Si par quelques malencontreux hasards, il était donc vrai qu'abondance de biens ne nuit pas, alors force est de reconnaître en cette rentrée 1998 une vertu à l'économie de marché du disque : la quantité. Merci, c'est toujours ça de pris Monsieur Polygram, mais du coup le pauvre consommateur de disques devra ramer le plus souvent en eaux plates avec pour unique phare un bon matraquage radios périphériques et une bonne exposition téléshowbize. C'est pourquoi HAMS! part en modeste croisade, enfourche son plus altier mammouth, chausse ses plus belles palmes et vous propose de plonger sous ces surfaces étales pour dénicher quelques perles dans les grands fonds des bacs à nouveautés clonées.
Plus de peur que mal pour Steven Jones et son BABY BIRD. 400 titres composés en 10 années de profonde solitude artistique ont donné naissance à 5 albums à compte d'auteur comme on dit du côté de la Sacem, évidemment entre autisme et ascétisme, où rarement fêlure s'était exprimée et épanouie avec si peu : trois bouts de ficelle, une boîte à rythmes et une voix aux mots sales. Moins belle gueule par conséquent que tronche de névrosé. Pourtant, aujourd'hui que BABY BIRD est un vrai groupe de pro à plusieurs, un réel potentiel de ventes suite au carton de la compilation de quelques unes de ses chansons réenregistrées au propre par Monsieur Geffen, réarrangées comme il faut pour passer à Top of the Pop et " promotionnées " par des vrais V.R.P. diplômés, on avait les foies que pour son premier véritable album d'après les feux de la rampe, BABY BIRD ait fait du gras pour mieux rembourrer ses nouvelles épaulettes de crooner pour jeunes, que dès lors, on lui enrobe son mal être de flatterie et de prétention (du fond de son trou, le Steven Jones d'alors ne rêvait-il pas d'être une " pop star " ), que son lyrisme désespéré devienne vite exaspérant en 24 pistes digital. Mais, plus de peur que de mal, car malgré ci et là quelques bluettes chamallows, " There's something going on " est bel et bien une déclaration d'intention : BABY BIRD reste BABY BIRD même si en toute bonne logique " there's something changing so ". Même bien habillées et fraîchement peignées, la fragilité de ses mélodies demeure.
De tels doutes, aucune nécessité en ce qui concerne chaque nouvelle livraison de LAMBCHOP, le gang de Nashville mené par Kurt Wagner. D'ailleurs un nouveau LAMBCHOP, ça ne s'attend pas, ça ne se cherche pas, ça ne se spécule pas non plus. Au contraire, ça arrive sans prévenir à intervalles plus ou moins réguliers; et hop!, il se trouve être là, tout simplement; et chaque fois, comme si de rien n'était, s'impose comme un petit bonheur plus ou moins mélancolique, élégance et raffinement sur fond de steel pédals et chant à demi mot. " What another man spills " n'échappe pas à la règle sauf que LAMBCHOP, véritable collectif de compositeurs, nous gâte d'autant que l'atmosphère y est plus cool, décontractée et sereine qu'à l'accoutumé (allant même jusqu'à nous offrir une pimpante reprise d'un standard de Curtis Mayfield " Give me your love " ), tout en conservant, il va de soi, tenue et maintien -nous sommes ici dans d'une maison de goût tout de même.
Même tendance à l'éclaircie pour " The infinite circle " le nouveau SOPHIA, autre bande à géométrie instable (pour ce second album, le maître des opérations, M. Robin Proper Sheppard a recruté parmi les fameux mercenaires belges) mais cette fois, pas collectif de compositeurs du tout. Mais, attention, pour qui s'est déjà égaré dans les cieux du premier album de SOPHIA, gris à mourir et chargés de tristesse, il est évident que l'éclaircie ne peut être que pâlichonne et passagère. Pourtant aussi menue est-elle, elle fait du bien dans la contemplation rêveuse de ces terres calcinées, où souffle mélancolie sous ciel bas. Franchement, ça doit pas être rigolo tous les jours une vie de Proper Sheppard et c'est peut être pour ça qu' il donne d'aussi belles chansons.
On trouvera nettement moins de lamentations (ouf!!!), aussi émouvantes qu'elles puissent être, chez GRAHAM COXON, moitié pensante du quatuor de Blur (cherchez les 2 erreurs), qui a rarement été aussi inspiré que le jour où il a décidé de l'escapade solo de ce " The sky is too high " : sincère avec ses coups de sang et coups de blues mêlés, créatif dans sa texture brute (voir carrément low fi) et intimiste, il y a de quoi tomber sous le charme. De là à se mettre à rêver que l'autre moitié signifiante du navire Blur, Damon Albarn, soit capable de sortir ses tripes d'aussi belle et vigoureuse manière, c'est une autre paire de manches.
Dans le registre rock américain haut de gamme, deux des boutiques les plus en vue du coin réassortissent leurs rayons en cette rentrée. Et le chaland le plus exigeant peut préparer ses pépettes, car on ne voit comment résister à l'achat compulsif du dernier SWELL " For all the beautiful people " - tant de mélodies ourlées sur d'imparables rythmiques boisées - ou du dernier SPARKLEHORSE " good moorning spider " - dangereuses montagnes russes entre ballades cristallines à fondre et imparables accélérations d'humeur à remonter le coeur-. Et si vous avez pas les pépettes, alors, qu'une solution : niquez les videurs à l'entrée et volez les.
Quand la pub dit que l'espace est un luxe, pour une fois elle a raison (même si ça m'arrache la gueule de le reconnaître) : tant d'autres galettes croustillantes et à force de déblatérer, si peu de place pour louanger le quatrième bébé de Chan Marschall, jeune femme qui préside avec poigne et tempérament aux destinées de CAT POWER ." Moon pix ", longue et intense complainte, juste une voix en équilibre sur quelques accords tempérés. Et il aurait fallu évoquer aussi le troisième opus des exilés rennais de SLOY " électrelite ", électrisant justement avec son rock déstructuré, ses guitares coupantes, un chant hagard et sa vigueur sans Viagra. Un gros poisson sans doute de la rentrée hexagonale, tout comme, dans d'autres filières, l'album solo du chanteur de Kat Onoma, RODOLPHE BURGER, " Méteor show " où le gars risque sa peau à concilier dangereusement rock et beat, poésie et machine, dans des arrangements audacieux sans être démonstratifs. Et si seulement il restait un peu d'espace -misère, que la vie est courte et une page petite, auraient leurs places les dernières réjouissances en provenance de GORKY'S ZYGOTIC MYNCI, des CATCHERS, de LISA GERMANO, de PJ HARVEY ou de MERCURY REV, etc, etc,...
BABY BIRD > There's something going on > Echo-Labels ; RODOLPHE BURGER > Météor show > Chrysalis-Emi
LAMBCHOP > What another man spills > Merge-Labels ; GORKY'S ZYGOTIC MYNCI > Gorky 5 > Fontana-Mercury
SOPHIA > The infinite circle > Flowershop records-Pias ; SLOY > Electrelite > Tubes-Pias
GRAHAM COXON > The sky is too high > Transcopic-Emi ; CATCHERS > Stooping to fit > Setanta-Labels
SWELL > For all the beautifull people > Domino-Labels ; LISA GERMANO > Slide > 4AD-Labels
SPARKLEHORSE > Good morning spider > Chrysalis ; PJ HARVEY > Is this désire > Island
CAT POWER > Moon pix > Matador-Pias ; MERCURY REV > Deserter's song > V2
Autres chroniques musicales (par DJ Popiste)
Plus de trois mois de silence, des ampoules aux peids dans nos suberpes sandalettes urbaines, achetées rien que pour les festivals d'été, Boréalis, Big Warp, et autre Artefact, et c'est la rentrée pour les oreilles en sillicium de HAMS!.
Un été qui se termina par une grande rAve, la techno parade de Paris (dans le 75), sous le patronnage du gentil et plus tout jeune J. Lang, Dj J. pour les intimes. Un grand rendez vous techno supermarché, bien encadré, surveillé et estampillé NRJ/ M6 (cf. podium de Nation). Un rendez vous plein d'une Dance Génération en tenue Grand Week End, redevenus pour certains dès le lundi matin de gentils encravatés bien corrects.
Mais heureusement le mouvement éléctronique va plus loin que des clichés foire du trône bien vendeurs, emballés-pesés par des commentaires bidons et des journaleux de surface. Alors Gentedames et Gentilshommes, soyons positif et baladons nous dans les coins.Tout le monde en parle. Et bien, nous aussi : l'album de UNKLE " Psyence fiction ", projet de James Lavelles (à la ville, boss de Mo'wax) avec comme mentor sique Josh Davies, alias DJ Shadow. 3 ans de boulot, de constructions, de collaborations diverses (Alice Temple, Thom Yorke-Radiohead, Mark Hollis, Mike D.-Beastie Boy, Richard Ashcroft-The Verve jusqu'au bassiste de Métallica) et un album incontournable, multiforme, où chacun pourrra trouver midi à sa porte. Après cet explosif en 12 coups, notons dans des gammes plus douces et rassurantes qu'ALPHA sort un mini-album " Pepper "en 8 titres, 8 remixes de leur 1er scud, avec entre autres pépites, celui de Receiver. Parallèlement, on peut les retrouver sur le " Inertia creep remix " des Massive Attack au côté, notamment des power-popeux de Manic Street Preachers.
Après quelques singles au C.V, c'est au tour de ANDREA PARKER d'avoir carte blanche pour un nouveau volume de l'excellente série DJ KICKS du label berlinois K7. Un mix d'une grande diversité, avec rien que du bon. Et au passage, un gros coup de coeur pour le remixe de Depeche Mode, suivi d'une sublime correction d'un titre du cher Dr Octagon. JUSTICE derrière lequel se cache Mr T. Bowes distille avec son album " View points " une Drum & Bass qui colle aussi bien pour une piste de dance poisseuse que le sofa du living room. Un coup de chaud avec Justice, un coup de froid avec le " Junglist " gallois PHOTEK et son " Form & function ". Au programme, raretés et inédits, toujours épurés, inquiétants, difficiles d'approche mais avec toujours autant d'émotions au bout du chemin. Le label du pays Lithium sort de ses gonds en nous offrant une galette pur plaisir, celle de Jérôme Minière, qui fait les choses en grand avec un double album au titre justement très Lithium " La nuit éclaire le jour suivant ". Cet ex-étudiant en cinéma nous livre un premier volet de chansons électo-pop soft, alors que le second ne se consacre qu'a de l'instru éléctronique fait de fort belle manière, tour à tour planante, joyeuse ou plus sombre. Plus de gaz d'échappement avec " Hybrid " du français MARC EM. La machinerie Breakbeats est parfaitement huilée, il nous met même une batterie, des percus, des voix pour un opus très cohérent . Restons au chaud chez nous, dans un délicieux bourg d' Ile-de-France, Paris, côté Obberkampf connection, avec le 1er ouvrage de SEVEN DUB " Rock it tonight ", très classe et policé plutôt vernissage Saint-Germain-des-Prés que fête de la moissonneuse-batteuse de collection. Un truc qui fleurte dangeureusement, mais toujours évite d'un coup de reinhabile la caricature. Allaiter à la Black music, ç'est pas révolution irrestible mais un vrai savoir faire dans le léger et pétillant. Pour clore nos babiles, une visite de politesse à Jack Dangers et son MEAT BEAT MANIFESTO. Le petit dernier du remixeur chouchou des Chemical et autre Prodigy " Actual sounds + voices " tape dans une Techno rock évidemment plus alambiquée et raffinée que la moyenne basse des sans grades du genre, même si on tombe sur des coups de mou, notamment avec quelques vocaux pas toujours les bien venus. Mais paraîtrait que personne n'est parfait ?Traînages d'oreilles recommandés aussi sur :
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