cette grosse rondelle de vynil est issue d’une fresque murale et sociale écossaise, le livret fait dans le coupé-collé à l’anarchopunk. Le tout est vraiment chouette. Plus je l’écoute, plus je l’apprécie alors au final, je ne peux que vous le conseiller.

[Victor]

Appliance : Six Modular Pieces (CD Mute Rds 724384948528 ; 2000 ; 30’ ; 6 t.)
Disons le tout net, les deux tiers du disque sont très bons quand le dernier dégouline de sirop Calvin Klein (avec une voix qui lorgne chez 22-Pistepirkko, groupe que j’apprécie aussi plus pour sa musique que pour son chanteur). Ce qui se goûte : les instrumentaux. Une sorte d’ambient, instrumentale donc, semblable à certains morceaux de Gerd ou encore de Move D.. C’est langoureux, planant, design, jouisseur (Derailleur King of Mountain) voire floydien (Slow Roller). Si elle semble facile, une telle musique ne doit pas être si simple à accomplir à sa juste mesure. L’habillage, qui représente un mur de gros carreaux modernes beiges, comme une installation contemporaine, est particulièrement taciturne mais congru. Un deuxième album doit sortir (ou peut-être même l’est-il quand vous lirez ceci).

[Victor]

Besak Dogz (Kanivo Chaos / Art Scénic Production ; 2001 ; 70’ ; 24t.)
La scène bisontine indépendante nous est ici proposée grâce à l’initiative des Stéroïds et accointés canins. Certains groupes sont déjà bien connus (Stéroïds donc, Second Rate, Gargoïl) et d’autres commencent à l’être (Fuel Injekted Kids, Lystéria, Sang Humain). Bonne idée quoi qu’il en soit que celle qui était de séparer les morceaux de chaque groupe. Si le premier ne nous plaît pas, le second a sa chance. Pour le contenu, ça va du grind à la pop. Un gros carton entre Craft et Punish Yourself, c’est Aside from a day avec son Eyes of disgrace qui vous fouaille bien les tripes de son hardcore-métal maxibreaké et ravageur. Broken faces est plus classique et death mais bon également. Dans la même mouvance, , on peut noter Skyward, brutal hardcore avec refrains mélodiques dans un mélange qui vous tronçonne habilement l’oreille. Plus spé mais bien vu aussi, Munkyposse, au chant haleté sur fond musical toujours déstructuré. Pas trop mal non plus le premier truc (Fantomas is coming soon) de Red Stop Gringo où une rythmique rock bataille contre un chanteur et des scratchs incessants. Idem pour le Nuclear Threat de Fuel Injekted Kids, dont le punk-rock assure au-delà de la moyenne. Le son d’ensemble qui m’a le plus botté va toutefois à Lystéria et à son Hey toi qui rappelle Sleazy Joke. Son saxo plaintif joue à plein dans le charme désespéré qui émane de cette chanson punk Un morceau qui reste en tête longtemps après… Cette compilation dont le livret est au passage fichtrement bien réalisé, très professionnellement (même si découvrir de qui sont les titres à l’arrière est un peu jeu de piste) vaut donc que l’on y arrête ses portugaises et s’impose par sa qualité d’ensemble comme la réponse de l’Est de la France aux Breizh Disorder et Breizh Ardente remarquées voici deux ans.

[Victor]

Bloodshed : First bloodshed (CD démo ; 2000 ; 17’ ; 5t.)
Ce qui nous est là proposé n’est autre que du grind-core-métal avec l’inénarrable voix purée Mousline et la batterie qui tend souvent à l’imitation d’une batterie électronique. C’est pas fulgurant d’originalité, un poil enregistré trop bas mais le troisième morceau, After death bloodshed (arrêtons toute cette poésie !), retient l’attention et sort du lot. Une production tout à fait honnête, pour les aficionados du genre (même s’il est vrai que ce ne sont en général pas les foules qui se ruent sur ce style de musique … !).

[Victor]

Braindance : Last man standing (45t. Combat Rock CR 042 ; 2000 ; 3 t. ; 9')
Pour leur dernier EP, les Anglais fameux sont ici plus proches de leur acide et rapide Gentle Spirit que de leur autre veine, tout aussi bonne mais vocalement plus grasse. Que dire sinon qu’ils terminent ici leur carrière en beauté et auront été l’un des groupes punks les plus marquants des années 90.

[Victor]

Cimtière Likid : Pestez calme ! (CD Cimtière Likid ; 2000 ; 19 t. ; 29')
Ce groupe m’avait filé une grosse claque dans la tronche de mon voisin quand je l’avais voui en concert voici un an, peu avant qu’il ne splittât tel une vulgaire crêpe mal rattrapée. Leur couleur sonore relève du punk dur ou du premier hardcore avec un chant quasi parlé avec des mélodies basiques rapides et très fracturées. Tout est chanté en français mais, chose pas si courante, cela apporte un sacré plus puisqu’on captouille les paroles assez clairement et que, point fort du groupe, les textes sont loin d’être connauds et particulièrement bien écrivaillés dans le style. Les thèmes parcourent en long en large en travers tous les gros sujets d’actualité des dernières années, savoir Papon l’approvisionneur SNCF, Elf les pompistes à fric, le chômedu, le viol, l’internement psychiatrique, la faim, les femmes battues, la révolte et la gent poulaillère matraqueuse, le fils à papa, etc. Quant au livret, il est ornementée d’une manière très poétique, avec beaucoup de clichés en hommage au grand photographe Khan Harvey C., le disciple du célèbre Anglais Drâh Jeff UK. . La couvrante représente un homme torse poil et boots de ski poursuivant un verrat devant une centrale nucléaire, ce qui a le mérite d’être originale. L’intérieur est bien chiadé en tout cas (avec textes + habituelles tofs de soirées et de campinges).
Un skeud qu’il est vraiment bien et que c’est dommage qu’il y en ait pas plus que ça aujourd’hui dans l’ex-Zâgone et dans l’ex-Yougoslavie .

[Victor]

Crash Normal / TV Killers : The punk rock under the age (split 45 t. La Pont’Ach PA005 ; 2000 ; 12’ ; 2 + 2 = 4 t.)
Deux groupes, deux sons assez différents. Crash Normal, c’est du lo-fi pas trop fin, très oubliable. TV Killers, normalement c’est génial. D’où mon étonnement face à deux titres pas mauvais mais tout de même assez plâtreux par rapport à ce dont les rockers garagistes bordelais font habituellement montre. N’était la pochette psyché – bart – ernest - bourriquet complètement jetée de Ray Ahn, il ne resterait pour ainsi dire rien à garder de ce 45 t. sinon un court désappointement.

[Victor]

Cria Cuervos : Soap Opera (CD Cria Cuervos Prod. Cria01 ; 2000 ; 28’ ; 9 t.)
Leur 4-titres démo m’avait plutôt bien plu. On retrouve la fougue de ces trois banlieusardes (qui se la jouent trois drôles de dames sur la pochette ) sur cet album et, en gros, ce qui me plaisait le moins sur la démo, est aussi ce qui m’agrée le moins présentement, notamment le chant convulsif sur les chansons en français avec des « oooh » dans les chœurs sortis de westerns-spaghettaux. Les meilleurs compositions sont celles qui utilisent l’anglais ou l’espagnol (Purgatorio, Train ride, Playing God, Time to wake up, Nos somos nada). Le son général est tout de même assez particulier pour pouvoir appeler la comparaison avec autre chose en France (c’est du punk-rock bien poussé avec un timbre de guitare parfois remarquable et beau – notamment sur Purgatorio, Train Ride et Nos somos nada). Le livret contient les paroles (féminisme, prison, torture animale demeurent les principaux sujets illustrés) et un texte trilingue sur la condition générale des femmes et l’enregistrement est tout à fait correct .

[Victor]

La Dérive des Incontinents : A la cave (CD autoprod. ; 2001 ; 28’ ; 16 t.)
C’est récemment qu’à la lecture du dernier Earquake qui en parlait comme de la révélation punk de ce début d’année que j’ai passé commande de ce disque maison, qualificatif qui ici ne désigne en rien une mauvaise production, bien au contraire, le son y est bien léché et rien n’y est étouffé sinon dans le maëlstrom musical volontairement provoqué. Pour le punk par contre, euh, comme qui dirait, ben, on repassera, hein, parce qu’il n’en est pour ainsi dire pas du tout question (sauf sur Ma Ballerine ou Totems, et encore appeler ça aujourd’hui « punk », c’est, passez-moi l’expression, tiré par les cheveux). Au mieux, ça tire vers la no-wave à la Joy Division (Vlad, goth à souhait, plan guitare de Court mais trash et l’instrumental La Dérive, meilleur morceau de la galette). L’ensemble va toutefois chercher majoritairement dans un rock début des années 80, genre Cyclope, avec tout ce qu’il sous-entendait de pop, de chœurs synthétiques et de cheveux brossés, gelés ou en pétard. Je suis par contre là loin d’être convaincu par ce qui est présenté, surtout par la première moitié du disque qui est vraiment quelconque bien que dénotant dans ce qu’on entend habituellement du fait que les années 80 ne sont plus jouées depuis quelques temps . Quant aux textes, ils versent dans l’imagerie gothique, cacaboudin, guerre et camps de la mort, malsains en quelque sorte. La pochette dessinée façon crobards Bilal ou Kerleroux est vraiment réussie mais les textes écrits main à l’intérieur, accroche-toi pour les lire si t’es épileptique. J’en reste quand même sur ma faim (à cause d’Earquake en fait et non pas d’Emile Louis, dit « Mimile Black&Decker », qui habite à deux pas de chez le groupe avec Gui Roux).

[Victor]

Digital Smart Republic / Tekken / Tennis Bastard / les Maîtres Du Mal / Tekken : Split-tape (K7 Vendredi 13 Rds 7002 ; 2000 ; 1h ; une brouettée de t. )
Le premier groupe de cette split-tape-dans-tes-mains-t’auras-plus-chaud répond au nom de DSR (Digital Smart Republic) et pratique une new wave à synthétiseurs sans vocaux directement issus du début des années 80. Ça me plaît bien mais je suis partial car j’ai une tendre affection pour ces chaudes années où je n’écoutais pas de musique à part les jingles de Pierre Belleflaque sur Europe 1 pour savoir si mes vieux avaient gagné à « Allô Stop ». Ensuite vient Tekken qui donne dans le crust-rock ou le tout ce qu’on veut, de toute façon le son est tellement pourri qu’on n’y ouït goutte mais je ne sais pas si c’est le but réel de l’opération. A la fin de cette première face, un bonus nous est offert en la personne de Cage à Googoo, ce groupe qui représentait alors – j’avais huit-neuf ans et élevait des papyrus à l’école avec les autres galoupiots du CE2 - la musique la plus violente qui soit quand je le voyais à CHAMPS-ELYSEES entre Claude Barzotti et Jean Schultès.
Il pleuvait des cordes sur Brest ce jour-là, souviens-toi Barbara, et quand tu enclenchas l’auto-reversoi, la cassette alors nous diffusa… Tennis Bastard. Alors la portièroi, je claquois et toute seule je te laissa, épanouie, ruisselante, les oreilles explosoies. En effet, Tennis Bastard, toujours muni du fameux son « VENDREDI 13 – zi label » (i.e. tu mets ta chaîne sur volume 20 pour commencer à entendre quelque chose derrière le souffle, eh les gars, Tennis Bastard existe, je l’ai rencontré !), diffuse un crust as vagissement dans la grande lignée des morceaux d’une minute montre en main. Les trois-quarts restants de la face B sont consacrés aux Maîtres Du Mal, groupe de rock, punk 77 dans la veine Métal Urbain (je crois que pour une fois et bien qu’il n’y ait de boîte à rythme présente, la filiation n’est pas forcément usurpée). C’est plutôt pas mal, brouillon mais quelque peu original et les morceaux de fin (celui sur la Bière et l’autre sur Satan, mon pote qui joue au bab avec moi) valent le détour. La couverture qui se pare d’une sorte de saint Sébastien fléché est pour sa part réussie, malgré que les multiples pochettes intérieures foutent le bronx là-dedans plus qu’autre chose. Vu le bas prix, encore une fois, il serait pour conclure inutile de se priver de cette split K7 légendaire dans son HLM des bords de la Garonne.

[Victor]

Eis : Eis (CD 513 / Bleu Rds OO4 / Sauf Imprévu ; 2001 ; 17’ ; 5 t.)
Perdu dans les méandres footballistiques d’un championnat pourri, Saint-Etienne peut en dernier recours jeter son dévolu sur le dernier rejeton de sa scène noise, Eis. Très habiles, techniquement, ces quatre gaillards construisent fort bien leurs morceaux et le tout passe sans problème. La mièvrerie et la cucuterie qui découlent souvent de cette musique associée aux affres existentielles de l’adolescence n’apparaissent aucunement ici et le fait que l’on distingue vraiment mal les paroles en français du chanteur, qui hurle d’une voix jeunette entre Aubert et Arno, n’est pas pour aller à l’encontre. Les samples et scratchs fort fins nappent et rayent à souhait certains des morceaux (d’aucuns m’ont rappelé le « P » de Portishead) et l’intro de I & Me avec une basse pétante et prenante souligne un savoir-faire qui devrait s’imposer, bien loin devant des groupes comme Virago ou Eduskate. Une réussite.

[Victor]

Les Excités : Toujours là et encore pire ! (CD Picolo Rds ; 2000 ; 51’ ; 12 t.)
Ce groupe du Loiret est l’un des plus intéressants du punk-rock aujourd’hui par la variété de sa musique. Alors que les photos de teuf en tout genre qui ornent la pochette intérieure laisseraient présager un groupe bourrin ou pouëtpouëtcamembert , l’écoute du disque remet tout de suite sur les rails. Déjà les textes sont vraiment bien léchés bien que traitant de thèmes rebattus car évidents (antifascisme, antisocial, galère, etc) dans la scène alternative. Mais surtout la musique change souvent (cf. L’ennemi du peuple) et le combo bénéficie d’un guitariste qu’a pas les deux mains dans la même poche. Il aligne les plans hard-rock 80 ou death au milieu d’une mélodie punk-rock comme d’autres enfilent des perles. Le chant relève plus du punk-rock ou de l’alterno et sur certaines chansons fait même penser à OTH. Deux de leurs compositions relèvent en outre d’un ska-rock hybride bien chiadé (Ska sex it, excellente et Changeons c’bordel). De ces douze titres, Prends un flingue est un sacré brûlot (avec un halètement en chœur super bien senti), En France, Love Song et L’Ennemi du peuple dégomment aussi et, feuille de rose sur le gâteau, le morceau intitulé Tendresse est une comptine érotique tout ce qui a de mignonnet. Quoi dire de plus sinon que ce CD est pour l’amateur de bonne zique un CD à poCD .

[Victor]

Fast Forward : Public disorder (CD Mafia Underground / Moloko + 043 ; 2001 ; 57’ ; 14 t.)
Bien à sa place dans le royaume du hardore-technoindus, Fast Forward déchiquette l’auditeur en quatorze plages brutales, rapides où les machines hurlent sous les coups. A fond dans la techno-hardcore et sous influence ministryenne, tavelée de petites intros filmiques aux oignons, la maestria de ce groupe colle l’auditeur à son siège, tout est subtilement bon et brutal, même le Der Mussolini, reprise de D.A.F. qu’ils ont mis en avant (compile Darkside) et que je trouve un tantinet plus faiblard que le reste. Un reste de haute tenue, loin d’être facile et aux origines multiples et qui ne laisse pas de faire penser à des piliers du genre comme le (Re)manufacture de Fear Factory. On a même le Police & Thieve de Junior Murvin passé à la brutale moulinette (… The law won), derrière les lueurs des gyrophares flics. Et la Jamaïque versant ragga est aussi à l’honneur de la plage indus puis techno suivante (Big Dick man). La dernière plage, remix dub par Herbst in Peking, très légère, achève de convaincre sur la qualité de cet ensemble.
On remarquera enfin la classe de la présentation soignée au possible (à commencer par la superbe photo d’une sorte de commando moyen-oriental à l’entraînement de tir) aux teintes noires, grises et dorées de ce disque bien imaginatif et captivant.

[Victor]

Fast Times : Counting Down (CD Age of Venus AOV 004 ; 2000 ; 28’ ; 17 t.) Si vous comparez le nombre de titres et le minutage, vous vous doutez bien que c’est pas Philippe Castelli qu’est derrière le micro. Du speed, encore du speed, toujours du speed, voilà le trait majeur de ce disque des Américains de Fast Times, emmenée par une chanteuse hargneuse et accrocheuse. On ne peut pas dire que la variété soit la qualité majeure de ce disque, les plages se ressemblant assez souvent. La veine, c’est du punk-core à l’américaine avec légère intro guitare ou basse et envoie la sauce. La chanteuse change assez aisément de registre (calme / agressive) sans tomber dans le caricatural. Ça cartonne bien en tout cas et certaines compos peuvent être qualifiées de fort abouties (General’s warning, Squeal like a pig). C’est classique musicalement mais dans le bon sens du terme et la définition sonore a un rendu impeccable. Un bon disque pour tout amateur de punk et de hardcore, qui plus est visuellement particulièrement léché et réussi (un système bioméchanique strié de capillaires artériels et veineux).

[Victor]

Forehead : Out (definitely unfashionable…) (CD Day by Day Rds 002 ; 2000 ; 37’ ; 10 t.)
Grosse surprise à l’écoute de ces Havrais qui ont le rock aux tripes, j’ai trouvé presque tout cet album excellent. Une musique bien énervée aux lisières du punk, du garage et du hardcore mélodique ou de la ballade pop mais sans jamais y tomber réellement et surtout pas s’y vautrer ce qui permet au groupe de garder une densité énergétique impressionnante. Certains morceaux (Bitch (of a life)) vont même carrément chercher du côté des Young Gods avec une voix du chanteur qui y lorgne. Tout est chanté en anglais et parlent avant tout de politique (ya un hommage aux Thugs via une chanson sur le film Reprise d’Hervé Leroux qui était centré sur une femme sortie du rang -au propre et au figuré- lors de la grève aux usines Wonder à la fin des années 60) et de façon d’être mais l’ensemble n’est pas ronflant et on peut y déceler même de l’humour (l’allusion musicale à Elli Medeiros sur Fucked up). La présentation visuelle, efficace et bien gaulée, tire large puisqu’elle va d’une pub 50’s américaine (style Le voyage de Félicia) aux graffitis des luttes sur les docks de la cité de Ruffenach et Duroméa. C’est fin et rock’n’roll, avec une guitare parfois funky, c’est varié, rock et riche, de la balle, quoi ! Une réussite de part en part et qui promet.

[Victor]

France-Québec (Round 2) (Split EP Rural Muzik RM008 ; 2001 ; 12’ ; 2 + 2 = 4t.)
Deuxième round pour l’équipe de RURAL, ces phacos boit-sans-soif milliardaires fans de Charles Trénet. Première face, québécoise : Locos, dont une interviou dans Punk System m’avait mis à l’eau à la bouche. Eh bien, je dois dire que cette écoute me l’a retirée car je n’ai pas du tout accroché. Il faut dire à la décharge du groupe que je m’attendais à un truc genre Bons à Rien avec le gros accent excellent. Là, ya pas d’accent et à la place c’est du hardcore triste et pas violent à la française avec textes sans fin où on cherche désespérément la porte d’entrée. Pour Malaka, ça passe mieux- c’est du punk-rock français assez teigneux - mais tout ça n’est pas à sauter au plafond non plus. La pochette, bien flashante tout de rouge qu’elle est habillée, a un côté très alterno avec une souris de bd qui fait une prise à un micro. J’avais mieux aimé le premier volume, plus varié et musicalement meilleur, quoique par son son cela péchât plus.

[Victor]

Four Monstrous Nuclear Stockpiles : Give peace a chance (CD Panx PP059 ; 2000 ; 19’ ; 10 t.)
Etonnante lenteur de la part de cet ensemble dans la droite ligne seventies du Third de Soft Machine, et qui ose mêler à son rock progressif calme une ambient extrêmement éthérée qui rajoute un soupçon de modernité à une vision conceptuelle de sa musique… Comment ça tu m’as cru ? Eh bien t’as eu tort et t’es pas prêt de recommencer, c’est moi qui te le dis. Déjà, j’eusse été ta vile personne, j’aurais zieuté primo le minutage : 19 minutes, c’est soit un album de speed, soit deux albums de grinddeathcore, soit le début de l’intro du premier morceau du groupe de Robert Wyatt. Dix titres deuzio, c’est soit un album de speed (au hasard : Four Monstruous Nuclear Stockpiles), soit le triple voire le décuple du nombre de morceaux d’un album de rock conceptuel. Tertio, t’aurais dû savoir que c’t alboum des FMNS est dans la droite ligne de l’ancêtre des Dis-bands, j’ai nommé Castafiore Bazooka. Tout à donf sur une minute trente et on n’en parle plus, sans tomber dans le crust toutefois, je te rassure, on n’est pas des sauvages, on reste calme et on boit frais. Quatrio, un titre comme : Q : …and grannies ? ; A : …and grannies ? aurait dû te mettre la puce à l’oreille, par sa référence aux marchands de pomme. Napalm’n Death pour sa part fait penser à je ne sais plus qui, c’est pas évident à trouver non plus, je m’appelle pas Petit Larousse. Cinquio, PANSQUE est un label de variétés placé sous le haut patronage de Pascal… Sevran, célèbre animateur télévisuel. Sixio, ce dikse a de la goule et c’est bibi qui te le dis ! Quand tu vois le petit mix tècheno que ces margoulins t’ont concocté en guise de sortez vos mouchoirs, t’en restes comme un poulet de batterie balancé par-dessus les grilles de la Préfecture, sur le fondement et explosé. Septio, c’est chez PANSQUE et facilement disponible alors qu’est-ce qu’on dit au monsieur ? Merci et mézigue, je dégaine les battoirs et j’applaudis à une galette commace ; maintenant, toi tu fais comme moi, comme un grand, tu vois, toi aussi, tu peux le faire d’être gentil, suffit d’écouter les choses avec délicatesse, retenue et d’une oreille altière et affûtée. C’est tout simple et c’est ainsi que, comme le chantonnent les Four Monstruous Nuclear Stockpiles, on pourra peut-être un jour « give peace une chance », ainsi qu’on causions en rosbif.

[Victor]

Garage Lopez : Barka ! (CD Dialektik Rds ; 2000 ; 27’ ; 12 t.)
Avec retard, je chronique cet album des Lopez mais il n’est jamais trop tard pour faire le bien. En l’occurrence, du bien j’en ai pris ma dose dans le paco avec cet album de la famille Lopez puisque les gars de l’Essonne ont passé la vitesse supérieur par rapport à leur Que d’la gueule précédent. On commence avec une sorte de parodie techno que j’apprécie au premier degré toutefois (eh bé !). Mais c’est surtout leurs morceaux de rock énergique pur jus et pur tout ce qu’on peut mettre derrière ce cliché surusé. Efficacité, top crédibilité. Des textes directs et bien calibrés, de l’humour (Tout l’amour que j’ai pour toi fait carrément penser à du Jean Yanne), du sentiment (j’accroche un peu moins là style Je n’ai rien demandé), de l’agressivité et de la solidarité, tout le rock’n’roll est là et mes préférences vont au Même soleil, Ouvrier, Rock this place, Surfin Sex. Et encore, tout cela n’est qu’un reflet de ce dont ils sont capable sur scène pour ravager le public de contentement explosif. Du nanan !

[Victor]

Gasolheads / Dialtones : Fresh fruits for rockin’ vegetables (split EP Lollipop Rds Lolli15; 2000 ; 10’ ; 2+2 = 4 t.)
LOLLIPOP est vraiment le roi pour ce qui est des couvertures les plus belles et senties qui soient. C’est rare d’en trouver qui reflète aussi bien la musique à l’intérieur. Elle est dessinée par un certain Mezzo auquel on ne puit qu’adresser compliments pour la belle ouvrage accomplie. Face A, ce sont les Dialtones qui s’y collent et que je connais pas, avec des patronymes à venir de Suède ou de Norvège. Si Baby volatile est assez passe-partout dans le genre, Riot ! est un instrumental garage qui vaut par contre son pesant de bastos dans le buffet. Pour les Gasolheads, leur musique de sauvage m’a bien dégommé, notamment It sounds like headache. Ce garage-punk brutal est autrement plus percutant que les titres qu’ils avaient commis dans leur split EP avec Exxon Valdez l’an passé. Le second titre, Love your police, fait penser à leurs collègues parisiens des Defenestrors. What a pêche, my aïeux !

[Victor]

Guet-Apens : Je ne fais que passer (EP Crânes Blasés CB11 ; 2000 ; 10’ ; 3 t.)
Voilà un EP skin vraiment commun. La musique donne dans le punk-rock ou streetpunk (Adversité, le meilleur des trois titres), les textes sont banals dans ce style (amitié, fierté, camaraderie, à bas les rave-parties avec ces hippies qui prennent de la dreueueeugue) et, comment dirais-je, carrément pas dans mon optique … Mention spéciale par contre pour la pochette (une Betty Page abandonnée au harcèlement des vigoureux chasseurs de la tribu des Cannibales), très garage et fort bien dessinée.

[Victor]

I’m Half-Divine : Winter class (CD Onival Musique ; 2000 ; 47’ ; 14 t.)
Pour certains, le futur de la musique oscille entre Nicolas Peyrac et Mike Brandt ; c’est le cas d’Im Half-Divine. Une vision des choses que j’ai pour tout dire un peu de mal à partager et beaucoup de facilité à rejeter en bloc. Ce Français (Alsace et Nièvre) chante accompagnée d’une guitare sèche, d’un violoncelle et d’une huitaine d’autres instruments. Cela rappelle musicalement parfois Théophile Minuit mais pas forcément en mieux (c’est dire…). Le dernier titre est une chanson bonus mais qui dit bonus ne dit pas systématiquement cadeau. Sans doute pour sonner Byrds ou Beatles, toutes les paroles ont été écrites en anglais et si l’intention est louable, le résultat l’est nettement moins. A-t-il honte, ce chanteur, de ces textes au point de ne pas en passer un français (et vu la vitesse d’élocution du genre, il n’a pas l’excuse à deux francs qu’ont les groupes speeds français anglophones) ? Seule la pochette (un bonhomme en tige cuivrée de bouchon de champagne sur fond d’éparses goutte d’eau bleu gris) est à relever de ce disque pour moi totalement imbuvable.

[Victor]


Hellsuckers : Our aim is to run with the devil (CD M.A.C. Prod ; 2000 ; 12’ ; 4 t.)
Garage punk over all, telle semble être la devise de ces suceurs de l’enfer alsacos. Quatre titres, quatre torches vives, petits effets de voix (Kick the duster), appels internes (« Hellsuckers ! ») comme à l’époque du rock le plus flamboyant, légère touche psycho (Phantom creeps), paroles collées de sueur et de cambouis par la chaleur du diable, enregistrement particulièrement nickel, bref, tout y est pour un délice auditif entier et brûlant. On dit souvent que la France a des garagistes reconnus dans le monde entier mais ces gars-là (qui ont déjà joué au Japon) ne font qu’accentuer cette idée. Un top.

[Victor]

Ikss : Les Mirages (CD Birdy Music Prod . ; 2001 ; 13’ ; 5 t.)
Nous naviguons ici dans la chanson à boire pop à la Miossec, avec guitare acoustique et accélération progressive du rythme. Les textes, très compréhensibles, hélas pour eux… Sans compter que le chanteur n’est pas le roi des rossignols. La musique par contre passe deux fois la rampe (Le Clown, Les Mirages). Déjà que je trouvais Miossec fort mauvais et surfait... Or Ikss, c’est du Miossec approximatif. Sauriez-vous alors trouver à quel point j’ai apprécié ce CD ?

[Victor]

Ironix : Huma Frenezo (CD Dynamite Rds FLAFF001 ; 2001 ; 13’ ; 6 t.)
Belle pochette pour cette première prod. de Dynamite (une R11 en feu) avec un titre en espéranto. Ironix était (ils se sont éteints) un ensemble qu’on avait déjà pu apprécier sur compiles et dans le France-Québec round 1 de Rural Pochtrons Rds. Là encore Ironix tient la route musicalement . Morceaux carrés, très rapides, intros de basse, bien accentués au refrain, guitares aiguës hurlantes, seul le chant aurait mérité plus d’articulation (même avec le texte sous les yeux, je ne comprends pas ce que le gars chante et ce n’est pourtant pas hurlé à la grinddeath ) L’inspiration textuelle est ici puisée dans l’accoutumance médicale, le refus des punks-cloches, l’humanité malfaisante et l’exploitation (reprise de Defiance). Ce n’est pas un groupe profondément original mais ce qu’ils commettent est bien fait et s’écoute sans effort et sans lassitude. Les morceaux qui m’ont le plus plu sont Utopie du sort et sa longue partie instrumentale ainsi que la reprise. J’ai bien aimé pour finir la mention « No Copyright » écrite en gros et qui nous change de la courante rébellion codebarrisée par la SACEM et autres vampires du genre.

[Victor]

J’aurais voulu : Au-dedans de toi (CD Trauma Social / Limolife Rds LLR013 ; 2001 ; 47’ ; 17 t.)
Pas très étonnant que les Colmariens de J’aurais voulu sorte sur ces deux labels punk-rocks français tant les trois se correspondent. Je n’ai pas accroché pour ainsi dire à tout le disque, principalement à cause de la diction du chanteur que je trouve vue et revue et peu originale. C’est aussi assez classique musicalement (punk-rock qualité française à pointes mélodiques) mais c’est bien exécuté et ç’a un indéniable mordant. Les textes, pour le moins sombres, parlent de la xénophobie, de la misère, de l’abrutissement social, de la dope, de la fausse justice et de l’incompréhension. Le titre général du disque demeure à cet égard assez étonnant. Certaines compositions sont des reprises de leurs chansons précédentes (J’aurais voulu, Image interposée, Enfants du béton). Le livret, noir et blanc avec écriture blanche et puce, colle bien à la musique et est assez réussi, de même que sa pochette. Difficile pour moi donc de donner un jugement sur un tel ensemble puisque d’emblée je n’y suis pas rentré ; si vous connaissez les deux labels incriminés, c’est dans la droite ligne de leurs goûts, qui ne sont toutefois pas les miens car il faut de tout pour faire un monde, c’est vrai, comme il est dit dans le générique d’Arnold & Willy, le bien connu.

[Victor]

Kamizol : Au doigt et à l’oeil (CD Skalopards Anonymes / Kamprod. Skalokam01 ; 2000 ; 20’ ; 9 t.)
Avec Kamizol, c’est du côté des Tagada Jones qu’il faut regarder pour grosso modo situer leur musique. Ils pratiquent eux aussi un punk-métal pas totalement violent avec double chant en français proche de la fusion. L’inspiration des textes est similaire, c’est-à-dire étroitement lié aux sujets d’actualité (scandales et dérèglement à la Soleil Vert de notre société ). Si je n’aime pas beaucoup la musique tagadesque, j’apprécie un peu plus celle de Kamizol, légèrement moins froide. Elle passe de plus mieux sur disque que sur scène et est moins brouillonne cette fois que sur leur opus précédent. Le meilleur des neuf titres est le remix techno-indus final (Encore bravo), bien trempé dans le gros son et la sciure de tronçonneuse. La présentation générale du disque, pour n’être pas au premier coup d’œil attirante, au départ, est finalement réussie et chouette (mélange de peintures, dessins et photographies). Un disque correct, dommage qu’il ne parvienne pas au niveau de leur fort bon titre de la compilation skaloparde On achève bien Status Quo / Tiercé du siècle, qui cartonnait sur les champs du course voici deux ans.

[Victor]

Koda : Silicium 235 (CD Fraktion Basik n°133 ; 2000 ; 74’ ; 10 t.)
Koda est cet artiste béarnais qui oeuvre dans l’électro-indus DIY à 150% et nous sort des fours du matériau qui n’a rien à envier aux gens qui se font de la thunasse en bidouillant à l’identique. Pour en parler, je préfère une progression linéaire car le disque s’appréhende assez difficilement dans sa globalité.
Dès la première plage, on est dans un univers maxiindustriel où les machines-outils s’en donnent à coeur joie et emballent l’auditeur. Passons sur la 2, plus anecdotique, et occupons-nous de Basik Night / Blue Historia, plage la plus étendue de la galette (23’), n’a pas hélas d’unité et c’est dommage car elle est fort riche d’ambiances, de violoncelles rappelant Nyman au début à des synthés goth-newwave qui passent dans une envolée à la Hisaichi que des blancs entrecoupent pour redémarrer sur une rytmique groovy bien boostante et extrêmement bien menée mais qui s’achève dans un silence mal négocié. Au contraire, Air Kod! qui se remarque lui aussi par son longueur (18’) est nettement plus cohérente et dépeint une sorte de chute sans fin dans un puit industriel, piquetée de percussions chaudes et variées et d’un leitmotiv mat et bulleux bien trouvé. Leitmotiv 235 s’entame quant à lui par une sensation de REW et se poursuit par un mécanisme caoutchouteux bien lancé que rien n’arrête sauf les cymbales finales. Break 133 est un interlude inconsistant de quelques secondes. Idem pour Mini Mal Ist. Retour à l’indus et aux stridences alarmées de l’usine lors de Midi Minuit, (hommage à Losfeld et à la fameuse revue ?) impressions rotatives et presque laibachiennes (wouf !) qui s’achève sur une relance étrange. L’avant-dernier morceau (NoMized Thanx) est enfin un crescendo léger d’une corde de basse électronique qui s’atténue dans le dernier tiers, fin là encore annoncée par des percussions acoustiques. Pour l’ultime plage nommée Nada Komplot, je reste circonspect car elle se morfond dans le quasi silence, ce dont l’intérêt m’échappe. Quoi qu’il en soit, c’est un disque fort riche que ce dernier, jamais ennuyeux même si sa structuration et sa cohésion d’ensemble demandent à être améliorées. D’un bon esprit achevé, ce genre de productions mérite que vous vous y arrêtiez et y passiez un ardent moment tant il est d’écoute appréciable et d’un prix ô combien peu prohibitif de surcroît.

[Victor]

Lágrimas de miedo (Compilation CD Fear Drop 007 ; 2000 ; 67’ ; 10 t.)
Voici l’annuelle compile que livre à chaque parution le luxueux fanzine électronique Fear Drop . Les deux premières plages sont consacrées à de l’indus-ambient et sont l’œuvre d’Imagho et de Final (=Justin Broadrick). Ce genre de musique me laisse ici carrément sur ma faim par sa facilité (nappes sonores + rythmique indus crescendo/descrescendo) . Idem pour Denis Frajerman (électro-jazz pour hall de gare) et Steve Roden (encore un bon celui-là, qui racle un agglo avec une truelle pendant sept minutes, il est gentil le monsieur… ). Les meilleures plages sont à mon sens Vromb et son Source e.g, ainsi que Silk Saw (Houseman), qui fait évoluer de lourdes machines ronflantes dans des confins à l’évanescence psychédélique. Tribes of Neurot fait pour sa part penser à la musique lancinante et angoissante de Badalamenti pour la série Twin Peaks, en un peu moins bon tout de même. Pour conclure, on a droit à un morceau électro-indus assez léger, avec des sonorités de gamelan (Spher). Moins diversifiées stylistiquement que les deux autres que j’ai à ce jour entendues, ces « Larmes d’effroi » sont néanmoins un bon panorama de la musique électronique « populaire » la moins courue et la plus recherchée.

[Victor]

Lutèce Borgia : Démo (CD démo ; 2000 ; 27’ ; 9 t.)
Après les Teckels, Lutèce Borgia est vraiment le groupe français punk-rock/streetpunk qui a le feeling avec le style le plus poussé actuellement. Cette démo date d’il y a presque un an et aux dernières nouvelles, ya eu du mouvement dans le laïneupe puisque le bassiste est un nouveau bassiste. Il n’en reste pas moins que cette démo s’écoute d’une traite extrêmement facilement tant la musique est légère et entraînante. Instru (reggaeïsant), In the Park ou Dans la boue (à l’irlandaise), Sténodactylo se sifflent à peine entamés. Les paroles sont plutôt bien écrites, la guitare a un son début 80’s qui pète bien (That’s yer lot, In the Park, No Money) et les voix sont fraîches, un rien rocailleuse pour le chanteur, rien à redire, tout passe aisément (y compris le dépliant photo intérieur), c’est déjà la classe et je dis bravo. On a donc fort hâte à voir ce que tout ça va donner dans un temps proche puisqu’il me semble qu’il devrait y avoir de la nouveauté dans l’air sur Paname…

[Victor]

Mike Hey No More : Pictures of Mike Hey (CD / CDRom MHF 001 ; 2000 ; 43’ ; 13 t.)
Ce CD/CD-Rom conceptuel est l’un des plus beaux sortis cette année. Le groupe a un son extrêmement particulier qui va du garage au rock de camionneur ricain à la Springsteen (pas trop ma tasse de café allongé à vrai dire). L’intérêt est qu’ils sont parfois capables de fulgurances qui prennent l’auditeur entre quatre zyeux, tels Battling Siki (déjà présent sur la compile TOUT A FOND) ou Sexy Bâh Bâr, on est à fond dans la mythologie garage. Les deux dernières plages sont des remixes électro bien cartons, au rythme lent, hypnotique et chaud (notamment Geisha aveugle). En outre, la galette est visible sur ordinateur et propose une illustration en de magnifiques dessins de chaque chanson, sensée représenter la vie possible d’un chansonnier bourlingueur américain nommé Mike Hey et qui vécut dans la première partie de ce siècle. Même si on peut ne pas accrocher à toute la musique, c’est un bel objet que celui-ci, fort soigné et inimitable. Chapeau à ces Montpelliérains pour un tel boulot !

[Victor]

Morgue / Last Days of Humanity : Splitted up for better digestion (EP Evil Bikers Rds ; 2000 ; ’ ; 2 + 4 = 6t.)
Si tu aimes entendre ton lavabo se déboucher ou le chant de l’ours polaire au fond des bois (tu peux l’imaginer du moins), ce disque est fait pour toi. C’est du pornogrind avec toute la purulence que cela implique, des paroles écrite par l’Homme de Cromagnon lui-même (un soir qu’il était bourré ). Je me marre, je me marre mais il n’empêche que je trouve que pour les Gardois de Morgue , ça le fait plutôt bien (notamment le début de Remains in the rubbish chute et la totalité de Deflesh the genitals ) et l’ambiance passe comme une balle dans le cervelet. Pour LDOH qui viennent du pays des tulipes, l’univers est plus trash et convenu, sauf Lugubrious genital miscreation, assez proche par son extrêmisme de la frontière industrielle et par là plus original et réussi. Une goregalette plutôt saignante et ma foi tout à fait ingérable.

[Victor]

Mozerhate / Special Agent Mulder Knows : Ungrateful life (split K7 Pipo Prod. ; 2000 ; 10 + 15 = 25’ ; 8 +12 = 20 t.)
Deux faces, deux styles aussi différents que le bleu indigo et le violet indigo les jours de pleine lune. Comment définir la façon de jouer la musique de Mozerhate ? C’est un crust-punk racé comme un chien bâtard, assez classique mais il existe un titre, Africa, qui tire son épingle du jeu. Bien vu. On retourne la cassette et là, que zieute-t-on ? Pas grand chose parce que ya un con qu’a éteint la lumière et qu’il fait noir maintenant. Au bout d’un certain temps, l’obscurité se fait moindre et, les quinquets grand équarquillés, on parvient à entrevoir SAMK. Et c’est au contraire assez lumineux ce qui réside sur ce côté de la bande car la lumière vient d’Andromède, guidée par la lampe-torche de Michel Tabachnik Tahmer et c’est Mulder et Scully qui sont chargés d’enquêter sur ces utilisateurs d’OVNI. Aussitôt le Congrès Américain téléphone pour leur retirer le dossier puisque c’est une production PIPO PRODS et faudrait voir à pas jouer avec le feu quand même... Musicalement sont ici alternés des chansons à la manière punk-core-sec et d’autres à la crust des familles. Ma préférence va aux premières, qui sont des réussites totales, je pèse mes mots (Cameron Diaz used my toilets, Special Agent Mulder knows, Dental caries, Gnoma Jerzinski, Alcoholic) ce qui montre encore une fois qu’il n’est pas besoin de millions de dollars de studio, de mois de composition arrosée de bourbon et nimbée de coco, de labels suédo-américains et de cotons-tiges Lidl pour produire de la très bonne musique. Je ne sais pas qui chante mais bien le bonjour, quel as ! Et dire que je m’attendais à du n’importe quoi, je suis bien aise de m’être fourvoyé… Remarquons enfin la présence en couverture d’une photo de Bill Pipo lui-même, jeune, à l’époque où la chasse aux comédons était sa principale activité. C’est vendu 10 ou 15 balles pc – le prix d’un Réponses à tout santé et ça soigne bien mieux - à l’adresse de Pipo Mag (en interviou ici-même, bist du glücklich, du, Faulpelz !).

[Victor]

N.C.A. : The final punkdown (LP Mass Prod. / Rural Stella Artois Muzik / Dirty Punk Rds / Morveux Prod. ; 2000 ; 35’ ; 5 t.)
Derrière une couverture vraiment anthologique (mais je vous parle d’un métal top 50 que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître – sauf s’ils écoutent l’animation sonore de la Foire Expo de leur ville), qui plus est labelisée « punk biologique », l’un des groupes phares de la scène bretonne tire sa révérence . Ce LP simple à couverture ouvrante, richement orné de photos de concerts, dont des célébrités . Musicalement, je suis plus circonspect. S’ils arrachent sur scène incontestablement, leur punk-rock pur jus (au sens où ça ne tire pas sur le hardcore ou le crust ni sur l’alternatif ou le mélodique) de pommes, le côté rock se ressent incontestablement beaucoup et pas forcément pour le meilleur. Non que les musiciens soient mauvais, bien au contraire, mais dans l’ensemble, un peu plus de corsé n’aurait point fait de mal et je préférais les anciennes versions de Don’t care et Oïasis (ce tube !). Il reste néanmoins de très bons morceaux tels Get the nazis out (avec la Marseillaise sur un moogophone digne de Walter Carlos) ou l’excellent Under another, qui déchire tout, pour employer une expression rare dans la critique de disque fanzinale. Un bel objet tout de même et qui devrait plaire au public punk-rock pur jus bio (duquel je ne suis pas totalement).

[Victor]

Negative I.Q. : My TV sucks me (EP Emboukan 002 / Crânes Blasés 10 ; 2000 ; 12’ ; 5 t.)
Ces Limousins confirment tout le bien qu’on pensait d’eux par ce cinq-titres bellement fagoté avec insert marbré et tout et tout. La première chanson, éponyme, parle de lobotomisation par le biais de la petite lucarne, dans la lignée Brisons nos chaînes !, sur un tempo enlevé et un style punkcore brut et maxi bien torché. Belle réussite. Même si le tout plaît également dans son ensemble, avec une petite touche de saxophone au milieu du morceau, je suis plus circonspect sur les textes dont le début dénonce la fin ou l’inverse, enfin, bref, on ne sait déjà plus au quatrième couplet à quel message se vouer… ! . La face B comporte trois morceaux dont une fort bonne reprise du non moins goûteux Why be something that you’re not de Negative Approach. American psycho, d’après le bouquin, assez lourd, passe nettement moins à la différence de Society, qui rentre impeccablement sous l’appelation de oi ! core sous laquelle le groupe limougeaud s’autorange. Ce bon disque est assez varié, quoi qu’il en soit, pour servir, me semble-t-il, de prodrome à un album qu’on peut impatiemment attendre.

[Victor]

No Time To Lose : Free Edge Hardcore (CD démo ; 2001 ; 21’ ; 8t.)
Direction Le Mans pour ces jeunes pleins de fougue qui donnent dans le style new-yorkais, avec un titre conceptuel ayant sans doute une signification mais laquelle ?... Non qu’elle soit d’une originalité gigantesque mais leur musique est correctement enlevée et bien cadrée. Certaines compositions valent ainsi le détour qui se nomment USSS, Just try to think (piquetée de cordes mélodiques) et Trust no one (la meilleure, elle arrache le parquet à l’Agnostic). En guest, on peut reconnaître Cindy Lauper sur Slim fast girls, c’est dire si ces gars-là ont les moyen. Le son général ne rend néanmoins pas trop grâce à l’énergie violente dont ils savent faire preuve en concert (le [truc classique] du début en plus ne s’entend pas du tout) mais on comprend les paroles tout de même (sur les deux compos en français). Une bonne démo en tout cas et qui attend la confirmation que ces Manceaux ne sauraient tarder à apporter.

[Victor]

Outface : TV Generation (45 t. Panx PP058 ; 2000 ; 10’ ; 8t.)
Outface est un groupe de Corbeil qui pratique un hardcore encore très proche du punk sur la plupart de ses titres. Musicalement, rien à redire, ça dévaste tout le paysage de tes esgourdes sans prendre de gants. A preuve l’instrumental Adrénaline, brillant et chaud. Je tiquerais juste sur la voix du chanteur que je trouve un ton en-dessous des autres intruments. Mais cela n’empêche que sont très bien enlevés des compositions comme Point de non retour (seul titre en français, je vous laisse deviner la langue du reste) ou mieux The Prodigy (avec une toute fin électronique). Les textes parlent d’un ami, de masturbation, du génocide indien, de l’armée, de la renommée et de la télé (ainsi qu’indiqué). Encore un bon truc dans l’inextinguible catalogue PANX.

[Victor]

Paris Violence : Rayé de la carte (EP Islika Productions n°3 ; 2000 ; 10’ ; 4 t.)
Sous une présentation plutôt jolie, ce disque, assez cher, donne à entendre quatre titres que, pour ma part, ce sera la dernière fois. Je n’accroche définitivement pas à ce chanteur qui fait une chanson faussement énervée en droite ligne du début des années 80 (période permanente à frisettes qui tombe dans le cou à la Vivien Savage), avec pour influence des trucs genre Factory (faux solo métalleux) ou Renaud (dans la diction). C’est basique, toujours la même chose et le chant n’est pas du tout assuré mais comme on n’est pas dans du punk et que de tout ça ressort un air de sérieux, on n’arrive pas au minimum syndical requis pour un enregistrement. Pour les textes, ça parle surtout de déprime adolescente et ce de manière vraiment redondante quand on connaît l’EP précédent Humeurs Noires. On trouve aussi une chanson sur les Russes Blancs sans intérêt et une autre (Service inutile) où se lit cette comparaison effarante de maladresse et consternante, je cite : « Et leurs soit-disants [sic] droits de l’homme n’ont pas empêché la solution finale / On pratique encore les pogroms à coup de battes de baseball dans les couloirs des Halles ». Que le grand Cric me croque si j’ai récemment lu un truc plus ridicule que cette affligeante affirmation. Un disque définitivement rayé de ma platine.

[Victor]

Protex Blue : Muckrackin’ (CD Sauf Imprévu Rds SI005 / Shark Attack! Rds / Small Budget Prods.; 2001 ; 26’ ; 8 t.)
Nouvel album pour ces Stéphanois rouges qui poursuivent leur progression à un rythme soutenu dans un style de rock américain côte ouest marqué d’un léger contre-temps. Ce n’est à vrai dire pas mon style élu que cette musique grand public mais force m’est de reconnaître que ce groupe en vaut bien d’autres outre-Atlantique. La production maison, d’une qualité remarquable, font ressentir toutes les qualités techniques de ces instrumentistes et également la voix ô combien pas d’ici du chanteur ; c’en est à se demander si ce n’est pas John Fogerty de Creedence lui-même qui chante sur le second titre (Drive that nail). Celui qui suit ce dernier (Upset me) n’est pas désagréable non plus. Les textes parlent de violence légitime, des élites déconnectées et de la « haine de classe », tout cela agrémenté de citations (Vaneigem, Nizan et Trotsky - un drôle de zigoto et un drôle de fumier quand même celui-là, pas mon pote en tout cas). L’impeccable livret demeurant dans la lignée des précédentes productions du label stéphanois, c’est un disque qui devrait trouver son auditoire pour un groupe dont j’espère qu’un jour il passera au français vu qu’il semble avoir des choses intelligentes à chanter.

[Victor]

Quatre Degrés Sept : Quatre Degrés Sept (CD Skalopards Prod’z 4D701; 2000 ; 37’ ; 16 t.)
Sous une pochette offrant aux regards des canettes de liquide alsacien à l’état cadavérique et derrière des couleurs d’ensemble criardes et laides (mauve + orange + marron), ce jeune groupe de la région sud, qui n’a pas l’air de se prendre la tête , nous dépote seize titres qui, chose peu courante, vont s’améliorant à mesure que le temps défile. Pour les textes, il utilise au trois quart l’anglais et la langue de Molière pour le reste . Si, à l’exception d’un titre rock et pistolien (Fist & Shout) et d’une petite humeur minimale (A64) le début relève en effet du punk mélodique le plus basique (j’ai horreur de ça et pourtant c’est ici bien tourné), on plonge dans le véritable punk arracheur de macadam à partir de la plage 7 (Let’s go). Je ne dirai pas que c’est super original (punk-streetpunk courant) mais ces gars-là ont la niaque et un niveau de qualité pour leurs compos qui va chercher que le niveau national. Une chanson comme Fist est véritablement carton, le début de What a bourache mérite l’admiration te tu peux t’éclater avec tes amis lors d’une jambon-party avec la chanson Boucherie PPKS qui met de l’ambiance partout où le charcutier tripatouille de ses gros doigts graisseux la chair à saucisse pour les petits nenfants. Les ambiances en fond sont de même fort bien maîtrisées. Le dernier titre est un morceau à la guitare acoustique de deux minutes (un truc à la Bruce pourri, peut-être que les textes sont drôles mais j’y entrave keud) suivi de la minute de silence pour les phacos morts pour le groupe Danone et on termine en beauté avec de courtes mesures de speed bien enlevé. On tient là en tout cas la meilleure prod de ces bourrins de Skalopards avec la compile givrée Ils repasseront près de chez vous. Bois de l’ail or die !

[Victor]

Rapiers (the) : On my mind / Buckleshoe stomp (45t. Larsen LZ 061 ; 7’ ; 2000)
Dure tâche que de chroniquer pour moi ce disque que j’ai pourtant aimé car j’ai hélas de bien trop maigres connaissances sur le son anglais du début des 60’s pour ce faire. Dans le riche texte de présentation, il est fait aux références aux Shadows et, comme cela me parle, c’est à ceux-ci que je me référerais. Les Rapières sont apparemment un groupe revival instrumental des années 80 qui ranima la flamme de cette scène alors déjà vieille de vingt ans et se produisit partout où la Grande-Bretagne le leur offrait. Pas besoin de faire d’effort pour écouter ces deux faces, c’est un pur plaisir tellement c’est bien fait. Le deuxième titre semble un live mais j’ai comme l’impression que c’est un rajout studio d’ambiance de foule car rien n’est à ce sujet mentionné sur la pochette. En plus, ces vieux briscards ont une bonne gueule et par conséquent, si ce son fun d’il y a quarante ans vous plaît, vous ne pourrez être qu’ici conquis ; et c’est bien enregistré, par-dessus le marché.

[Victor]

Rejected Youth : Don’t pick a quarrel with the screwballs (EP Streetmusic Street018 ; 2000 ; 12’ ; 5 t.)
Punk à chœurs du début des années 80, voilà le style de ces Germains (qui chantent en anglais). Etant d’un naturel assez réceptif à ce genre de zique, je n’ai pas eu trop de mal à apprécier ce que ces trois lascars savent extirper de leurs instruments respectifs (batterie à battue et basse assez sur le devant). Crew est une réussite totale, emballé, c’est pesé, et qui lacère bien. Idem pour Fragile, aux refrains rapides et qui en concert doivent enflammer l’auditoire (une très bonne chanson, même du point de vue du texte). Tout ça vaut le détour ? c’est moi qui vous le dit. Un disque imparable.

[Victor]

Résistance (Compilation CD On a Faim ! DO37 ; 2000 ; 64’ ; 17 t.)
Heureuse initiative que cette compilation coréalisée par ON A FAIM !, REFLEX, LE KIOSK, CRASH DISQUES, SKUNK DISKAK RASTAQUOUERE, MALOKA, RAS LE FRONT XIIIE et les défunts UNITY ROCKERS au bénéfice des militants FTP, en procès pour leurs actes anti-FN en P.A.C.A. Le livret, sobre, est un court texte d’Yves Peirat, qui remet son action en contexte. Musicalement, l’orientation principale est aux musiques jamaïcaines par des ensembles français de bonne qualité (Rude Boy System, Jamasound, ASPO, 100 Grammes de têtes, Les Fils de Teuhpu). Dans d’autres styles, on trouve Igor Agar (chanson chansonnière), 20 Minutes de Chaos (punk) et Turtle Ramblers (rock américain middle west – en fait, ici, c’est le batteur des Tortues Baladeuses qui s’est amusé à mixer certains titres de leur album et le résultat se pose là, une réussite). Bref, une cause à soutenir par l’achat (de prix modique remarquable : 65Fpc ou 50 en main propre) et une heure de de bien bonne musique à déguster entre amis et sans modération.

[Victor]

Sensa Yuma : Every day’s your last day (CD Retch Rds RRCD014 ; 1998 ; 40’ ; 14 t.)
Connu pour avoir en son sein un bassiste et un guitariste issus de GBH, ce groupe vaut aussi bien voir plus par lui-même que par cette notoriété par délégation. C’est du punk et du rock anglais pur sauce à la menthe et qui m’a carrément botté (à l’instar de leurs prestations scéniques d’ailleurs). Le premie titre, qui donne son nom à l’album, crève l’écran d’entrée par ses guitares à l’Exploited et ses décrochages d’un ton bandants comme les sauts en parachute sans parachute. Pushed me around évoque plutôt la Côte Ouest, Don’t you say, la guitare rappelle sans blème les Buzzcocks mais le reste du morceau fait plus punk de ces dernières années, tout comme Freedom. Waiting a la couleur d’Attack du groupe déjà nommé, Judgement Day sans hésitation, c’est à Killing Joke (Butcher) qu’il fait penser. Cela continue comme ça sur quatorze titres sans relâchement. Passe en plus la joie qu’on dut avoir les larrons du groupe à enregistrer le tout, nettement perceptible. Que demander de plus ? Ça, c’est du punk, bordel aqueux !
Tout ce qui est dans ce disque, j’ai l’impression de l’avoir déjà entendu ailleurs mais comme ses réminiscences vont chercher dans les coffres à trésor, ce disque est un véritable plaisir de A à Z. Il se clôt sur un léger Yuma Barmy Army, dont le titre référence à Marie-Paule Belle et on apprécie l’hommage, c’est rien que de le dire .

[Victor]

Skadichats : Grève générale (EP Rural Muzik / Rudeboi ! Rds / Stay Rude rds ; 2001 ; 8’ ; 3 t.)
Première fois que j’entends ce groupe mais c’est pas bouleversé que j’en ressors, vingt dieux… Le titre Grève générale d’orientation punk-rock est terne, quant au deuxième, Ras l’front, sur un thème rebattu (ce qui ne veut pas dire qu’il est désuet, le seul truc étant d’user d’originalité pour le traiter), on tape dans le maxi cliché skapop gentil pour ado concerné. Je ne m’étends pas plus loin, je n’ai pas du tout aimé.

[Victor]

Stef & Arno / Los Mutantes / Magnetix / Hero-X : Minimal Squad of Teenage Monster Circus (CDR Neurotic ; 2001 ; 37’ ; 18 t.)
Le MINIMAL SQUAD OF TEENAGE MONSTER Circus est le regroupement de trois à quatre groupes aux formations perméables. Impressionné par ce que j’avais vu des trois premiers sus-cités, j’étais bien curieux d’entendre ce que cela pouvait donner sur support. Eh bien, c’est du tout bon, dirais-je, mon ami. On débute par le duo surf-garage Stef & Arno, furieux s’il en est, et la qualité de ces deux bestiaux de scène est au rendez-vous en trois instrumentaux rapides, une ballade et un garage hispanisant, basse-batterie et thérémin (ah, le thérémin, instrument préféré des Daleks ! [NB : il doit s'agir en fait d'une boîte à écho tout simplement]) le tout de grande maîtrise. Leur succèdent leurs acolytes de Los Mutantes, dans un registre garage sixties où la guitare rageuse éclate dans les nappes psychédéliques d’un orgue endiablé, de cymbales martelées et d’une voix pleine de la poussière ensoleillée des routes américaines. Dans une lignée similaire mais avec une voix nettement plus distordue, et une couleur légèrement plus rock’n’roll début des 60’s, les Magnetix assure pareillement. Pour finir, les Hero-X balancent eux dans une ambiance nettement plus rock voire revival 80 (battue un peu psycho) bien qu’avec un instrumentarium similaire. Il y a un morceau live parmi les cinq proposés mais c’est généralement la teinte qui dénote sur tous ces morceaux. Ce disque, s’il n’est pas l’exact reflet de la folie rock’n’rollesque et vestimentaires dont ces zigotos font montre en concert, est une valeur sûre pour qui goûte ce genre de musique et a plus généralement le rock dans la peau et son énergie dans les veines.

[Victor]

Stef & Arno / Los Mutantes / Magnetix / Hero-X : Minimal Squad of Teenage Monster Circus (45 t. Frat Shake Rds 666 ; 2001 ; 10’ ; 6 t.)
Derrière une déco nettement plus comics superhéros et seyante que le précédent disque, on prend les mêmes et on recommence. Deux titres pour les Hero-X, un instrumental très revival garage 60’s du début des années 80 et un autre morceau chanté bien accrocheur avec des « Wououou ! » qui constellent comme de juste les refrains. Entre les deux se trouve une chanson des Mutantes, exactement dans le style de celles du CD. Face B, on retrouve l’hispanisant Arno accompagné du cosmonaute batteur Stef pour un Felicia mentor tout en liquide fusionnel jailli d’un volcan espagnol de la planète Vega. Terminent le vynil beau comme un jean bleaché deux compos des Magnetix, à fond dans les années soixante avec voix distordue, minisolo de gratte et ryhtme endiablé d’une part, et instru hystérique clos en rires sardoniques de l’autre. Excellent, ya pas d’autre mot.

[Victor]

Les Teckels : Les Teckels (CD Les Troubadours du Chaos LTDC002 / Ouah musique Ouah003 ; 2001 ; 10’ ; 3 t.)
En trois titres (malgré un, live, plutôt moyen), les cabots de Pantruche enfoncent le clou dans la niche streetpunk hexagonale. En effet, et bien que d’aucuns trouveront à redire au fait qu’ils clabaudent en rosbif, Change your mind est un hymne lent et entraînant, jappé sans exagération mais avec la hargne de roquet qui sied au genre. Who’s next ?, un poil plus enlevé, claque comme un coup de langue au fond de l’écuelle, avec une basse aux oignons et une voix parfaitement posée, le tout fort bien servis au demeurant par une prise de son qui a, comme qui dirait, du chien.
On a également une reprise sans doute parodique de Work together des Oppressed [NB : en fait, une reprise d'un classique de l'album à la banane du Velvet Underground, bien joué ! Mais de quelle chanson s'agit-il, serait-ce en fait une mauvaise ?]. La pochette demeure de plus une réussite de second degré, comme à l’accoutumée chez ces ratiers allemands dont on reconnaît la patte (pochette couleur rétro + grain fort agréable au toucher). A mettre illico à la disposition de tous les bons chenils.

[Victor]

Tosca (Rupert Huber & Richard Dorfmeister) : Suzuki (CD G-Stone / Studio!K7;1h, 2000)
Halte au stress! Voici un disque qui devrait être vendu sur ordonnance aux cadres dynamiques en trottinette de La Défense. Tosca nous propose Suzuki, un album 100 % zen, constitué d’une musique paisible, relaxante et avec suffisamment de pêche pour ne jamais être soporifique. Pour le style (aficionados du classement FNAC à vos crayons), on appelle ça du downtempo ou encore du nu-groove. Ce disque, conçu comme un tribute au maître de la méditation zen, Shunnyu Suzuki , est le résultat de plusieurs influences : new age, trip-hop, orientale, sud-américaine, le tout réunis sous un tempo raffiné, toujours revigorant, jamais rébarbatif. Ecoutez cette galette d’argent massif que nous offre Tosca, c’est du très bon et ça nous change des soupes incolores et inodores, style Nature & Découverte, qu’on trouve habituellement sous l’étiquette « Downtempo ». N’hésitez pas à télécharger des extraits qu’on trouve facilement sur le net pour vous mettre l’eau à la bouche.

[Câblé]

 

Stoutness : Neve shalom (CD Nerves ; 2000 ; 19’ ; 4 t.)
Groupe du Nord, Stoutness pratique un hardcore-métal lourd à la Earth Crisis, à touches mélodiques, du plus bel effet. N’était-ce l’inégalité de l’enregistrement (mais le son demeure très correct), on aurait là un groupe avec un impact au disque aussi puissant que les gros du genre. Chant mâle en anglais, recherche de diversité dans les propos (cf. le léger passage toasté à la fin de New Life ou la seconde voix sur Protest), intros bien amenées (djembés ou surtout un prof d’harmonie qui vient engueuler le groupe parce que leurs amplis font trembler les cloisons), je n’ai pas grand chose à redire sur ce court disque sinon que j’attends avec impatience un album entier.

[Victor]

Tromatism : Tromatism (LP Active Four ; 2000 ; 45’ ; 14 t.)
Je ne connaissais absolument pas ce groupe auparavant. La chose qui frappe le plus est la qualité du disque lui-même puisqu’épais comme un double album, coloré à l’intérieur, il dispose d’un livret noir et blanc assez bellement illustré et fourni. Leur musique est une sorte d’alterno-hardcore à chant crié et dont les textes sont anarcho-punk-émo (ce qui sous-entend beaucoup de bonnes intentions dont hélas peu aboutissent, perdues qu’elles sont entre les vilains méchants et les arbres qui parlent). Dire que j’ai accroché serait vraiment excessif, même si un morceau comme Q.H.S. par sa violence m’a bien plu. C’est peu varié, trop uni dans l’ensemble. Quelques chansons se distinguent toutefois telles Vichy Pirate celle qui ouvre la face B – face « Nomad » et qui s’intitule Revanche indienne. Cela ne suffit pas à mon goût pour en faire un bon disque et il est même relativement lassant (cf. un titre comme Mururoa, semblable à du mauvais Téléphone). On est bout du compte quand même un peu déçu.

[Victor]

Up the Grrrl (CD Panx PP062 ; 2000 ; 1h ; 31 t.)
Est-ce que ce panorama est représentatif de la scène féminine punk brésillienne, je ne puis le dire pas car je ne sais pas si celle-là existe en tant que telle, toujours est-il qu’on a là quinze groupes de jeunes damoiselles en t-shirts, pantalons larges et cheveux bariolés (euh, là non, elles ressemblent plutôt à des lycénnes des Yvelines en fait) dont le nombre le dispute à la qualité. On peut également noter que le portugais a une bonne place malgré un bon pacson de contines en angliche comme il est de coutume dans le style. Les deux premiers ensembles, Biggs et Bulima font du punk énervé de bonne trempe, encore plus direct et brut pour Kaos Klitoriano (c’est leur nom !) qui me font penser au meilleur de Rachid & les Ratons. Autre groupe d’excellente tenue, Sandina qui pratique un punk à légère tendance cold du début des 80’s (Respeito), le tout avec une prise de son très roots-pirate et qui rajoute du charme à l’affaire. Celles qui rendent le plus brésiliennes sont les Yolk qui chantent avé l’aççent et nous facturent au final un ska punk super endiablé (Pode Rir). Pour les autres groupes qui m’ont plu dans ce disque brillant, on trouve en vrac : T.P.M (avec un superbe et sombre Walkman et un court morceau strident), les Shes (qui décapent méchamment - Desafio, avec un petit solo de gratte pas dègue et un Surrender plus vénéneux et Beastie) et enfin RTL (rien à voir avec Bouvard et la franchouillardise la plus poissarde, ici c’est du punk-hardcore assez froid à grosses cordes en anglais avec refrains accélérés, on apprécie !). J’ai bien aimé aussi de Toxoplasmose You were bad (c’est vrai mais maintenant je suis à nouveau gentil, pas la peine de remuer le passé !). Le livret ne présente que les photos des jeunes musiciennes, c’est pas désagréable (c’est pas un festival Arlette Chabot, c’est clair, ya même plutôt un côté les filles de l’ambassadeur !) mais j’aurais aussi aimé avoir les textes bien que je ne prétendisse pas pouvoir trop les comprendre (je me débrouille avec l’anglosaxon un minimum quand même mais point trop dans la langue de Linda). Si la couvrante est moche, la carte du Brésil ornée des logos chamarrés des combos, reproduite sur le rond central, saute nettement à l’œil. Une compilation diversifiée, de bien haut niveau et grandement rafraîchissante. Bravo Panx !

[Victor]

Le Vieux Thorax : Seulement blessé (CD Ta Gueule Records TGR006 ; 2000 ; 16’ ; 6 t.)
Cet énergumène de Saint-Germain-l’Auxerrois et qui se réclame sur son site des Specials, de Pantera, d’Herbert Léonard et de l’Infanterie Sauvage, dispense une musique très facile d’écoute et qui puise dans les séries années 60 (avec Robert Conrad par exemple), dans la variétoche moyen-orientale, dans la pop acidulée parodique actuelle et dans l’électronique plus généralement. Playtime et Au bal (avec son sample sidérurgique, son roulement de tambour jamaïcain et sa réplique qui tue « J’ai pas envie de retourner là-bas… » « Alors, coupe du bois et ferme ta gueule ! ») m’ont bien botté alors que Slow Dance ne casse pas les briques. Le duo avec la chanteuse Kara, j’en ferais pas une montagne non plus mais le texte nunucho-absurde fait bien marrer malgré tout, un peu dans le style des Terribles. Ce Vieux Thorax vient de sortir une compilation de ces œuvres précisément en février 2001 qui retrace ces cinq années de composition, de 1996 à nos jours. Avis aux amateurs de vieux thorax et autres poitrines désirables.

[Victor]

Violentopaloff : Let us stand to our glorious dead (EP Panx PP061 ; 2000 ; 12’ ; 8 t.)
La palme de l’humour underground français pour ce groupe de chez Douste qui arbore, outre la mention « Même pas vu à la télé », la photo du sourire niais de Patrick Topaloff sur la pochette violette (retravaillée par l’artiste sino-bavarois Fô Tô Chope pour les ronds centraux) et une famille à l’Otto Dix en quatrième de couverture. Pour la musique, c’est du crustcore de chez Bourrinus, aux paroles chantées en espagnol et en anglais et c’est un peu dommage qu’ils se soient cantonnés dans ces idiomes car, sachant que le bassiste du groupe n’est autre que Bill Pipo lui-même, on aurait aimé se fendre la poire à pas cher et sans dico. Deux compositions ont en leur sein des breaks ska des îles, heureux dans Feliz ciudad, moins dans The Saviour. Ma préférée est celle dont le timbre paraît plus carré et froid, j’ai nommé Cromosoma. Une production tout à fait correcte mais dont on peut espérer encore plus au su du sérieux de ses membres .

[Victor]

Virago : Un instant (CD Vicious Circle / Cinedia Sounds ; 2000 ; 9’ ; 2 t.)
Virago est un groupe popnoise français assez notoire désormais. Comme souvent dans le genre, les textes pèchent par trop de poésie sensible à deux ronds mais on va pas en faire une maladie, le second titre étant en effet un instrumental. Ce dernier (Premier Jour – instru), assez bien ficelé, verse dans l’atmosphérique pesant, ornés çà-et-là de chœurs dark-médiévaux qui gâtent un peu la sauce, tout cela filant vers une noise filmique qui devrait plus plaire au public gothique qu’à celui de la pop. Je ne pense pas que personnellement je retiendrai aucun des deux morceaux mais c’est objectivement bien fait et mon goût n’est pas non plus universel. N’hésitez donc pas à y jeter une trompe d’Eustache (hop !).

[Victor]

Virago : Premier jour (CD Vicious Circle / Cinedia Sounds ; 2000 ; 46’ ; 13t.)
Encore Virago, là c’est l’album entier dont il s’agit. La teinte dominante est toujours la noise. Instrumentalement, il n’y a vraiment pas grand chose à redire puisque tout cela est bien carré, bien professionnel et peu ronflant. Les intros sont souvent belles. Le point faible demeure, las, toujours les textes, adolescents et poétiques à trois sous (c’est pas du Yvon Le Men ou Yves Simon mais c’est pas du Gainsbourg ou Dutronc non plus). Mal-être n’implique pas forcément mal-écrire. Je regrette sincèrement pour une fois qu’ils n’aient pas chanté en anglais ou toute autre langue, cela aurait caché l’endroit où le bât blesse. Outre une reprise périlleuse, translucide et au final complètement à côté de la plaque du Love on the beat du père Gainsbarre, le déséquilibre entre textes et parties instrumentales est la seule chose, mais non négligeable, qui soit négative dans ce disque musicalement tout à fait bien ficelé.

[Victor]

Voices of Belleville : East Side (EP Décadents & Corrompus Skinheads DCS 1 ; 2001 ; 12’ ; 4 t.)
Première sortie discographique à ma connaissance pour ce groupe de la scène oi ! parigote. Outre les traditionnelles photos d’amis typiques du genre, la pochette offre un côté humoristique qui m’a bien fait marrer (photos + l’un des remerciements). Le rond central du vynil (blanc translucide) représente un casque Trojan coloré d’une toile de coude. Pour la musique, c’est du streetpunk point trop rapide, calme et assez sympa (à part Hoolie Hoolie, sur laquelle j’accroche moins) . Les textes sont toujours basés sur le groupe et les amis, le fait d’être skinhead, le taf (vision résignée) et le stade (le moins bon des quatre). Ils sont, notons-le, tous en français. Bref, un quatre-titres assez classique mais qui passe bien quand même, notamment la chanson éponyme. A suivre.

[Victor]

Vömit for Breakfast : Révolution EP (EP Eargrinder Revolution Rds ; 2001 ; 10’ ; 17 t.)
Vömit, c’est le grind qui monte dans le Forez, pourtant une région minière à cette différence qu’elle est de tradition ouvrière. Là, par contre, je les arrête tout de suite : ils ont mis des textes écrits (quoi ?) et c’est vraiment se foutre de la gueule du monde car on n’ entend rien dans le disque ni sur la pochette arc-en-ciel tout noir. Stop ! Gabegie ! Stop ! Remboursez ! C’est vrai, je veux bien l’admettre à mon corps défendant et cependant ô combien huilé, que la couverture est noire et rouge mais ce regain de violence avant… Ils disent faire de la musique de fiotte, moi, je trouve que c’est pas mal dans l’ensemble, il y a 17 titres et en fait y en a deux. Sacré Gérard Majax !

[Victor]

Weda : World is what we do… (CD Démo ; 2001 ; 16’ ; 7 t.)
Cette formation troyenne évolue dans une sorte d’hardcore relativement varié à passages métalliques. Le chanteur possède un organe vocal assez remarquable, du moins dans un genre rebattu par le chant hurlé et où souvent tout se ressemble. La sonorité d’ensemble va de l’émo (Is it Equality ?) au punkcore (Fundamentalist church) et pour tout dire, ça m’a fait penser au son particulier qu’ont les groupes de hardcore latino-américains. Dommage que les textes soient exclusivement en anglais car apparemment, ils ont des choses à dire (classiques dans le genre : mal-être, injustice, obscurantisme). La dernière plage relève du gros crust avec chant de rottweiler à la clef et ça passe plutôt bien. Un essai pas du tout raté pour un groupe qui, je pense, est loin d’avoir tout dit.

[Victor]

Wild news from… frenchy radio punk-rock (split EP Lollipop Rds Lolli14 ; 2000 ; 12’ ; 7 t.)
Le titre peut dérouter vu tout ce qu’on peut mettre sous l’appellation “punk-rock” à l’heure actuelle (tu peux y trouver tantôt Gastéropode Killers, tantôt Burning Heads tantôt Pinette, on ne sait plus à quel saint se vouer sinon à celui de Lolo Ferrari car ya de la place pour dix et ça, c’est toute la différence ). Il s’agit de fait ici d’une compile à dominante garage-punk pur sauce moutarde avec chant rosbif de chez Danone. L’inventaire maintenant : les Gasolheads présentent là le meilleur titre que je leur connaisse (garage punk for ever). Jerky Turkey tape dans une sorte de truc à la Devo (cf. Come back Jonee) mais moyen dans le fond. Sonic Assassins et Machine Gun Kelly balancent eux aussi du garage-punk bien moulé dans son jean trois taille en dessous et qui déboule à … à l’heure dans les enceintes. Voilà pour la face « Super5 Renault » (authentique !), passons maintenant à la face « Deuche de chez Citron ». Sugarfix de Marseille donne par contre dans un punk-rock français classique (ça me laisse de marbre), contrairement à Exxon Valdez qui fait son show nitro en une minute trente et j’adore ça. La fin est réservée aux compatriotes de Claude Nougaro , Jerry Spider Gang, rockers patentés mais pour moi pas tentants bien que tout cela soit bien exécuté. Je donne une note particulière à la pochette, si vous me permettez , qui d’un mélange de couleur so seventies (rouge et lilas) fait resurgir du fond des âges une Ami 6 première génération comme découpée dans le journal. Le mec qui a fait cette pochette (il s’appelle Smosh apparemment), eh ben, y en a qu’on du goût et qui le montrent. Chapeau l’artiste !

[Victor]

Youth Gone Mad : Oompa Loompa (CD Panx / Posh Boy ; 2000 ; 25’ ; 10 t.)
Pour m’être – et c’est rien que de le dire- emballé sur l’album Pollenate, un des meilleurs de la décennie, varié et avec un esprit punk comme pas permis, j’avoue ne pouvoir cacher ma grosse déception, pleine d’épanchements lacrymaux, à l’écoute de ce court album 10-titres (une quarantaine à mon souvenir sur Pollenate!). J’ai eu comme l’impression que ces barrés d’Amerloques d’YGM jouaient à sembler eux-même, d’où une douloureuse impression de factice à l’arrivée. Ça démarre par un ska enlevé (Inventory) mais les deux morceaux suivants sont carrément palots de la face. Et encore c’est rien rapport à la ballade finale nunuchognangnante (tout le monde s’appelle pas Calvin Russell) ou à Hop around (chanson rock digne des pires Ramones pop, avec d’ailleurs en guest DeeDee Ramone, l’homme des participations aux hommages à lui-même, plus à l’aise par ailleurs sur Mental Patient). Pour le reste, c’est quand même pas l’œuvre de manchots et ce groupe demeure original. Une petite bombe comme Glad that you’re gone se laisse ouïr de manière jubilatoire (hélas suivie d’un remix dont je me demande encore l’intérêt) et l’intro de Basketball Ballet témoigne de toute l’inventivité du duo d’outre-Atlantique. Moi qui avais de plus tant apprécié écouter la demoiselle chanter sur Pollenate, il m’en a cuit de ne pas l’entendre sur l’enregistrement (peut-être qu’elle préparait les sandwiches ou qu’elle garait la caisse sur le parking, va savoir). Le très bel emballage couleur, tout d’images 3D oniriques, décape bien, personnellement j’eusse mieux aimé que ce fût la musique, dans ce ratage d’un ensemble pourtant à l’accoutumée si inspiré. Impérissable n’est pas le mot en effet...

[Victor]

 

Le pote de ma sœur est un petit con. Vingt deux ans, il se la frime, il bosse chez LABELS, maison de disques parisienne, soit disant par lui de bon goût, en tout cas plaisante aux oreilles bien molletonnées de trentenaires amateur de rock américain sans larsens ni Bud, d’électronique qui fait tic-tic tsss-tssss ti-ti ahhh pffff - de préférence provenance nordique ou germanique ; une boîte belle gueule logée Place des Vosges aux frais d’une princesse pas vierge en dot consolidée VIRGIN. Et l’autre, du coup, se pense en droit de la ramener.
« Tiens, ce week end j’ai un plan pour squatter au passage la tournée teutone de TOM MaC RAE. C’est Marion de chez ARISTA qui m’invite. J’emmène ta frangine : java à Berlin le samedi et fiesta le dimanche à Sarrebruck . Tu l’as vu l’autre au JT de la deux, c’est de la balle ce mec. Budget promo en exponentielle et car climatisé aux pneus neufs. Faudrait que je me place sur le gus. On décolle dans deux heures »
Il peut vraiment pas s’empêcher de se la taper ce beuh à puma peau de vachette tendre. Tu parles, il est à la promo radio et vit dans l’angoisse métaphysique de se faire jeter d’ici la fin du trimestre. Du coup il se la pète un cran au dessus de son ordinaire confiant.
« Je te laisse les clef de l’appart pour la bouffe des chats de ta sœur. Trois boîtes de Friskies sur la machine à laver … et à coté y a même une invit deux personnes pour EIFFEL ce soir au Losange rouge. C’est sold out… »
Il me prend décidement pour un cave qui sait pas où zoner ce soir. Encore moins avec qui…

Il est puant mais bien informé. Ca ne se bouscule pas les projets exaltants en cette fin d’après midi.
Je passe chez ma frangine donner le change à ses chats.
Je prends l’invite à la dérobade. C’est peut être un piège à encore plus con que lui que m’a tendu le gredin. Et hop, il surgit de derrière le paravent japonais. Il a le regard sardonique, la vanité satisfaite de mon indignité. J’en tremble, je l’imagine rayonnant. Pour me détendre et me déculpabiliser de mon avilissante tentation, je pose le scud de EIFFEL dans sa platine question de trouver ca sympa. Maniérisme vocal bien chauffé, arrangements soignés de quelques cordes timides et claviers soyeux. Ca a l’allure d’un rock belle gueule, bouffi de mélodies sucrées et de mots qu’on a juste pris de le temps de faire sonner ensemble. Une reprise bien sentie d’un texte de Vian, Je voudrais pas crever . Je comprends mieux la filouterie lorsqu’un jour de crachin intégral, moulé dans son moelleux canapé Arrivetz, il a balancé tout de go à ma sœur « tu sais, il ya un texte de Vian qui dit tout de toi » et le voilà parti dans une récitation de premier de la classe du dit texte. Femme en pamoison.
Des guitares disciplinées avec un je ne sais quoi de mauvaise graine, la sauce me prend sans trop d’efforts hypocrites. Dans son Note Book de chez MuJi il a grifonné « EIFFEL 1er album Apricotine ; catégorie Adult Rock ; unique signature de Labels cette année ; ex Oobick and the Puck ; 1er single apricotine et quality street ou renverse moi à définir réunion du 17 » ; Il a dû se taper la bio à faire ce larbin. (../..)

Salle à craquer de pépettes en paillette et de VIP en goguette. Une heure plus tard je noie mon désespoir et mes remords au bar. EIFFEL est bombé d’energie timide, tiraillé entre les contines de son enfance et les fureurs de son adolescence (les insupportables titres poppunk de leur repertoire d’avant avoir grandi ). Un truc un peu comme une évanescence. Pas envie de rentrer chez moi, velleité de reculer la constatation de l’affront. Il aurait en plus réussi à ma faire passer une soirée sans plus de joie qu’il ne m’en aurait eté promises enfermé dans mon home sweet « canaptélé ». Alors il serait pas si con que ça. Une pépette paillette qui doit être abonnée à Magic ! me fait de l’œillade. Infini espoir.

En quelques minutes, elle me met au jus de sa périlleuse existence. Ecole privé Trucmuche, papa a un patrimoine , maman du temps et elle, plein de belles promesses à gâcher. En fond musical se déroule une jolie musique anglaise vraisemblablement. Black Box Recorder, me jete le barman. Plus tard, j’acheterai ce second album du trio où cocoone Luke Haines, l’auteur de feu The Auteurs, le pistolero des suicidés Baader Meinhoff, aujourd’hui ressucité aux cotés de John Moore et Sarah Mixey dont la voix veloutée se love à merveille dans les écrins pop des deux chefaillons. Aujourd’hui encore, quand par quelque hasard j’écoute cette galette The fact of life, je sens ses yeux ronds sur moi, je touche ses lèvres souples, menues et en lignes douces.
Pas fier d’enmener ma conquête chez ma frangine, mais comme il habite aussi ici, ça me soulagerait de l’emballer chez lui, comme si j’etais lui. On exorcise avec les moyens du bord.

On monte dans la caisse de mon abeau(f)minable pour aller s’en siroter un petit dernier chez ma sœur – ’avais négligé de vous informer que sur le frigidaire, à coté de la machine à laver aux trois boîtes de chat, traînaient une paire de clés de sa Ford K. Je pousse un laser chopé d’une main ignorante par ma promise d’un soir. The Satellites : Our very bright darkness. A croire que l’ignorance est une grâce quand elle rencontre le hasard.
L’avenue est large et dégagée, les lumières scintillent dans les vapeurs nocturnes de la ville. Ca commence par It’s a joy, trois minutes incandescantes et évidentes. Elles nous transportent crescendo ; ma monture et moi. Elle, flippe sans le montrer. Le second titre calme mes ardeurs. Un œil sur la route, l’autre sur le livret, les oreilles papillonnent. Le quatuor est espagnol, de Palma de Majorque –un peu comme si Virago nous venait de Corse - mais l’album est mis en boîte à New York, Babylone des guitares abrasives, d’un rock accouché sur le macadam fumant. La demoiselle n’apprécie pas le grain sale et l’air sombre.

Nerveusement Open/Close et j’enfile l’air assuré, après tout je suis censé être dans ma voiture, cachetonner dans une boîte trendy, bouffer du disque au kilomètre, L’œil extatique du groupe Lazzi. Je limite la casse : « Je viens juste de le recevoir, pas encore eu le temps d’y jeter une oreille ». Décidement l’ignorance est une source de joie. Cette pop acérée aux élans électriques et arrangements baroques me séduit. Pas de formules déposées, des textes mordants et fins, un premier album hexagonal qui semble rassurer ma miss noctambule, le sourire au coin des lèvres sur leur titre Les lunettes carrées.

Dans le salon, la belle s’installe comme chez elle, bien plus que moi, mon corps mal enchassé dans cet espace mentalement hostile. Trouver un truc branchouille, un peu abscons, question de lui suggérer la bienveillance que je lui concède en la laissant le séduire. Un disque tout rouge traîne dans le foutrac du salon : Pan Sonic et sa biographie à côté. Un regard affûté balaie le document salvateur : duo d’Helsinki / fabrique leurs propres machines / électro minimaliste / titre Aaltopiiri sur le label référent NOVAMUTE etc…. Et en plus c’est un disque estampillé LABELS.
« Tiens voilà un truc sur lequel je bosse »
Les deux tripatouilleurs jouent sur des modulations infimes, sur des silences et des incidents répétitifs, ça crache, ça poque, ça suinte…D’une oreille tendue, j’apprécie cet univers sonore tandis qu’elle me baratine sur la chance de bosser à LABELS, qu’elle en rêverait. « File-moi un cv, je te recommanderais » Décidement ce soir je suis royal.
On siffle la bouteille de brandy, tout ce qu’il reste dans son putain de bar de curiste en eau plate ; Aaltopiiri m’emporte dans sas flux, elle, ça l’indiffère jusqu’au moment, où trop saoule, la musique de Pan Sonic force les portes de son cerveau, lui fait pincer les lèvres et s’excuser : « Ça me stresse ton truc. Je dis pas que c’est pas bien mais c’est pas le moment »
Voilà l’affaire est dans le sac et la belette sous le charme ; je suis un mec prescripteur de bon goût, qui se moque de la tendance -et encore plus du mainstream- mais qui du coup finit par l’être sans le chercher. Finalement ca me botte de travailler chez Labels.
Magnanime, je me dresse pour soulager ses oreilles immatures. Dans la discothèque, je sais que traîne le dernier Mogwai Rock action. J’aime bien ces cinq gars de Glasgow. « C’est mon alter ego de chez PIAS qui me l’a filé » me souffle-t-il le jour où il me voit zioter l’engin « Je te le graverai …quand j’aurai le temps » Depuis je l’ai acheté. Autrement dit je suis en terrain connu avec ce troisième album du groupe certes un peu court en bouche avec ses 35 minutes et 4 véritables titres.

Elle aime, je le sens ; 23h42, le téléphone s’énerve. Elle est déjà trop bourrée pour ne pas décrocher. Aussi je lui arrache dans une fulgurance qui la cloue au silence.
« C’est Fred. Marion, c’est toi ?» Je reconnais mon beauf spectral et là, sublime connerie : « Non Fred, c’est David. Tu as dû te planter de numéro. Je passait juste donner à bouffer aux chats » « Si tu n’as que ca à glander à cette heure ! ! ! j’ai dû effectivement me mélanger les pinceaux – quel con ! » Et moi donc « Tiens pendant que je te tiens, mates sur mon bureau, il y a un disque tout blanc. Dis moi le titre de cet album » Autechre « Non, ca c’est le groupe, vises la tranche pour savoir » Confield « Ah, je savais que c’était ca et pas Comfield comme le soutient depuis une demi heure Julie de SOURCE [Note d’Ixel : autre mioche aggrippé aux seins gras de la princesse VIRGIN]. J’allais quand même pas perdre le pari, en plus leur album est inaudible. Merci pour la satisfaction et à plus »
Je suis laminé pendant que Mathilde sort du canapé, titube sur place, et finit par retomber à la même place. Elle roupille la garce. J’ai quand même pas compromis mon orgueil et ma réputation pour qu’une greniasse cuve au chaud et en tout bien tout honneur dans le sofa de ma frangine et de son ineffable. Autechre, inaudible. C’est le moment parfait pour lui parasiter son décolage à mon endormie. Les rythmiques hachent menu, les compositions sont abstraites, fuyantes comme mille billes d’acier qui coureraient, sautillantes, en tous sens sur un carrelage blanc. J’appelle Fred en java à Berlin « Je suis en train d’écouter Autechre, c’est de la balle » « Ah oui ,ca te plaît…Ça m’étonne pas t’est un peu perturbé comme garçon et un peu bourré ce soir aussi il me semble. C’est leur sixième album a ce duo de Manchester et ils sont de plus en plus barrés. Avant c’était de l’électronica déjà perturbée mais là on dirait de la musique cotemporaine » Je suis juste capable de lui répondre qu’il a raison et que j’aimerais bien bossé dessus. Il rit et savoure d’être ce qu’il est. Faut que je raccroche.

Elle ne bouge pas ma princesse de la Dive Bouteille. Pas une onde de spasme, de tremblement, Autechre ne la trouble pas. Elle est morte.
Je divague. Me traîne jusqu’à la chaîne Luxmann comme un cul de jade, le fond de brandy à la main. Stoppe. Et ca repart. La voix capiteuse de Jennifer Charles joue les sirènes dans mon âme en dérive. Je plonge. Elysian Fields, je vois que ça s’appelle sur la pochette pas belle qui gît à mes pieds. Elysian Fields. Moi c’est la clef des champs que je devrais prendre, mais je suis trop anesthésié d’alcool ou enchaîné aux charmes simples et vénéneux de cette musique, les deux allant de pair.

Reveil. Mathilde n’est plus là. Tant mieux. Je croule sous la honte et l’épuisement du soûlard. Elysian Fields. J’ai l’envie d’aller fumer une clope place des Vosges. En partant, je marche malcontreusement sur un boîtier qui me coupe le passage, le compact se brise sous mon talon. Je me baisse et prend le cadavre : The Expérimental Pop Band The Tacksuit trilogy (CITY SLANG/ LABELS). Je m’en fous et prend la porte la cigarette déjà au bec. L’ignorance n’a pas souvent la bonne main.


BLACK BOX RECORDER / The Fact Of life (NUDE-BMG)

L’avis de Fred : j’écoute pas trop la concurrence
L’avis de Mathilde : j’avais les oreilles qui bourdonnaient apeès le concert de Eiffel
L’avis de David : bel album de pop gracile
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh

THE SATELLITES / Our very bright darkness (PRIMEROS PASITOS-POP LANE)
L’avis de Fred : Pop lane. Connais pas.
L’avis de Mathilde : c’est du heavy métal ce truc
L’avis de David : un rock urbain, sombre et mélancolique
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh

LAZZI / L’œil extatique (B POURQUOI B-NAÏVE)
L’avis de Fred : trop arty. Ça marchera pas
L’avis de Mathilde : j’aime bien le single les lunettes carrées
L’avis de David : surprenant premier album. Une vrai richesse d’arrangements.
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh Miaouh

PAN SONIC / Aaltopiiri (MUTE-LABELS)
L’avis de Fred : duo d’Helsinki …euh…electro minimaliste…euh… prix de gros hors taxe 59 frs…euh…
L’avis de Mathilde : c’est intéressant mais ça dépend des moments
L’avis de David : captivant
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh Miaouh

MOGWAI / Rock action (SOUTH PAW-PIAS)

L’avis de Fred : pas encore écouté. C’est un exemplaire promo. Faudrait que j’enlève le blister
L’avis de Mathilde : j’aime bien ca me fait penser à Placebo en plus calme et sans paroles
L’avis de David : j’aime bien ca me fait penser à Labradford en plus rapide et avec paroles
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh

AUTECHRE/ Confield (WARP-SOURCE)
L’avis de Fred : moi, je suis plus rock
L’avis de Mathilde : jamais j’ai entendu parler pourtant ca me rappelle quelque chose…
L’avis de David : des fois quand j’aime bien me faire du mal, alors j’aime bien ce nouveau Autechre
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh

ELYSIAN FIELDS/ Queen of the meadow (FLOWER SHOP-POP LANE)
L’avis de Fred : Ah oui, POP LANE. Ça me revient. Je connais. C’est ceux qui distribuent Daytona.
L’avis de Mathilde : j’amais j’ai entendu parler pourtant ca me rappelle quelque chose…
L’avis de David : confirmation de l’immense talent du groupe new yorkais et de la séduction de sa chanteuse qui nous ferait presque oublier Hope Sandoval des pleurés Mazzy Star.
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh

THE EXPERIMENTAL POP BAND / The tracksuit trilogy ( CITY SLANG-LABELS)
L’avis de Fred : J’adore.
L’avis de Mathilde : jamais j’ai entendu parler et ca me rappelle rien…
L’avis de David : Davey Woodward et sa bande nous scotchent avec cette pop mouvante, désinvolte et surdouée. Le tout est produit aux petits oignons par John Parish. Un grand album.
L’avis des chats : Miaouh Miaouh Miaouh Miaouh

 

 

 

 

 

 

 

[toutes de V.]

Pains, tulipes et fantaisie (Silvio Soldini, 2000 [2001])
Malgré un titre très nul (dans le genre, c’est à peu près impossible à battre ), voici une très heureuse surprise que ce long-métrage italien qui nous promène de Lucanie aux Abruzzes et à Venise et enchante véritablement. Le scénario est peu ou prou semblable à des histoires comme Wanda de Barbara Loden (un must marquant mais plutôt sombre) ou Le Lièvre de Vatanen de Paasilina. C’est l’histoire d’une mère de famille occidentale type qui est oubliée sur une aire d’autoroute par le car de voyage organisé qui transporte son mari et ses deux enfants. De truculents personnages animent toute l’affaire (le vieux fleuriste anar dingue des nihilises pétersbourgeois, Fernando [Bruno Ganz, génial acteur], le gros plombier fringué comme Inspecteur Gadget, la masseuse holistique) mais la meilleure est l’héroïne (Licia Maglietta, que je n’avais encore jamais vue) qui est à quarante-cinq piges d’une sensualité t’en fumes, toujours le sourire aux lèvres, un peu comme Gena Davis mais en moins apprêtée et vulgaire comme le sont les Américaines généralement. Cette Italienne rayonne sur l’écran et, comme le réalisateur manie la caméra de manière plutôt humoristique (le nombre de plans grotesques : l’obèse braqué avec un tromblon de Caporetto et qui cause à sa fiancée munie d’un rouleau de PQ en extension ; la poursuite à la Troisième Homme sur la placette vénitienne). Venise irradie, elle aussi, sa beauté une bonne partie du film avec , tout l’inverse d’une vue touristique comme dans Woody Allen ou d’une évanescence mortifère comme dans Visconti. L’ensemble fait un tantinet penser à Kaurismäki bien que les Transalpins soient largement plus babillards que les Finlandais chez qui un confetti suffit souvent à faire tenir les dialogues. Un grand bonheur qui devrait, je pense, bénéficier d’un bon bouche-à-oreille tant il est de nature vraiment populaire.

L’Ile (Kim Ki-duk, 2000 [2001])
Une muette (Suh Jung) tient une entreprise peu banale : elle s’occupe de l’entretien et de l’approvisionnement en bloc électrogène et alimentation de maisonnettes flottantes sur un grand lac retiré de Corée où viennent pour de plus ou moins longues périodes des pêcheurs du dimanche. Toujours des hommes. De temps à autres, des putains viennent faire des passes pour les îliens volontaires en mal de dégorgement. Un jour vient un homme qui a un je-ne-sais-quoi qui le rend mal dans sa peau. Le matin la brume recouvre l’onde et le soir, la nature reprend ses droits. C’est un étrange film que celui-ci, basé sur l’amour contrarié et sexuel, le monde de l’hameçon et celui de l’eau. Un monde très silencieux mais où la tension ne cesse d’être présente. Certaines scènes vont assez loin dans le domaine de la blessure qui est ici récurrent : je pense à celles, sanguinolentes, des quatre hameçons dorés et surtout à celle du sushi qui est à vous dégoûter si vous ne l’étiez déjà d’aller un jour pratiquer cet art de merde qu’est la pêche et qui est pourtant bien moins décrié que la chasse puisque plus silencieux et concernant des êtres taxonomiquement si loin de nous qu’on ne peut leur accorder l’idée de souffrance. Couleurs et lumières des éléments sont particulièrement bien rendus et les angles de vue parfaitement pertinents. Un long-métrage fort original qui s’apprécie.

Merci pour le chocolat (Claude Chabrol, 2000)
Bon cru que le Chabrol de cette année qui, sur fond de Suisse bourgeoise et chocolatière et musique pour piano du XIXe (Liszt, Chopin), peint un mélo qui vire rapidement au thriller psychologique, grande spécialité du réalisateur. Par son sens de l’image et de la progression de la caméra, le célèbre réalisateur prouve qu’il ne perd pas la main et je ne parle même pas de l’aisance de la narration qui, quand elle faiblit un poil, est emportée par l’interprétation. Une interprétation remarquable d’où ressort surtout Isabelle Huppert, sensationnelle et jamais aussi bonne que quand elle incarne un personnage fêlé psychologiquement de partout (La Dentelière) ou très fort d’apparence (Loulou, La Cérémonie), les deux aspects étant ici réunis. Elle coud sur son entourage, mais aussi littéralement, une toile d’araignée et un symbolisme qui chez d’autres serait à deux balles sait ici prendre une forte valeur. Le jeune acteur qui fait le fils de Dutronc (Rodolphe Pauly) détonne comparé à ceux qu’on a l’habitude en France de voir à l’écran et Dutronc lui-même, avec un sacré coup de vieux sur le coin de la poire, demeure toujours un grand interprète, spécialiste des âmes artistes fragiles et presque névrosées (cf. L’impossible, c’est d’aimer, de Zulawski). Cela fait plaisir à voir.

Bread & Roses (2000, Ken Loach)
Le nouveau Ken Loach n’est pas le meilleur mais demeure toutefois tout à fait correct. Il évite, même s'il manque parfois tanguer , l’écueil de la sucrerie politiquement correcte de Land & Freedom mais ne parvient pas à atteindre le niveau génial de Riff-Raff ou de My Name is Joe. L’intrigue est basée sur la révolte syndicale de travailleurs ménagers exploités car d’origine étrangère et plus ou moins illégaux dans leurs statuts. Les scènes de tension sont assez admirablement menées et (est-ce volontaire ?), l’héroïne n’est pas si belle moralement qu’elle tend à vouloir le montrer ; idem pour le jeune militant syndical acharné (finement joué par le très en vogue Adrien Broody). Transparaît bien dans ce film la contradiction du combat des travailleurs : s’unir, c’est avoir plus de force, s’unir, c’est aussi remettre sa force à quelqu’un le syndicat qui peut s’en prévaloir à bon escient mais aussi pour son propre usage voire contre ceux qui la lui ont donnée. Le fait que la lutte se situe aux Etats-Unis empêche par contre de comparer avec l’Europe où les choses n’auraient peut-être pas eu le même développement vu que les façons de procéder ne sont pas les mêmes. Un bon film quoi qu’il en soit.

Mundo Grúa (Pablo Trapero, 1999)
Sujet peu commun que celui qui peint un bonhomme de 49 ans qui cherche du taf, ancien bassiste d’un groupe local connu des années 70, partagé entre son fils, guitariste de rock et loulou feignasse, et son amoureuse de cinquante berges qu’il a connue en lui réparant le rideau du kiosque où elle se morfond toute la sainte journée au pied des grues inhumaines qui reliftent le paysage urbain pour encore mieux l’amocher. Tout en noir et blanc, il est mélancolique à l’instar du film en général et même de Buenos Aires où se situe l’action . Un Porteño pas triste ni gai (admirablement interprété par Luis Margani) dont la vie ballotte le gros bidon sans récompense la gentillesse. L’image est très particulière, granuleuse et renforce cette impression marquée de nostalgie et de je ne sais quoi de pincement à l’âme dans un noir et blanc bien senti. Le dépaysement final accentue encore cette atmosphère et le vague à l’âme d’ensemble. Pas étonnant que ce film ait été l’événement cinématographique de l’année à sa sortie.


Ring (Hideo Nakata, 1998 [2001])
Ce film japonais qui a connu dans son archipel un retentissant succès est un film d’angoisse type, qui joue sur la corde et celle du thriller et sur celle du film de fantômes. La réalisation et l’éclairage, les effets et la musique sont tous réussis. Les effets demeurent classiques (montée des cordes à la Hermann, soudaineté de l’image crainte, etc) et pour certains sont même inventifs (scène de la télé finale, déclenchement de la même au début, démarche saccadée du fantôme). Si le premier quart d’heure scotche d’effroi et de tension vraiment habilement, je n’en dirais pas autant du reste car le montage n’évite pas les longueurs, les acteurs ne sont pas sensationnels (mais l’héroïne est jolie !) et surtout le scénario, à vouloir courir trop de lièvres à la foi, s’égare un peu (maintes incohérences scénaristiques émaillent ce long-métrage : K7 VHS en 57, pouvoir limité de Sadako face à son père, micmac de l’éruption, facilité d’enquête déroutante et shining un peu trop du style « Tiens, j’ai envie d’être beaucoup extra-lucide en ce moment ». Ç’aurait pu être beaucoup plus riche et effroyable, cela reste tout de même très effrayant et la fin est amorale à souhait (au point qu’on aurait pu souhaiter qu’elle soit mieux amenée et nous laisse exsangue)..

Amours chiennes (Alejandro Gonzalez Inarritu ,2000)
Un des films de l’année 2000, sans conteste. Ce triptyque époustouflant – ya pas d’autre mot - nous arrive du Mexique. Dès les premières images, on est cloué à son fauteuil, c’est incroyable, et on rentre dans le film sans s’en apercevoir, happé. Deux frères d’un faubourg pauvre, triste, gris et sanglant de Mexico dans une première histoire, l’un d’eux petit caïd, l’autre beau comme la passion qui le dévore et la puissance de son rottweiler. Des combats de chien, des caisses qui crachent le bitume, du soufre amoureux, voilà la première partie qui m’a à vrai dire proprement laminé. Qu’on pantèle aujourd’hui à ce point par le fait du montage et d’un scénario en béton armé, c’est franchement rare (des coups de fouets comme ça, faut que je remonte à My name is Joe, Garage Olimpo ou Breaking the Waves, pour vous donner une idée de l’ambiance… !). La deuxième narration est celle de l’idylle entre Valeria, un mannequin-vedette, sorte de Claudia Schiffer du pays des sombreros, et Daniel, un journaliste décideur en vue : au lieu d’une bluette à l’Arlequin, on bascule dans la psychose la plus malsaine et là encore, chapeau bas, même si le rythme est plus lent, tout demeure passionnant. Enfin, troisième et dernière part de cette œuvre capitale, le destin meurtrier et familial qui rattrape El Chivo, un clodo entouré d’une horde de bâtards clabaudeurs et faméliques. Là encore, la mise en scène scie par son inventivité, la lumière de ville polluée de Mexico est saisie à merveille, une ville où pauvreté la plus sordide et richesse la plus ostensiblement marquée nagent côte-à-côte dans la plus grande violence libérale. Ce pur joyaux, courez-le voir s’il passe encore chez vous ou chopez-le en vidéo (le cinéma, c’est mieux quand même pour ce genre de spectacle), vous en serez pour trois heures et demi de palpitante délectation.

Liberty Heights (Barry Levinson, 2000)
Chronique de l’Amérique (côte est) des années 50 avec des Juifs, des Noirs et des WASP selon la sainte partition communautaire américaine. Le film est basé sur le fait que la jeunesse peut un temps faire fi de ces barrières raciales dont les valeurs familiales interdisent le dépassement. De ce point de vue-là, il est plutôt pas mal même si ça laisse grandement sceptique sur l’Amérique d’hier et d’aujourd’hui (c’est un secret pour personne). L’amour entre le petit israëlite et sa labadens noire (un canon, tes yeux font vingt fois le tour de ta tête !) reste ce qu’il y a de plus de beau dans l’œuvre, et Adrien Broody (le grand-frère juif amoureux) que l’on voit beaucoup en ce moment prouve là encore la hauteur de son art interprétatif. La scène du concert de James Brown passe également plutôt bien car on voit combien à l’époque cet artiste génial était ghettoïsé à un public noir . Une honnête production qui se regarde sans déplaisir.

Lumumba (Raoul Peck, 2000)
Evocation historique du plus célèbre Congolais de l’histoire, Lumumba reste sage dans son déroulement. Cela n’en demeure pas moins un film de qualité. Toute la période de l’indépendance est ici assez exactement restituée, avec les infortunes et tracas de Patrice Lumumba (fort bien joué par Eriq Ebouaney)avec la police du colon belge, sa victoire après le soulèvement de ce pays gigantesque contre l’occupant et le fameux discours du leader indépendantiste du MNC qui, niant le prétendu apport de la Belgique au Congo et l’amitié des deux pays, fut en direct un camouflet colossal au roi des Belges, cette salope de Baudouin, lequel, rappelons-le, tenait le Congo-Kinshasa grosso modo en tant que possession personnelle et héritage de son grand-père Léopold II. La seconde partie qui vit la tourmente emporter le pays, savamment entretenue par l’ex-métropole, les Français et la CIA. CIA qui finira par organiser en 1960 la chute de Lumumba au profit de son ancien ami et chef de l’armée depuis l’indépendance, le général Mobutu à la triste mémoire. Sa mort (1961) et la fidélité à ses idées progressistes en font l’une des figures majeures du XXe siècle, une des rares dont l’aura ne s’est pas assombrie. Peck tente de demeurer objectif, non sans brider sa liberté de créateur, mais cela lui permet de donner des scènes saisissantes (la scène de l’arrestation de Lumumba sur la berge, la première scène avec les barbouzes belges dans leurs basses œuvres). Certains passages font étrangement désuets et théâtraux, comme filmés à l’époque, avec l’orchestre qui joue devant la buvette la célèbre chanson de l’indépendance. Je ne sais par contre si le film est parfaitement compréhensible pour quelqu’un qui ne connaîtrait goutte à l’histoire africaine et zaïroise en particulier, d’autant que l’indépendance de l’ancienne colonie belge fut l’une des plus violentes et atroces qui puissent être (comme purent l’être celles de l’Algérie ou du Mozambique et de l’Angola). Mais on ne peut se plaindre de voir de tels sujets abordés, vu le peu d’amour que porte à l’Afrique l’économie cinématographique mondiale…

L’Obscénité et la Fureur (Julian Temple, 2000)
Les Sex Pistols sont connus de chacun comme l’incarnation même du mouvement punk que l’on résume souvent à eux ou aux punks à chien, pleins de piercing et de vêtements déchirés, qui dorment dans des vapeurs éthyliques aux abords des gares ferroviaires européennes. L’impact qu’eut ce groupe est phénoménal et d’autant plus fort que, contrairement aux Beatles par exemple, ils ne durèrent que deux ans, deux ans et demi grosso modo, pineutce quoi ! Le documentaire est très bien monté puisqu’il remet en situation la naissance du groupe par des vues de la situation sociale anglaise de l’époque et des merdes musicales sans nom que les gens devaient enfourner dans leurs trompes d’Eustache à l’époque (et dont le cours n’a jamais cessé de toute façon !). Le babacoolisme des familles frappait fort sous les couleurs criantes des spots de shows télévisuels. Puis l’histoire est connue : milieu des Beaux-Arts, Lydon le glandeur allumé, la boutique Sex de McLaren et Westwood, les premiers concerts et l’étincelle au tonneau de poudre qui fit péter le rock comme il n’avait et n’a depuis jamais explosé. Un rock dans son aboutissement intrinsèque de défoulement de la jeunesse et de subversion totale du système. Les quatre pistolets parlent dans une ombre voulue de ce qu’ils étaient à l’époque, en contrepoint des différents propos d’alors. Le montage est particulièrement habile qui ne donne à écouter les titres ou tubes du groupe qu’à leur place chronologique et sans en remettre dix fois une couche d’Anarchy in the UK. Un difficile exercice de style pour Temple, ami de longue date de Rotten, mais véritablement réussi. Les quatre hurluberlus ne sont pas toujours amènes les uns envers les autres (le rouquin en a toujours contre Matlock), vingt ans après, ni envers l’icône désespérante et autodestructrice de Sid Vicious dont l’approche par le film est fine et nuancée. Rotten notamment semble être intelligent et ne joue pas à la star-provoc qu’il aime bien incarner devant les caméras qui le lui demandent. La fin des Pistols dans sa bouche est même poignante, on sent la vérité passer et c’est l’une des forces de ce documentaire d’y parvenir. Deux ou trois phrases pour finir « Très rapidement, le punk est devenu un mouvement où les gens avaient un accoutrement uniforme, l’exact contraire d’où le punk de départ allait » ; « Le punk est arrivé au moment où il devait arriver. Il ne pouvait pas ne pas arriver. C’était dans l’air du temps » ; « Deviens toi-même, ne te soumets pas au système ! ». Indispensable pour tout amateur d’histoire du rock (et du punk, bien sûr, j’en parle même pas).



L’arrivée du train en gare de La Ciotat (1895, Auguste et Louis Lumière)
Des petits jeunes pour un court-métrage décoiffant. Alors c’est un train qui arrive dans cette commune des Bouches-du-Rhônes nommée La Ciotat. Des gens sont dans le train et il bouge. Chose étonnante, ce film est sans musique et en noir et blanc. Un parti pris original pour ces débutants dont on espère qu’ils iront loin et peut-être feront des émules.

Requiem for a dream (Darren Aronofski, 2000 [2001])
L’originalité de sa précédente œuvre (Pi) , même si elle n’était pas aboutie, était suffisamment captivante pour qu’on pût avoir envie de voir de quel bois cette fois Aronofski allait se chauffer . Il a gardé, pour nous conter une descente aux enfers de jeunes drogués new-yorkais, une esthétique clipée qui, dans la première partie, à force de mettre la dose sur le leitmotiv, lasse. Les jeunes héros, sortis de pubs Calvin Klein, errent et bouffent la vie à pleine dent mais des fois y a des pépins qu’étaient pas prévus au programme et l’indigestion guette. L’interprétation est néanmoins de bonne qualité, notamment le personnage de la mère (Ellen Burstyn), qui ne peut qu’impressionner. La déchéance est le maître mot du film. Souvent dominé par la facilité du clinquant, le film vaut surtout pour son dernier quart d’heure, terrible et kaléidoscopé à une vitesse folle et dont la maîtrise force le respect (sexe, défonce, violence et folie à tous les étages). Requiem for a dream reste malgré tout imparfait mais pour des raisons inverses à ? , où le réalisateur gâchait tout par une fin tocarde. Et la musique d’ensemble, jouée par le Quatuor Kronos, est en plus carrément rasante. Espérons que cet original réalisateur trouve enfin sa plénitude lors de son troisième opus, on pourrait se régaler.


Les filles ne savent pas nager (Anne-Sophie Birot, 2000)
Une première œuvre me semble-t-il. Ni bonne, ni mauvaise. Cela parle de la difficulté de vivre son adolescence chez les jeunes filles. L’une est plutôt cérébrale, l’autre délurée. Elles ne se voient qu’aux vacances et sont donc les meilleures amies du monde. Si le film est psychologiquement juste de même que le casting, l’intrigue est malhabile et part en couilles vers la fin. Un sujet peu simple et risqué et dont il est dommage que le réalisateur n’ait pu venir à bout (contrairement à l’excellent Fucking Åmål sorti voici peu).

Yi Yi (Edouard Yang, 2000)
Voici une oeuvre d’une justesse admirable, qui brasse énormément de thèmes puisque l’on suit tous les membres d’une même famille néo-bourgeoise de Taipei (le père, la mère, la fille et le fils) dans son évolution personnelle. Cela fournit à la fin un canevas implexe et d’une profondeur époustouflante. Les personnages du père et de la fille notamment ont des développements quasi bergmaniens, l’un dans ses rapports à l’amour et au temps irrattrappable, l’autre dans ceux à l’amour et à la mort comme peut y évoluer une adolescente introvertie. Les deux grands rassemblements familiaux du film sont un mariage et un enterrement et cet oscillement entre les deux pôles de l’existence, si dense dans ce long-métrage, marque de manière indélébile la vue de cette œuvre. Le petit garçon éponyme apporte qui plus est une touche d’humour à l’ensemble qui rehausse encore plus les teintes métaphysiques de ce mélodrame actuel. J’avais bien aimé un précédent film du Taïwanais Yang (Terreur) mais celui-ci me laisse sans voix. Chef-d’œuvre.

Les gens en maillots de bain ne sont pas forcément surperficiels (Eric Assous, 2000)
Le titre peut paraître faire référence aux Gens normaux n’ont rien d’exceptionnel mais c’est plutôt du côté des Bronzés que les références s’imposent. On est toutefois loin de la verve du Splendid mais ce film n’en déploie pas moins une satire relativement efficace. C’est la vie d’un Club-Med. à Saint-Martin aux Antilles, où les gens sont là pour se reposer mais le repos, c’est comme le boulot dans la société capitaliste actuelle, il te faut un chef-d’équipe. Libre mais encore faut-il apprendre à être libre comme on te dit… Du farniente sous cellophane, la critique habituelle qu’on profère aux clubs de vacances mais n’est-ce pas là la vérité… Bref, des gens crétins mais qui mit dans cette mixture le deviennent aisément puisque juste l’empiffrement, la sieste rentable et surtout le sexe facile sont leurs buts favoris. Seins nus, cocktails, karaokés et canapés pendant quinze jours à parler entre Parigots stressés du boulot de… Paris et du boulot, le coup classique. Les acteurs (Gad Elmaleh, Agnès Soral, Isabelle Gélinas, Serge Hazanavicius) ne se débrouillent pas trop mal et l’actrice principale qui fait un putain d’enfant dans le dos à son amant donne par son personnage un peu plus de profondeur. Ce n’est pas certes un chef-d’œuvre mais cela reste fort honnête alors que le sujet pouvait laisser s’attendre au pire.

Antilles sur Seine (Pascal Légitimus, 2000)
Ouais bon, pas besoin de vous faire un dessin, ce qui s’annonçait comme un film moyen, est carrément une daube. Une intrigue maigrichonne dans les milieux antillais (mais cela pourrait se passer chez les Chinois ou dans la communauté malienne ou turque, ça n’a hélas aucune importance) et surtout un scénario qui verse dans le malsain et le polar noir malgré lui, font que tout ça part en eau de boudin (antillais, ahah !) (un film comique franchouillard qui part en histoire de kidnapping violente, pas étonnant que la sauce ait du mal à prendre). Seuls les passages où Légitimus fait son one-man-show valent le détour, notamment celui où il se prend pour un animateur de MEDIA TROPICAL (et encore, c’est à peine exagéré par rapport à la réalité !). A oublier, nom d’une banane martiniquaise ! (avec un bon vieux-rhum de Saint-Esprit !).

Tokyo Fist (Shinya Tsukamoto, 1996 [2001])
Ayant vu les œuvres précédentes les plus célèbres de Tsukamoto (Tetsuo et Tetsuo II), j’étais curieux de voir ce que pouvait donner ce Tokyo Fist. Je n’ai pas été déçu du voyage (j’aurais dû prendre des pansements par contre !).Si certains thèmes sont récurrents (le métal dans la chair, le tremblement de l’image et la vitesse violente), ce film est nettement plus facile d’accès que les Tetsuo (ce qui est relatif quand on connaît le côté bizarroïde de ceux-ci !) . Nous évoluons ici dans l’univers de la boxe et de la rivalité amoureuse, un monde d’une violence maximale, dans une ville suante et brutale de béton et de verre où le bruit règne en maître. Emotion, dureté, humour, érotisme, techno étrange à l’atmosphère indus, frénésie (cadrage et montage pètent l’écran), tout cela est diaboliquement mélangé et n’en finit pas d’imploser de son trop-plein d’énergie. Ajoutez à cela une interprétation du meilleur aloi (Tsukamoto lui-même, Kohji Tsukamoto [son cousin] et la phénoménale Kahori Fujii] et vous comrpendrez que je puisse avoir eu ce film en tête pendant une semaine. Un carton qui t’uppercute la tronche que tu demandes, la machoire fracassée sur le tapis rougie, d’où donc qu’est venu le coup…

Euréka (Aoyama Shinji, 2000)
Le film hors norme qui dure trois heures avec des paroles toutes les vingt minutes et qui malgré tout est sensationnel, le voici. La scène du début est magistrale. Tout baigne dans une ambiance filtrée au sépia qui donne de la chaleur au noir et blanc. Je ne peux raconter l’intrigue de ce long-métrage japonais, qui est tout aussi psychologique que policière, sans déflorer l’intérêt qu’on pourrait avoir au visionnement d’une telle œuvre. Le travail photographique (certains plans sont anthologiques, celui du bus et celui de la fin sur le panorama) laisse pantois dans ce film qui prend son temps et laisse le spectateur rentrer dans la psychologie de chacun des personnages si pleinement que les frottements chocs entre eux n’en sont que plus denses voire violents. Œuvre hypnotisante, Eurêka va très loin par son beau récit. Clairement l’un des films de l’année et même de la décennie.

Aniki, mon frère (2000, Takeshi Kitano)
Le Kitano de cette année ne donne pas dans la dentelle sucrée des biscuits à la cuiller. C’est en effet le plus violent film de gangsters que j’ai vu depuis Casino de Scorcese. La mafia offrant son vrai visage (qui n’est pas celui de Jean Lefebvre). Un yakusa, contraint de s’exiler du fait de la mort de son chef, va s’installer à Los Angeles. Il parle autant anglais que moi le swahili, il sait juste que son petit frère peut l’héberger. Un petit frère qui deale sa merde avec d’autres petits lascars à la petite semaine. Le yakusa rentre par les circonstances dans le bizness mais as-tu déjà vu un rottweiler dans une meute de cockers spaniels ? C’est parti pour deux heures de règlement de compte impressionnant avec son lot de voyoux hâbleurs ou impavides, ses vengeances cruelles et sa folie destructrice. Kitano rend encore une fois à merveille l’ambiance recherchée. Peur et froideur sont au rendez-vous à peine agrémentées de quelques séquences humoristiques. La photographie et la musique (Hisaichi comme d’hab’) relèvent encore une fois de l’excellence et les acteurs de première main (toujours la même bande : ). Un film, tu sors du ciné, tu cherches où sont les guns qui vont te flinguer la façounette en un feu d’artifices d’hémoglobine vermillonne…

Le Pacte des Loups (Christophe Ganz, 2001)
Une des grosses productions de ce début d’année, Le Pacte des Loups en est aussi la plus grosse déception. Sans rythme, extrêmement mal dirigé, construit sur un scénario mal ficelé et ne valant pas un pet de lapin, ce pauvre long-métrage est une vraie catastrophe. Et pourtant, tout était dans son camp au départ : beaucoup d’argent, une trame de départ en or (l’histoire de la bête du Gévaudan, ici complètement trafiquée alors que la réelle est au plus haut point passionnante, un vrai polar), certains bons acteurs (Jean Yanne, Vincent Cassel, Jean-François Stévenin). C’est proprement incompréhensible et pour tout dire, c’en devient risible : la fin est archi-burlesque (il faut voir la Bête pour le croire, les monstres les plus carton-pâte de péplum des années 50 n’ont pas à rougir, ah ça non !) à se demander si l’équipe de tournage et la production n’ont pas voulu pour de bon se foutre de la gueule du spectateur, assurées qu’elle était de plumer le gogo par un matraquage publicitaire violent. L’esthétique générale du film est celle d’un clip new age avec une musique de publicité à trois francs et encore, je préfère regarder les clips costumés que faisait le mari de Mylène Farmer pour sa femme voici plus de dix ans, ils étaient largement mieux foutus dans le genre français pompeux qui se la joue « grosse prod. ».Mieux que ça, l’acteur principal du film, Samuel Le Bihan, est aussi expressif qu’un agglo et la vedette féminine, Monica Belluci, ne sait absolument pas jouer à part se foutre à oilpé . Même si on peut bien sûr toucher plus bas que ça (c’est pas Deux ou trois choses que je sais d’elle de Godard ou le Promenons-nous dans les bois de je ne sais plus qui, sorti l’an passé), ce Pacte des Nuls me fait irrésistiblement penser à cet autre horreur du cinéma récent, Existenz de David Cronenberg. Christophe Ganz aime à définir son cinéma comme un cinéma de genre, c’est bien possible mais c’est alors le genre du navet soporifique qu’il a retenu.

Scarlet Diva (Asia Argento, 2000 [2001)
La fille de Dario-la-menace commet (à ma connaissance) son premier film en tant que réalisatrice et, disons-le tout de suite, pour un premier essai, c'est oun gross ratage. Le début pourtant ne laissait pas présager une telle suite avec une zique techoïde bien inspirée sur fond d'aperçu kaléïdoscopal de la vie d'une star (le film se veut presque autobiographique). Rapidement toutefois, l'on doit déchanter (dès l'arrivée d'Asia Place des Vosges, où elle trouve sa copine dans le plus simple appareil pieds et poings liés ensemble tels une contorsionniste chinoise avec boule de geisha dans le bec). On se dit : mince, premier incident sans savoir qu'en fait tout le film est un incident ; Asia Argento passe son temps à se foutre à poil pour montrer son tatouage pubien, baiser, picoler et prendre la schnouff et le spécial K (en hommage à Placebo et à Kellogs). Le producteur véreux, le bébé accidentel et élevé à la va comme je t'oublie, l'avant-gardiste sordide, le mégapote homo qu'a ses entrées partout, le black dealer et le rebeux mac, tout le monde est de la fête sauf le spectateur et ça, vois-tu, c'est un peu dommage, comme qui dirait... Uno smacco totale. Je sais que le papa Dario n'a pas fait que des chefs-d'oeuvre mais quand même... N'est pas son père qui veut.



Virgin Suicides (2000, Sofia Coppola)
Justement, pour reprendre la fin de la chronique précédente, celle qui veut, c'est Sofia Coppola, fille de son père et de sa mère, qui met à genoux le public des salles obscures (les gens se cognent au fauteuil, argh!) avec cette première réalisation magistrale. Ce film m'a fait imparablement penser à un autre par son atmosphère, bien qu'il soit nettement moins fantastique et plus dans le registre de la chronique de fait divers, c'est à Carrie de Brian de Palma . Une ambiance de petite ville provinciale américaine années 70 avec son côté glam-disco et puritain (un puritanisme incarné singulièrement mais remarquablement ici par James Woods et Kathleen Turner) et ses lycéens en pleine ébullition amoureuse et parfois acnéique. D'entrée, la mort dresse sur le film son sombre voile puisqu'une voix off nous annonce qu'elle va nous narrer comment cinq soeurs se sont en peu de temps suicidées. Grâce à une maîtrise du découpage et de la lumière hors de pair (la scène de l'aînée au stade au petit jour), Virgins Suicide prend à la gorge et la serre sans relâchement de tout le film. L'horreur existentielle qui naît de la superposition de la mort avec une idylle adolescentine emporte tout sur son passage, impression d'autant renforcée que tout cela nous est raconté par un quintette de garçons amis mais communs et que ce récit ambigu (de tiers qui furent tout à la fois acteurs et spectateurs de la tragédie) accentue à merveille la glace de l'effroi recherché. On en arrive à être aussi étouffé (mais pas le moins du monde ennuyé, bien au contraire) par la torpeur morale sous-jacente que les héroïnes elles-mêmes. Chapeau aussi à Air qui a composé une bande-son tip-top etbien meilleure que les frenchtoucheries que le duo versaillais nous branlette habituellement. Un magot.

Trois Huit (2001, Philippe Le Guay)
Après Ressources humaines l’an passé, Trois Huit s’impose comme une nouvelle réussite du cinéma social français. Le thème en est le harcèlement moral et, plus généralement, la domination d’un être sur un autre grâce à la docilité tacite et de la victime et du groupe de personnes dans lequel ils évoluent. Grâce à une finesse d’analyse stupéfiante, Le Guay décortique cette relation (ici entre deux ouvriers d’une usine de verres) sans oublier aucun des paramètres possibles qui permettent et surtout n’empêchent pas à de telles choses d’arriver et qui sont pourtant tues tant elles sont vécues comme honteuse (qui peut se dire faible et dominé aujourd’hui ? La société ne l’autorise pas). Ainsi interviennent la femme et le fils auprès desquels le harcelé (Gérald Laroche, super, un nouveau Roger Souza) fait comme si de rien n’était. Incroyable aussi (mais il nous y a habitué depuis Sombre) le numéro d’acteur de Marc Barbé, sans doute l’un des acteurs français les plus envoûtants d’aujourd’hui. Quel salaud et comment il campe bien son personnage ! Tout cela est dans le fond misérable et horrible et c’est malgré tout une part de la condition humaine qu’il est donné à chacun d’entre nous d’observer dans la vie courante voire d’être obligé d’y faire face pour ne pas passer à la moulinette des rapports de jungle comme le capitalisme aime à s’en nourrir. Le film français de la première partie de cette année.

Du soleil pour les gueux (Alain Guiraudie, 2000)
Si vous aimez les trucs chiants et nase, style poésie à deux balles minable où l’ennui est imparable, ce film qui dure moins d’une heure (et précédé d’un court-métrage du même acabit) mais vous en paraît vingt est impayable. Un berger barbudos culbute une coiffeuse dans les ronces par chez José Bové pendant qu’un promeneur équipé par le Vieux Campeur poursuit un berger babos. Et puis c’est tout. La phrase que je viens d’écrire est cent mille fois plus énergique que le film lui-même Nul, raté, pénible, zéro. Tellement que j’en fais une chronique. Je l’ai vu gratuitement et encore je me suis fait voler. Une référence négative absolue.

Animal Factory (Steve Buscemi, 2000 [2001])
Un jeune garçon blanc de classe moyenne aisée est incarcéré à cause d’histoires de marijuana à la prison de San Quentin, une des mieux surveillées des Etats-Unis. Avec lui, l’on plonge dans un univers de violence abominable et où les dernières choses qui règnent sont la loi, la justice, la tolérance et la rédemption, ce pourquoi ce genre de bâtiment est pourtant fait. Jeune, effeminé, Ron est la proie rêvée de bon nombre de taulards à la sexualité déviée. Il est heureusement mais étrangement pris sous sa coupe par un des rois du pénitencier. Ce long-métrage, désespérant par le réalisme de l’univers carcéral qu’il dépeint, est une réussite de bout en bout puisqu’outre un portrait vrai, donc au vitriol, de la prison, royaume de la mort et de la peur, c’est aussi un film à suspens de premier ordre. L’auteur n’est pas un inconnu puisque Buscemi est l’un des acteurs phares du cinéma indépendant américain de Tarantino à Jarmush en passant par les frères Coen. Il prouve là qu’il est aussi un réalisateur de premier plan. Un numéro d’interprétation crève l’écran, c’est celui de Willem Dafoe, magistral et époustouflant, qui campe un être dur et intelligent, toujours à la limite du pétage de plomb total (la scène de la folie !) mais qui se retient on ne sait comment. Edward Furlong, qui joue Ron, est, lui aussi, admirable (à l’instar de son interprétation de Pecker chez Waters). On peut reconnaître aussi parmi les interprètes Seymour Cassel et Mickey Rourke (dans un contre-rôle). Cette oeuvre se pose comme désormais un classique du film de prison.

Une nuit avec Sabrina Love (Alejandro Agresti, 2000 [2001])
Nouveau film d'Alejandro Agresti, il narre l'aventure d'un jeune adolescent provincial et orphelin qui gagne une nuit d'amour avec la reine du X de Buenos Aires, Sabrina Love (jouée par Cécilia Roth, une des actrices fétiches d'Almodovar) laquelle a un show à la télé. Lui qui n'a jamais bougé de son trou, il est clair que cela va modifier un tantinet sa vie qui se résumait à aller emballer le poulet à l'abattoir et à discuter avec ses amis. Il va rencontrer lors de son périple toutes sortes de personnages, le plus souvent barrés mais relativement typiques de l'Argentine, ainsi qu'aime faire Agresti (la fille à papa coole, le poète semi-cloche nostalgique, l'homosexuel gigolo). Si un petit essouflement rythmique survient au deux-tiers, on est spectateur de nombreuses scène particulièrement réussies (la confession vidéo, les prémices amoureux avec la jeune présentatrice télé, le bal de tango). Les personnages sont remarquablement maîtrisés dans leur peinture et on s'y attache à la manière dont Sautet savait s'y prendre pour nous faire aimer les siens. Un bon film d'un réalisateur fort doué.

Les Démons à ma porte (Jiang Wen, 2000 [2001])
Se déroulant pendant l'occupation japonaise en Chine à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ce film noir et blanc brillant joue sur le registre humoristique, qui ne sied pourtant pas aux conflits meurtriers, à la manière fine des Italiens de la grande époque (50/60). Des paysans chinois ramassent un interprète et un soldat japonais qu'un inconnu invisible leur confie comme prisonniers quoi qu'ils en aient. La peur d'être repéré de l'occupant engendre du coup des situations abracadabrantes, grotesques, révélatrices de la nature humaine et extrêmement comiques (cf. scène des traductions). La fin est carrément surprenante, déboussolante même dirais-je et le tout dernier plan magnifique. Un film de premier plan et en fin de compte pas si facile. Où l'on voit que la guerre et l'armée ne sont pas humaine mais que les individus, pris seul à seul, peuvent l'être.

En vrac pour terminer, j’ai aussi été voir le dernier Woody Allen Escrocs mais pas trop, qui renoue avec la bonne veine du binoclard allumé, celle de Meurtre mystérieux à Manhattan entre autres. Un très bon moment avec une scène du collier de perlouzes avec quiproquos écroulants dans la party finale qui restera dans les annales. Autre réussite, le mélo Tigre et dragon (2000) de Ang Lee, décidément un maître du genre (il avait réalisé Raisons et Sentiments) avec Chow Yun Fat et Michelle Yeoh. D’une beauté plastique sans pareille, ce conte convainc sans problème et demeure un bien bon film . Nettement moins réjouissant sont par contre Krampack (Cesc Gay, 2000), oeuvrette sur deux ados espingouins adeptes de la branlette mutuelle et confrontées aux premières amours chaudes, plus chaudes en tout cas que le glaçon que je suis demeuré pendant la projection. Cela ne m’avait cependant pas foutu la gerbe comme la morale de Traffic, dernier Soderbergh en date et gros ratage pour ce grand réalisateur. Si la photographie (notamment des scènes mexicaines) est sidérante d’ingéniosité avec sa luminosité saturée, le scénario bidon est lamentable (Zeta Jones, ingénue et tendre la veille, chef sans pitié d’un cartel énorme le lendemain et surtout Michael Douglas, conseiller du président pour la drogue qui roule en Cadillac dans les ghettos noirs pourris de Détroit et laisse sa fille piper le crack comme si elle courait chez Festina, on aura tout vu !) et la morale de l’histoire encore plus : ne laissons pas nos enfants avec de la drogue, vilain, pas bien, méchant méchant ! A oublier. A oublier aussi Les Blessures assassines (2000) de Jean-Pierre Denis, fils de la mère et qui naquit dans une machine à laver. Il raconte la tragédie des sœurs Papin, les tante à Jean PP. A la sortie, on a un film qualité française, mal dirigé (la mère ! trop nulle) ringue à souhait, où rien ne passe et que, bien sûr, la critique officielle a loué. Alors, comme disait le copain de Canto, camembert la critique officielle !


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